Quand les mots se moquent des maux

25/08/2024 mis à jour: 16:03
1994

C’est une étrange et longue guerre que celle où la violence essaie d'opprimer la vérité.» Cette sentence de Pascal (Les Provinciales 1657) est plus que jamais d’actualité. Dans la guerre que subit Ghaza depuis plus de dix mois, sous le regard passif et indifférent du monde entier, le bilan macabre est lourd de plus de 40 000 victimes, en majorité des enfants, des bébés et des femmes.

Il s’agit bien d’un génocide et d’un terrorisme abject que Tel-Aviv feint d’ignorer, voire de nier. Mais il y a les mots, il y a le chiffre qui rend les mots vains. Y aurait-il, aux yeux de l’agresseur sioniste et ses alliés de l’Occident, de bons et de mauvais génocides ?

En réalité, ce n’est pas seulement depuis le 7 octobre 2023 que Tsahal n’épargne aucune infrastructure civile, des habitations, aux hôpitaux, aux mosquées, en passant par les écoles. Le blocus brutal et le calvaire qui va avec durent depuis 17 ans. Ne sont-ce pas là des crimes contre l’humanité ?

Pis encore, ces agressions infernales, innommables contre des civils s’apparentent à la pire infamie et la lâcheté la plus indigne. Jugez-en ! Tsahal appelle des milliers de Palestiniens stupéfaits et éperdus de douleur à converger vers les zones «sûres», qu'il a lui-même fixées, que les fuyards considéraient, naïvement, comme enfin une ultime oasis de survie pour voir, sur les lieux, tomber sur leurs têtes un déluge de bombes et périr par centaines. «Les Israéliens veulent raser Ghaza et ses habitants.»

Ces mots ne quantifient-ils pas l'horreur, l'intensité et la portée inhumaine de la douleur, de la séparation, de la souffrance et de la dévastation. C'est là la quintessence du terrorisme et du génocide, aujourd'hui banalisés, même si les instances internationales les ont reconnus en tant que tels. Mais Tel-Aviv a-t-il jamais appliqué une seule résolution de l'ONU, depuis des lustres ?

En plus de terroriser les Palestiniens à l'intérieur, Tel-Aviv joue aussi à l'extérieur en assassinant à Beyrouth, Damas et Téhéran, défiant les souverainetés nationales, et bannissant le droit de riposte, avec des menaces «cataclysmiques» !! Quel est le tort de ces Palestiniens traqués sur leurs propres terres, alors que leur statut, peu enviable de colonisés, est gorgé de malheurs, de peur, de persécutions, de brimades, de maladies, de soif de faim, de mort à tout moment.

Car les sionistes n'ont jamais eu l'intention d'arrêter les massacres, même en Cisjordanie, forts de leur soutien occidental, notamment des Etats-Unis, qui n'ont pas été avares en soutien financier, en injectant, en ces moments critiques, une rallonge en armement de 20 milliards de dollars.

Pourtant les Américains, concernant le génocide, ils en ont déjà tâté par le passé et en connaissent un bon bout ! A ce propos, l'histoire est terrible et implacable à travers l'extermination des populations autochtones d'Amérique, lors de la conquête.

En une trentaine d'années seulement, 80 à 90% de la population des Grandes Antilles ont été décimés. Sur le continent, même la population indienne mexicaine serait passée de 25 millions en 1519 à 1,9 million en 1580, et celle du Pérou de 10 millions en 1530 à 1,5 million en 1590. Il aura fallu moins d'un demi-siècle pour exterminer entre la moitié et les trois quarts d'une population indigène, qui atteignait à la veille de la conquête entre 60 et 80 millions d'habitants.

Mercredi dernier au Caire, le chantage inadmissible de Blinken à la fois juge et partie et néanmoins médiateur (au début des hostilités le 7 octobre dernier, il avait annoncé la couleur, à Tel-Aviv, devant le chef du Likoud, en croyant devoir décliner son origine juive).

Le médiateur qu'il est ne peut imposer son diktat en déclarant en direction des chefs du Hamas : «Le plus court chemin pour un cessez-le- feu, c'est d'accepter les accords (plusieurs fois triturés sans réaction), sinon les Ghazaouis continueront dans leur malheur, en subissant le blocus sur l’eau, la nourriture, les médicaments, dont les vaccins contre la polio, l'électricité...»

La force contre le droit, l'équité et la justice vouées aux gémonies. Il s'avère enfin, lors de ces négociations, qu’on a plus «bataillé» pour le statu quo que pour la paix. Peut-être en vue d’un plan diabolique à venir ? Triste dérobade pour troquer le droit humanitaire contre de mesquins et sordides objectifs politiques, en piétinant une population palestinienne spoliée, exsangue et meurtrie.

Qui n’a même pas eu la compassion de ses frères arabes, surtout ceux de la région, dont une partie a consenti par son silence ou son alignement sioniste et l’autre en jouant à l’autruche. Dans cet esprit, il me revient cette phrase historique de W. Churchill, à propos des Accords de Munich en 1938, lors desquels les Français, Anglais et Italiens donnèrent carte blanche à Hitler, qui assurément semble avoir fait des émules dans ces contrées.

«Ils ont accepté le déshonneur pour avoir la paix. Ils auront le déshonneur et la guerre.» Churchill avait été mis au placard pendant 2 ans, avant d’être appelé comme Premier ministre pour sauver l’Angleterre et sans doute tout l’Occident. 

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