Refondation politique

11/06/2022 mis à jour: 07:06
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C’est au moment où une initiative de dialogue est lancée par les hautes autorités que l’on s’aperçoit de l’étendue du désert politique qui s’est installé dans le pays. 

Quasiment en souffrance, la scène nationale présente une image de vacuité qui rend urgent le chantier de la refondation de la vie politique sur des bases saines, libérées des scories du passé et où les parcours, les projets et les figures devant les incarner seront clairement définis. 
 

Les structures qui hantent actuellement l’échiquier national portent en majorité les séquelles d’une entreprise de déstructuration menée depuis plus de deux décennies et représentent souvent les survivances d’une époque politique qui a durablement plombé le destin du pays. 

Fabriqué au pied levé il y a une dizaine d’années dans les travées du Parlement, le parti de l’ex-ministre des Travaux publics puis des Transports, aujourd’hui en prison, poursuit une activité sans relief et sans succès électoral. Intégralement débouté des législatives de juin 2021, il a été cependant hôte de la Présidence la semaine dernière à l’effet de figurer dans le dispositif de rassemblement en cours. 

Doué d’une faconde remarquée et d’une énergie particulière, le fondateur de cette formation hors normes s’était abîmé dans les affaires et la gabegie du pouvoir déchu. La responsable qui a pris le relais peine à produire un discours audible et une approche programmatique, exerçant presque l’activité politique à son corps défendant. 

L’échec cuisant aux élections ne délivrera pas de l’ornière politique cette ancienne journaliste gorgée d’ambition et de motivation professionnelle. L’autre improbable personnalité ayant été reçue dans le cadre du dialogue a lancé une formation symboliquement tournée vers l’avenir, mais le profil personnel reste lié à une période politique non encore totalement élucidée, marquée par la création fulgurante du RND avant son démembrement programmé. 

Ce dernier a été également reçu à la Présidence, mais son «âme», un ancien Premier ministre qui dirigea l’Exécutif aux heures les plus critiques de l’histoire récente du pays, est en prison et plusieurs fois condamné. Le désormais challenger permanent des islamistes ne peut être éligible à la refondation de la scène politique nationale, car cumulant les tares du système sans s’illustrer par une pédagogie en faveur de la construction d’une citoyenneté émancipée. 

Représentant emblématique de la mouvance démocratique, le plus vieux parti de l’opposition a répondu favorablement à l’invitation des autorités. Cependant, des tensions internes persistantes brouillent le cap devant être fixé par une organisation politique qui, depuis sa création à l’indépendance, a subi des adversités et survécu aux épreuves. 

Sa participation aux dernières élections locales puis le boycott des législatives a matérialisé un réel malaise dans ses rangs et que la direction actuelle tente laborieusement de résorber. 

Symptôme de l’irrésolution ambiante, la réponse positive à l’invitation au dialogue avait été doublée d’une promesse de «rendre compte à l’opinion publique du contenu de l’échange». 

La direction du parti sera doublée par la Présidence qui publiera sans délai la déclaration recueillie à la fin de la rencontre, sans occulter le volet contestataire. 

Appelée à se réinventer et à se restructurer, la classe politique actuelle se contentera d’un rôle formel dans la démarche du pouvoir. Pour lui, en temps normal comme lors des élections, la véritable bataille est celle de l’opinion publique.

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