Santé : Les oubliés de la réforme

09/01/2022 mis à jour: 00:08
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Dans un contexte où le débat public et les interventions officielles tournent globalement autour de la préoccupation alimentaire de base, il est bon de remettre à l’ordre du jour des dossiers aussi névralgiques et vitaux que celui de la santé. En mauvais état depuis de nombreuses années, ce secteur nécessite, aujourd’hui, une véritable admission en réanimation.

Avant d’appréhender tout projet de réforme, il faudra recueillir un consensus qui place l’intérêt du malade au cœur de la problématique de relance ou de modernisation de la santé, telle qu’énoncée par l’administration de tutelle à l’occasion des assises organisées depuis hier à Alger.

La voix des patients, les «usagers des services de soins», est, souvent, éteinte ou à peine audible dans le concert des déclarations s’inscrivant dans une démarche de propositions catégorielles ou à teneur revendicative. La finalité évidente de tout système de santé est de sauver des vies humaines et d’apaiser les souffrances.

Le vœu le mieux partagé est d’en finir avec cette formule accablante et trop récurrente prononcée par des soignants au bout d’une nuit de garde chaotique : «Nous avons perdu un malade…» Le plus souvent en raison du manque d’un produit médical d’urgence ou de l’absence d’un médecin spécialiste à même de diagnostiquer et de traiter une affection aiguë devenant fatale.  Oublié dans les hôpitaux publics, le malade est évacué des débats lors des rencontres qui lui sont pourtant dédiées.

L’on ignore alors par quel moyen il est transporté à la structure de santé et dans quelles conditions il est pris en charge à son admission. Dans les centres d’imagerie médicale, que les pouvoirs publics veulent réorganiser, toutes les inquiétudes et les réserves ont été formulées à l’exception de celles du malade : combien paie-t-il un examen radiologique et à quel taux sera-t-il remboursé, ou pas ?

Même physiquement diminué et son pouvoir d’expression ou de protestation quasiment neutralisé, le malade peut ressentir une vraie détresse et nourrir, avec ses dernières forces, un sentiment d’injustice.

Le désarroi est autrement plus indicible que celui d’un radiologue fraîchement émoulu n’ayant pas les moyens d’acquérir les équipements nécessaires à l’ouverture d’un cabinet privé.

Dans un système de santé bien organisé et bâti sur l’exigence cardinale de prise en charge intégrale des malades, le meilleur réceptacle pour les nouveaux diplômés est l’hôpital public. Le système de santé est réduit à néant dans un pays où le malade ne va plus à l’hôpital, mais à la clinique. Evoqué un moment avec beaucoup de détermination, le projet d’intégration du secteur privé dans le système national de santé, en prenant en compte la couverture des soins prodigués, paraît durablement ajourné.

L’hôpital public est également le grand oublié des débats qui précèdent et concluent les rencontres autour de la réforme hospitalière. Sera-t-il un jour réhabilité, doté de personnels qualifiés pour faire fonctionner des appareils chèrement acquis et laissés à l’abandon ? Autant de questions qui surgissent à propos d’un système de santé où l’on «perd» trop facilement des malades, et où la notion même d’erreur médicale a disparu en raison de l’absence de médecins spécialistes aux urgences et dans les services de soins.


 

 

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