Plateau de Lœss en Chine… : Un projet écologique a fait revenir des milliers d’oiseaux disparus

26/03/2025 mis à jour: 05:57
753
De nombreux oiseaux sont revenus vivre dans le plateau de Lœss - Photo : D. R.

Longtemps considéré comme l’un des paysages les plus dégradés de Chine, le plateau de Lœss a connu une transformation spectaculaire grâce à un vaste programme de restauration écologique. Parmi les signes les plus marquants de ce renouveau, le retour massif des oiseaux.

Pendant des décennies, le plateau de Lœss, en Chine, était l’un des paysages les plus dégradés au monde. L’érosion massive et la surexploitation agricole avaient détruit la végétation, laissant place à des terres arides où la biodiversité s’effaçait peu à peu.

Pourtant, un projet ambitieux lancé à la fin des années 1990 a permis de renverser la situation. Parmi les signes les plus frappants de cette renaissance écologique, comme le révèle notamment le Guardian : le retour des oiseaux, témoignant d’un équilibre retrouvé.

À la fin du XXe siècle, le plateau de Lœss s’était transformé en un immense désert de poussière. Étendue sur plus de 640 000 km carrés, cette région autrefois fertile avait vu ses sols s’effondrer sous l’effet du surpâturage et de la déforestation. Chaque année, les particules de lœss - ce fin sédiment soufflé par le vent - s’élevaient dans l’atmosphère, obstruant le fleuve Jaune et aggravant la pollution dans les grandes villes chinoises.

Face à cette catastrophe écologique, le gouvernement a mis en place en 1999 le programme «Grain to Green», financé en partie par la Banque mondiale. Son objectif : stopper l’érosion et restaurer les écosystèmes en interdisant la coupe d’arbres, la culture sur les pentes et le pâturage incontrôlé. Pour encourager la transition, des aides financières ont été accordées aux agriculteurs.

Les premiers résultats ont été spectaculaires. Plus de 30 000 km carrés de terres agricoles ont été reconvertis en forêts ou en prairies, entraînant une augmentation de 25 % de la couverture végétale en une décennie, selon une étude publiée dans Nature Climate Change. Cette transformation a non seulement ralenti l’érosion des sols, mais elle a aussi permis à la biodiversité de se réinstaller progressivement.

Parmi les signes les plus visibles du succès du projet, un phénomène marquant a été observé : le grand retour des oiseaux sur le plateau de Lœss. «Quand l’environnement s’est amélioré, tous les oiseaux sont revenus. La forêt a développé son propre système écologique naturellement», raconte Yan Rufeng, agent forestier, sur la chaîne d’information chinoise CGTN.

Une étude publiée en décembre 2024 sur ScienceDirect dévoile des chiffres impressionnants : 2852 individus ont été recensés, représentant 69 espèces différentes. Les forêts primaires abritent la plus grande diversité, avec 51 espèces, dont 14 uniques à cet habitat, suivies des forêts secondaires (49 espèces) et des plantations d’arbres (35 espèces).

Le retour des oiseaux, symbole d’un écosystème régénéré

Ce recensement montre que la reforestation a permis la recolonisation progressive de l’écosystème par de nombreuses espèces nicheuses. L’installation durable des oiseaux dans ces paysages restaurés indique que ces forêts fournissent désormais des ressources alimentaires et des sites de nidification adaptés aux différentes espèces.

En 2023, un projet de réintroduction a renforcé cette dynamique : 40 ibis nippons (Nipponia nippon) élevés en captivité ont été relâchés sur le plateau de Lœss, une espèce ayant frôlé l’extinction à l’état sauvage en Chine et aujourd’hui symbole des efforts de conservation menés dans le pays. Grâce à leur retour, les oiseaux jouent un rôle clé dans la stabilisation de l’écosystème du plateau.

En occupant à nouveau cet espace, ils contribuent à la dispersion des graines, accélérant ainsi la régénération naturelle de la végétation. La diversité des espèces observées suggère également une meilleure régulation des populations d’insectes et de petits mammifères, équilibrant ainsi les dynamiques du milieu.

Cependant, cette renaissance ne s’est pas faite sans difficultés. Dans les premières années du projet, les agriculteurs ont exprimé leurs inquiétudes sur les conséquences économiques. «Et la prochaine génération ? Elle ne peut pas manger des arbres», s’interrogeait un fermier dans le documentaire du biologiste John D. Liu.

De plus, les premières plantations étaient souvent monospécifiques, ce qui limitait la diversité écologique. «Il y avait beaucoup de plantations d’arbres en masse - pas forcément des espèces locales - et souvent sous forme de monoculture», souligne Peter Bridgewater, professeur honoraire au Centre du patrimoine et des études muséales de l’Université nationale australienne. Avec le temps, les méthodes ont évolué.

La diversification des essences végétales a permis d’enrichir les habitats naturels et de renforcer la résilience des écosystèmes. Désormais, au-delà du simple verdissement du plateau, c’est un véritable équilibre écologique qui se remet en place, illustré par le retour progressif des espèces animales disparues de la région - à commencer, donc, par les populations d’oiseaux.

 

Copyright 2025 . All Rights Reserved.