Sétif : Des heureux et des milliers de mécontents

18/05/2022 mis à jour: 08:32
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La chaîne des milliers de recalés agglutinés devant le complexe du 8 Mai 1945 à Sétif attendant leur tour pour y déposer un recours dépasse le kilomètre.

Après une très longue attente, les listes des bénéficiaires de 1000 logements publics locatifs de la commune de Sétif sont enfin affichées. L’opération a fait plus de malheureux que d’heureux puisque la chaîne des milliers de recalés agglutinés, devant le complexe du 8 Mai 1945 à Sétif, attendant leur tour pour y déposer un recours, dépasse le kilomètre.

Refoulés des sièges de la wilaya et de la daïra encerclés par un imposant cordon sécuritaire, des centaines de pères de famille, dépités, s’expliquent mal les conclusions de la commission d’attribution de logements sociaux, laquelle a pris tout son temps pour établir des listes ne répondant pas aux attentes de plus de 30 000 candidats à ce type de logements publics. Dépités, plusieurs recalés ne cachant pas leur colère pleurent à chaudes larmes et crient à l’injustice.

Contraints d’attendre indéfiniment sous un soleil de plomb, des Sétifiens restent sans voix. Enfant du Village nègre où il est né le 6 décembre 1948, Arribi Abderahmane, plus connu sous l’appellation de Rahma, n’en revient pas.

Retraité des œuvres universitaires (ex-Cous) de Sétif, expulsé d’un logement de fonction qu’il occupait à la résidence universitaire Hachmi (ex-Samo) depuis des lustres, pointe du doigt les promesses non tenues. «Après plus de 30 ans de bons et loyaux services, je me retrouve SDF.

N’ayant où aller, mon ami et collègue Mokhtar M. (foudroyé par un AVC) et moi, étions contraints d’installer une tente à proximité de la résidence. Alertés, l’ancien wali et le chef de la daïra de l’époque nous ont promis un relogement. L’engagement des anciens responsables tombe à l’eau. Je me retrouve à 73 ans sans toit et otage de la sous-location.

Après de courts séjours à la cité des 1000 Logements, je viens d’atterrir à Tinar (cité AADL) pour 12  000 DA le mois. Mariés et père d’enfants, mes trois garçons partagent mes souffrances. J’ai peur de mourir dans la rue», éclate en sanglots, l’enfant de village Enigro.

Connu de tous, le malheur d’Ahmed Mahdoub (62 ans), un fils de moudjahid et enfant du centre-ville ne s’estompe pas. Les promesses des différentes commissions ne restant pas pour autant de marbre, n’ont pas dépassé le stade des bonnes intentions.

A la quête d’un petit gîte depuis 1995, l’agent de la Direction de la jeunesse et des sports (DJS) est un cas à part. «Je suis étreint par la déprime. Je ne trouve pas les mots pour m’exprimer et faire état de l’étendue de ma cicatrice. Je suis victime d’une injustice et de hogra. Après le premier dossier de 1995, je dépose un deuxième portant le numéro 17 819 à la commune de Sétif le 12 janvier 1997, en vain. Les recours du 10 novembre 1998, du 3 avril 2006, du 20 août 2009, ceux du 11 juillet 2011 et 7 août 2016 n’ont pas abouti. Les différentes commissions n’ont pas jugé utile de prendre en charge mon cas dramatique.

Le vagabond que je suis ne demande qu’un gîte pour se poser et se reposer», martèle avec forte émotion Ahmed, ne gagnant que 23 000 DA par mois. La dramatique situation du doyen des demandeurs d’un logement social attendant depuis plus de 27 ans des clés lui permettant de fonder un petit foyer et de vivre décemment s’estompera-t-elle un jour ? La question est posée aux responsables concernés.

Se cachant dans un réduit  de 29 m², sans la moindre intimité, la famille de Abdelouahab B. est sous le choc. «Pour constater de visu, la commission est venue à trois reprises chez moi, où elle n’est pas restée insensible au désarroi de ma petite famille.

Déposée le 15 juillet 2012 sous le n° 7187, ma demande reste, 12 ans après, sans suite. Composée de quatre personnes avec deux enfants dont un garçon de 31 ans, ma petite famille vit le calvaire. Sans toit, mon petit bonhomme est condamné à rester célibataire», maugrée notre interlocuteur au bord de la déprime.                 

 

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