Avec le Tamadaline, vent de sable en tamacheq, qui se lève en cette période, on ne distingue plus vraiment qui est qui.
Pourtant il y a le village Tin Zaouatine, plutôt une commune posée sur la frontière malienne, et d’ailleurs une daïra depuis le récent redécoupage du territoire, où Touareg Ahaggar et Ifoghas côtoient des tribus arabes, et il y a le quartier des clandestins venus du Mali, Burkina Faso, Guinée, Niger, Nigeria et même du Congo, regroupés par origine dans des habitations construites à la va-vite en terre crue, surnommées «république».
Chacun a la sienne, chacun a ses convictions mais tous ont le même rêve-projet de gagner Tamanrasset puis le nord et l’Europe. Ce que ne comprend pas Kadirov le Tchétchène, venu leur rendre visite pour essayer de les convertir. Après un débat théologique avec l’imam du quartier sur l’endroit où a atterri Adam le premier homme, Kadirov, musulman tchétchène convaincu mais anti-wahhabiste que tout le monde appelle Kader, est retourné auprès de Poutine et a posé sa Kalachnikov sur une grande carte de la région. Etonné par ces traits rectilignes dans le désert en guise de frontières d’Etats, droits comme des soldats, il a regardé au loin, cherchant dans l’horizon une quelconque ligne de partage, puis est retourné vers la carte.
Mais qui a tracé ces frontières ?
Les Français, a répondu Iyad
Comment ils ont tracé ça ?
Avec un couteau.
A côté, le président russe vient de prendre des mains de Brahim, l’officier algérien, un journal, Liberté, daté d’hier et arrivé de Tamanrasset par un camionneur.
J’en ai entendu parler, il paraît qu’il va fermer, mais pourquoi pas, un journal qui ferme est un problème en moins.
Non, c’est son propriétaire qui en a décidé ainsi.
Ah, les oligarques…, je sais ce que c’est… Je les ai laissés gagner de l’argent puis je les ai fait dépouiller par les Européens.
Brahim s’est étonné de la manœuvre :
Mais c’est l’argent de la Russie…
Oui, mais je suis prêt à payer pour m’en débarrasser.
… à suivre