Emouvante sans être pour autant larmoyante, la pièce L’ami de la dernière minute, qui revient sur l’histoire des 7 moines de Tibehirine et de leur mort tragique en 1996, est jouée par 14 comédiens, tous amateurs, mais qui ont donné le meilleur d’eux-mêmes tant et si bien qu’une émotion sans pareille s’est répandue dans le rang du public.
Du beau monde se trouvait, vendredi dernier, à la salle Emir Abdelkader du Centre Pierre Claverie, pour assister à la première représentation à Oran de la pièce L’ami de la dernière minute du metteur en scène Azzedine Lafraoui. Cette pièce revient sur l’histoire des 7 moines trappistes, qui tenaient un monastère à Tiberhrine (wilaya de Médéa) et vivaient fraternellement avec les villageois avant que l’irréparable ne se produisît, dans les années 1990, avec l’arrivée des sanguinaires.
Emouvante sans être pour autant larmoyante, la pièce est jouée par 14 comédiens, tous amateurs, mais qui ont donné le meilleur d’eux-mêmes tant et si bien qu’une émotion sans pareille s’est répandue dans le rang du public. En prenant la parole, avant le début du spectacle, l’évêque d’Oran David Carraro a déclaré avoir recensé un total de 18 nationalités présentes à la salle Emir Abdelkader pour voir ce spectacle. C’est dire combien l’esprit du vivre ensemble était présent ce jour-là.
L’archevêque d’Alger, Mgr Jean-Paul Vesco - qui soit dit en passant, joue également dans cette pièce lors d’une courte scène où il endosse le rôle de l’archevêque d’Alger d’alors, Mgr Henri Teissier - a rappelé que la nuit du 26 mars au 27 mars, 7 des moines de Tibehrine ont été enlevés dans leur monastère, avant que le 21 mai, un communiqué du GIA annonce leur exécution.
Le 30 mai, leurs 7 têtes sont retrouvées dans des sacs en plastique pendus à des arbres un peu avant l’entrée de Médéa. Et de signaler que cette pièce est la première œuvre sur le témoignage des moines de Tibehrine écrite, montée et jouée en Algérie. Vendredi dernier, il s’agissait de la deuxième représentation de cette pièce, la générale a en effet eu lieu le 22 juin dans la basilique de Notre Dame d’Afrique, à Alger.
Tout un symbole étant donné que le 2 juin de l’année 1996, 8 cercueils étaient dans cette même basilique pour la messe funéraire, ceux des 7 moines de Tibehrine ainsi que celui du cardinal Duval, mort le 30 mai, exactement le jour où il a eu les preuves de l’exécution des moines. Riche en dialogues, L’ami de la dernière minute commence par des palabres, ceux des échanges quotidiens, entre les villageois de Tibehrine et les moines, de certains malades qui allaient consulter au monastère l’un des prêtres, carabin à ses heures, puis, lorsque cela s’est tendu avec les groupes terroristes, les discussions entre les moines et le wali de Médéa, dont le souci premier était de les protéger coûte que coûte.
Au-delà de cette rétrospective et de ces tranches de vie s’exhalaient surtout des réflexions sur la vie, la mort, la fraternité, l’humanisme, etc. En bref, comme l’avait si bien dit Jean Paul Vesco : «Cette pièce est la preuve que la vie aura toujours le dernier mot sur la mort.»
Notons enfin que Azzedine Lafraoui a notamment étudié à l’Institut des arts dramatiques, a à son actif d’autres pièces théâtrales, notamment une adaptation en l’an 2000 du Petit Prince d’Antoine de Saint-Exupéry au théâtre universitaire de Batna, ou encore une autre où il est question de dialogues interreligieux. Son credo se veut on ne peut plus limpide : «L’éducation à travers le théâtre».