Nouveaux métiers de la communication dans l’environnement numérique : L’université a du mal à suivre

15/04/2023 mis à jour: 07:00
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Ce sujet épineux, qui continue de marquer l’actualité, a été le thème d’une journée d’étude organisée à l’Université Salah Boubnider de Constantine, intitulé «Les métiers de la communication en Algérie dans un environnement numérique : tendances récentes dans un monde mutant». 

Abordant l’aspect financier de ces nouvelles tendances, Dr. Besma Fennour, enseignante à la faculté des sciences de la communication et spécialisée dans les relations publiques, estime que la circulation de l’argent dans ces activités doit être contrôlée pour le bien de l’économie algérienne. «Il y a des influenceurs exploités par exemple dans le domaine de la communication et ils engrangent des recettes importantes grâce à la publicité. 

Dans ce cas, il faut imposer un registre du commerce pour assurer une circulation légale de l’argent», a-t-elle déclaré à El Watan, en marge de la rencontre. Elle a souligné que cette pratique est considérée comme une activité commerciale et non pas une profession à part entière. 

Concernant toujours ces nouveaux métiers, notre interlocutrice évoque le journalisme citoyen. Ce dernier a fait de la presse un métier accessible à tout le monde, ce qui permet de manipuler l’opinion publique. Selon elle, ces auteurs ont la capacité de captiver une catégorie de jeunes inconscients, provoquant de graves incidents ou des situations dangereuses. «Si on n’accorde pas d’attention à ce genre de personnes et au contenu qu’ils diffusent, l’opinion publique peut être dispersée, ce qui va impacter  l’atmosphère politique, sociale et économique. Des conséquences désastreuses peuvent survenir comme cela est arrivé dans certains pays», avise Dr. Besma Fennour. 

Cette dernière appelle toutes les institutions académiques et ministérielles de l'État à endosser cette responsabilité face aux différentes failles existantes. C’est de l’anarchie ! «Contrairement au journalisme qui est plus professionnel et soumis aux lois et à la déontologie, ces créateurs de contenus ont aujourd’hui un pouvoir réel, vu qu’ils échappent à tout contrôle. 

Ces jeunes influenceurs peuvent être alimentés financièrement et exploités par des réseaux internationaux. Mais, il y a un grand écart entre les responsables et la réalité. On a un jeune qui maîtrise les nouvelles technologies et des responsables complètement déconnectés de ce progrès», a-t-elle argumenté. 
 

L’université n’arrive pas à suivre

Quid de la réglementation ? Dr Yassine Djebablia, enseignant à l’Université de Constantine 3, répond que la loi actuelle n’a pas fait le tour de toutes les nouveautés concernant les produits des freelancers et des créateurs de contenus,  considérés comme de nouveaux métiers en Algérie. 

Pour Dr Bouchra Kermiche, de la même université, il s’agit d’un marché vierge en Algérie. «Ici on n’a pas atteint encore le niveau de certains pays arabes, à l’instar de l’Égypte qui dispose d’un arsenal de lois fermes avec un registre du commerce pour réglementer le secteur, protéger l’influenceur et le citoyen». Lors de la journée d’étude, de nombreux intervenants ont approuvé le fait que l’université n’arrive pas à suivre ces mutations sur le plan conceptuel. «En France, on a déboursé des millions d’euros dans les centres de formation pour intégrer ce nouveau marché et former une génération bien encadrée, surtout que certains métiers sont en train de disparaître. 

La question qui se pose : sommes-nous en train de former certains profils à l’université,  à l’instar de gestionnaire des réseaux sociaux, d’account manager (gestionnaire de compte), d’analyste des données numériques et autres ? Malheureusement l’université et la formation professionnelles ne sont pas en train de former des jeunes dans ce domaine», a regretté Dr Yassine Djebablia, estimant que l’université a mal démarré dans ce sens, surtout que les étudiants font de l’autodidactisme en intégrant le milieu professionnel. 

Ces nouvelles activités sont devenues des supports plus rentables que de simples publicités traditionnelles. De son côté, Mme Fennour indique qu’il est temps pour que l’université actualise son programme pédagogique en s’alliant avec la formation professionnelle. «On n’est pas satisfait, mais on n’a pas le choix, beaucoup de problèmes touchent le secteur de la communication qui est le métier de l’avenir, mais qui reste négligé», a-t-elle regretté. 
 

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