Piero Olliaro. Spécialiste des maladies infectieuses liées à la pauvreté à l’université d’Oxford, Royaume-Uni : «A force de les ignorer, les petites épidémies deviennent plus grandes»

26/08/2024 mis à jour: 01:07
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  • En quoi ce nouveau variant est-il différent de celui de 2022 ?

Le virus de la variole du singe (Mpox virus) se décline en 2 groups (clade I et II) et variants, qui donnent au moins 4 cas de figure : clade Ia et récemment Ib et clade IIa et IIb. Les 4 existent en Afrique et donnent des épidémies récurrentes. Le monde a découvert mpox en 2022 sur la forme clade IIb, l’alerte actuelle est liée aux clades Ia et Ib.

  • Un premier cas a déjà été détecté en Suède. Faut-il s’attendre à une augmentation des cas dans les «prochains jours» en Europe ?

Il s’agit de clade Ib, qui semble être transmis surtout pendant l’acte sexuel – donc, ça dépend du comportement des gens.

  • Qu’en est-il de l’Afrique ? Risque-t-on une forte augmentation des contaminations ?

Voilà la bonne question. Comme j’ai dit plus haut il y a schématiquement 4 cas de figure, avec mode de transmission, groupes à risque et niveaux de gravité différents.

Cette situation dynamique perdure depuis longtemps en Afrique (à l’exception de ce nouveau variant clade Ib) mais la communauté internationale a toujours préféré ignorer le problème, à tel point que nos connaissances sur le virus, la transmission et les moyens de prévenir et traiter cette maladie sont très limités.

Ainsi les investissements en matière de développement de diagnostics, médicaments et autres vaccins ont été limités aux moyens de se protéger contre les menaces biologiques (à savoir la petite variole) de la part des pays riches, surtout les Etats-Unis.

  • Risque-t-on une pandémie de Mpox ?

Non, pas dans le sens de «pandémie».  Le clade IIb est d’ores et déjà établi après 2022 dans plusieurs pays du monde. Je vois mal clade Ia et clade IIa se répandre au-delà de certains pays en Afrique de par leur mode de transmission.

  • Selon vous, quels sont les points à améliorer dans notre réponse à une autre épidémie, qu’il s’agisse du Mpox ou d’une autre zoonose ?

Investissements à long terme en matière de santé publique et de recherche dans les pays où ces épidémies récurrentes sévissent depuis longtemps. Dans l’urgence, on peut endiguer une poussée épidémique mais on ne règle pas le problème à la base. 
Le virus se propage par contact direct (donc aussi pendant l’acte sexuel) ou indirect (par ex. draps de lit souillés).

  • Selon vous, de tels virus sont des bombes à retardement. Pourquoi ?

Parce que à force de les ignorer, un jour ou l’autre les petites épidémies deviennent plus grandes, affectent davantage de personnes et se répandent ultérieurement.

  • Certains affirment qu’il ne faut pas s’alarmer comme ce fut le cas pour le Covid-19. Est ce aussi votre avis ?

Tout à fait d’accord. Je tiens à dire que les populations des pays africains affectées méritent qu’on s’en occupe, et pas seulement maintenant, mais aussi et surtout sur le long terme.

  • Doit-on s’inquiéter de la situation en Afrique ?

Comme je le dis plus haut, le problème Mpox dans certains pays d’Afrique centrale et de l’ouest dure depuis fort longtemps. On voit une flambée à présent, dont la durée et l’ampleur sont difficiles à prévoir. Mais il aurait fallu investir avant. Il faut investir maintenant, et il faudra investir davantage après.

Selon des études, plus de 60% des maladies infectieuses actuelles chez l’humain sont des zoonoses. Doit-on s’attendre à davantage d’épidémies les prochaines années ?

C’est un scénario tout à fait plausible.
 

 

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