Parution. Noussouss masrahia lil atfal wa chabab de Abdelkader Belkeroui : Un monde merveilleux, planche de salut

30/05/2022 mis à jour: 02:53
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Le département théâtre de l’université de Tlemcen a assuré la publication de pièces théâtrales pour enfants et jeune public d’Abdelkader Belkeroui.

L’initiative mérite qu’on s’y arrête. D’abord, parce que dans notre pays, il ne s’en édite pas au point que le répertoire algérien en la matière a en grande partie été perdu avec la disparition de ses auteurs qui détenaient les manuscrits. Ensuite, du fait que l’édition théâtrale n’existe pratiquement plus dans le monde depuis que le texte dramatique n’est plus considéré comme un genre littéraire.

Ainsi, il n’est plus à lire à l’exemple des pièces de Molière ou de Shakespeare, l’écriture moderne ne s’appuyant plus sur le verbe. Le texte est même réduit à un prétexte à mise en scène, avec la représentation pour unique finalité. Sous d’autres latitudes, les pièces relèvent davantage d’une édition spécialisée, celles des revues dédiées au théâtre qui n’intéressent qu’un «lectorat» restreint, principalement celui des hommes et femmes de théâtre.

C’est d’ailleurs précisément pour cela que le tirage commandé à un éditeur est très limité et n’est pas destiné à la vente. A cet égard, complétant l’initiative, Belkeroui a adressé pour sa part l’ouvrage sous format pdf à toutes les compagnies susceptibles d’être intéressées par le recueil de ses textes. Quant au choix par le département théâtre sur ses textes, il s’explique par le fait qu’ils ont fait l’objet de multiples travaux de recherches universitaires dont des mémoires de licence, de master et des thèses de doctorat.

Belkeroui a en outre intéressé parce qu’il est de la deuxième vague de sociétaires de l’atelier de théâtre pour enfants institué au sein du TR Oran, le seul théâtre public qui s’est investi dans la valorisation de ce genre en engageant une réflexion et une pratique dans les années 1970.

En effet, Abdelkader qui se destinait à l’enseignement moyen, bifurque net en quittant le stage pratique de sa dernière année de formation, et rejoint en 1979 le TRO, celui-ci lui offrait l’occasion longtemps rêvée d’exercer le métier de comédien à titre professionnel, un art qu’il pratiquait assidûment depuis une décennie en amateur. Aussitôt engagé, il est distribué dans la reprise des deux mémorables premiers grands spectacles de cet atelier montés respectivement en 1975 et 1976.

Cette reprise intervient avec une nouvelle équipe suite à la relance de l’atelier théâtre à l’arrêt depuis trois années pour des conflits politico-idéologiques au sein du TRO. Elle est assurée sous la direction et la touche créative de Mouffok Djillali, le père du théâtre pour enfants dans notre pays.

Ce sera Ennahla en 1979 puis Lebhira en 1981. C’est d’ailleurs au sein de cet atelier où l’on pratiquait l’écriture collective que le comédien qu’il était s’est initié à l’écriture dramatique : «L’appétit pour l’écriture est venu en travaillant.» Dix ans après, en 1995, il est un auteur à part entière. En 1987, Abdelkader suit un stage de perfectionnement en ex-URSS. En 2002, il a écrit Allal wa Othmane montée par une coopérative. Le spectacle a longtemps tourné.

En 2005, il s’adresse au jeune public et non plus aux enfants avec Kalaat ennour, une pièce plus visuelle que langagière. Il creuse ainsi son nid. Puis, il revient aux tout petits avec Harry, Farry wal alouane sur la base d’une idée de Mouffok Djillali. Les inénarrables Tom et Jerry sont transformés en gouals. Puis, c’est au tour de 100% bio, un spectacle d’animation monté par une coopérative théâtrale. En 2015, il réécrit El arnab wal kounfoud, un autre succès.

Il est désormais établi comme une référence au sein de la corporation et il est ainsi sollicité comme formateur ou pour être d’un jury de festival de théâtre pour jeune public, à titre de membre ou de président. C’est que depuis les années 1990 le théâtre pour enfants a commencé à faire florès en notre pays. Son émergence a constitué une bouée de sauvetage pour les compagnies semi-professionnelles qui se détachaient du statut amateur, l’activité théâtrale était jusqu’alors monopole étatique.

Le théâtre jeune public a constitué pour elles une vitale source de financement, ses juvéniles spectateurs étaient à l’époque les seuls à payer leur place, le théâtre pour adultes, politique populiste encore régnante, était gratuit. Les troupes amateurs le pratiquaient moins pour lui-même que pour financer le théâtre pour adultes qui était leur première raison d’être. A l’époque, la médiocre qualité de la majorité des spectacles révolte Abdelkader.

Il nous a déclaré : «Le théâtre pour enfants, c’est devenu du gagne-argent.» Depuis, les choses ont évolué. Belkeroui aussi. Ainsi, dans son écriture, il prend désormais en compte la traduction scénique de ses textes de sorte qu’ils puissent être montés sans les moyens considérables que peut assurer un théâtre public, tant en matière de distribution que de scénographie.

Il cible de la sorte les espaces non conventionnels, ceux d’une cour d’école ou d’une salle polyvalente, le théâtre pour enfants disposant avec les établissements scolaire d’un fourni circuit de diffusion. Pendant tout ce temps, Belkeroui se tient sagement à l’écriture, pour se concentrer sur ce qu’il sait le mieux faire, ne se laissant pas tenter par la mise en scène. Par contre, il ne délaisse aucunement le plaisir de se produire sur les planches.

Il est distribué dans des spectacles de théâtre pour adultes. Sa consécration en tant que tel se matérialise avec éclat dans Maaroudh lalhoua de Mohamed Bakhti, grand prix du FNTP en 1994 à Batna et à celui du festival arabe du Caire, la même année. Et pour clore une carrière d’artiste bien remplie, il fait ces dernières années des apparitions remarquées dans des feuilletons télévisuels.

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