Sommet états-Unis – Afrique : L’aide au développement et la bonne gouvernance

15/12/2022 mis à jour: 10:15
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Le second Sommet Etats-Unis–Afrique, qui se tient à Washington depuis mardi et qui prendra fin aujourd’hui par la réception à la Maison-Blanche par le président Joe Biden des dirigeants africains ayant pris part aux travaux de ce sommet, a innové en termes d’approche, par rapport à la première édition de 2014 sous le mandat de l’ex-président Barack Obama. En plus du dialogue politique que le président américain a prévu dans son agenda avec ses pairs africains, et des échanges programmés entre ces derniers avec le secrétaire d’Etat américain, Anthony Blinken, et les autres membres de l’administration américaine, en fonction des centres d'intérêts des uns et des autres, des forums de débat avec les sociétés civiles africaines ainsi qu’avec les hommes d’affaires ont également été organisés, en marge du sommet. Les échos qui parviennent des discussions ouvertes sur les différentes thématiques abordées par le sommet, aussi bien au niveau des chefs d’Etat que des représentants des sociétés civiles et du monde des affaires, font apparaître clairement des réalités africaines plurielles et fatalement des attentes, le moins que l’on puisse dire, différenciées. Le mot d’ordre endossé par l’Union africaine appelant les décideurs africains à parler d’une même voix dans les instances internationales s’est vu dilué dans des revendications nationalistes étroites, sectaires qui trahissent des réalités politiques, sécuritaires, économiques et sociales, voire historiques internes propres à chaque pays. Les dirigeants africains présents au sommet sont porteurs de messages, de préoccupations, d’espérances, de vision de la coopération avec le puissant partenaire américain, qui varient selon les spécificités nationales, la nature des régimes politiques en place et de leurs attentes,  l’histoire, le niveau de développement socioéconomique, la géopolitique interne et régionale de l’espace géographique auquel appartient chaque pays... Comment l’Afrique pourra-t-elle agréger tout cela, face à ses partenaires étrangers, s’accorder sur une feuille de route consensuelle avec une vision qui reflète les intérêts de tous et de chacun, loin des égoïsmes nationaux ? La grande faiblesse de l’Afrique et sa fragilité pour s’affirmer dans le cadre des partenariats avec l’étranger et dans les négociations internationales, individuellement et collectivement, à travers l’organisation panafricaine et les autres organisations régionales du continent, viennent précisément de là. Et les partenaires de l’Afrique l’ont bien compris, en jouant sur l’absence de vision commune de l’Afrique dans ses rapport à ses partenaires, les divisions, les tensions, qui affectent le continent, et le plus déterminant, pour nombre de pays africains, le boulet de la dépendance quasi totale à l’étranger, aux plans économique, sécuritaire, pour la formation des élites, la quête des marchés pour le placement des matières premières et de produits agricoles, qui constituent leur principale ressource… Parler de bonne gouvernance, de démocratie, d’alternance au pouvoir, de droits de l’homme avec des dirigeants indéboulonnables qui sont en poste depuis des décennies relève, tout bonnement, de la provocation, de l’hérésie. Et pourtant cela existe, on n’hésite pas à dérouler le tapis rouge pour des dictateurs africains, à couvrir leur méfaits, le détournement des richesses des peuples africains,  au nom de la realpolitik et de la raison d’Etat, cette blanchisseuse qui lave tous les dépassements et qui rend fréquentables des dirigeants peu recommandables. Au Sommet de Washington, face aux interlocuteurs américains, on a eu droit à des doléances à la carte, égrenées  suivant les priorités, les réalités nationales, les pressions intérieures et extérieures de chaque pays. Certains pays réclamant de l’assistance militaire pour faire face à des tensions internes ou des agressions extérieures, d’autres de l’aide financière sonnante et trébuchante... L’annonce de la mobilisation d’un fonds de 55 milliards de dollars pour l’Afrique faite, à cet égard, à l’occasion de ce sommet préfigure, d’ores et déjà, des débats et des négociations serrées qui vont s’ouvrir au niveau de l’Afrique pour la question de l’éligibilité à ce fonds. Fort heureusement, cette image dévalori-sante, injuste, de l’Afrique, éternelle assistée, qui tend la main, est contrebalancée par un nouveau discours porté, dans les instances internationales, dans les échanges bilatéraux et mutilatéraux par des pays qui sont à l’avant-garde de la politique de renouveau pour une Afrique ambitieuse, conquérante telle que rêvée par ses libérateurs.

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