Le rapport 2024, et après des constats récents, vient réviser complètement cette projection en triplant son estimation des coûts de production jusqu’en 2050.
Alors que les spécialistes du secteur tablaient, il y a à peine une année, sur une réduction progressive des prix de l’hydrogène vert, voilà que des signes de hausse viennent altérer ces calculs et prévoir une hausse pour plusieurs décennies encore. C’est en tout cas la conclusion d’une étude effectuée par le cabinet de recherche de Bloomberg, confirmant les craintes de l’Agence internationale de l’énergie (AIE).
Ainsi, l’hydrogène issu de ressources renouvelables, en séparant l’eau de l’hydrogène à l’aide d’électrolyseurs, aura de la peine à concurrencer le prix de l’hydrogène gris issu du gaz naturel, et ce, jusqu’en 2050, selon l’étude de BloombergNef livrée lundi dernier.
BNEF a révisé ainsi ses prévisions consignées dans le rapport 2023, où il était question d’un coût de production de l’hydrogène vert inférieur à celui de l’hydrogène gris à la fin de la décennie, c’est-à-dire en 2030, et que la production d’hydrogène vert dans une nouvelle usine pourrait être jusqu’à 18% moins chère que dans une usine de production d’hydrogène gris.
Le rapport 2024, et après des constats récents, vient réviser complètement cette projection en triplant son estimation des coûts de production jusqu’en 2050. Cette hausse est justifiée par les coûts futurs plus élevés pour les machines électrolyseurs. Ainsi, l’hydrogène vert passera d’une fourchette actuelle de 3,74 à 11,70 dollars par kilogramme à 1,60 jusqu’à 5,09 dollars par kilogramme en 2050.
A l’heure actuelle, la forme la plus courante d’hydrogène utilisée et qui est issue du gaz naturel coûte entre 1,11 et 2,35 dollars le kilogramme. «Les prix de cette forme d’hydrogène, le gris, resteront globalement les mêmes jusqu’au milieu du siècle», précise la même étude. Cette nouvelle met à mal l’orientation vers la décarbonation.
Augmenter les droits de douanes
«Les coûts plus élevés de production d’hydrogène vert sans aucune subvention ni incitation signifient qu’il continuera d’être difficile de décarboner en utilisant l’hydrogène vert, les secteurs où il est difficile de réduire les émissions, tels que les produits chimiques et le raffinage de pétrole», explique Payal Kaur, analyste de BNEF. Ceci et de noter que les industries de raffinage ainsi que les aciéries et les centrales électriques resteront comme de possibles utilisateurs finaux du gaz.
Alors que l’objectif de Biden était de ramener le prix de l’hydrogène vert à 1 dollar par kilogramme, le rapport de BNEF indique que ce sera hors de portée, et que seuls deux marchés, la Chine et l’Inde en l’occurrence, sont susceptibles de voir l’hydrogène vert devenir compétitif en termes de coûts.
Dans ces pays, le carburant le plus propre devrait atteindre un prix comparable à celui de l’hydrogène gris d’ici 2040. Par ailleurs, les menaces du président américain élu, Donald Trump, d’augmenter les droits de douane sur les produits importés pourraient avoir pour impact d’augmenter les prix des électrolyseurs.
BNEF précise en outre que la faible croissance de la demande en hydrogène a contraint les entreprises du monde entier à revoir leurs ambitions à la baisse. Le rapport cite Equinor ASA, Shell PLC et Origin Energy Ltd, qui ont toutes annulé des projets de production d’hydrogène cette année en raison d’un manque d’acheteurs.
Outre BENF, l’AIE a également alerté sur l’incertitude liée aux politiques, à la demande et les coûts ralentissant l’adoption de l’hydrogène vert. «Les principales raisons de la lenteur de l’adoption de l’hydrogène à faible teneur en carbone comprennent des signaux de demande peu clairs, des obstacles financiers, des retards dans les incitations, des incertitudes réglementaires, des problèmes de licences et de permis et des défis opérationnels», indiquait l’AIE dans un rapport. Le directeur général de l’Agence soulignait que l’aboutissement des projets nécessitait une demande et donc des acheteurs.