Mouvement social en France : Le front du refus contre la réforme des retraites ne faiblit pas

29/03/2023 mis à jour: 03:41
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Des manifestations nationales en France contre la réforme des retraites et aussi la brutalité policière contre les grévistes - Photo : D. R.

La journée d’hier en France avait valeur de test. Les appels divergents à la pause faisaient leur chemin du côté intersyndical face à un gouvernement intransigeant devant la colère de plus en plus visible dans les manifestations.

L’appel à la pause et la médiation, lancé hier matin par l’intersyndicale, pèsera-t-il dans la balance ? C’est mal parti pour l’instant. Pour les manifestations d’hier le ministère de l’Intérieur a anticipé sa réponse avec un déploiement inédit de 13 000 policiers dans le pays dont 5 000 à Paris…

De quoi faire grincer des dents. Mathilde Panot, présidente du groupe des députés de gauche La France insoumise (LFI) estime qu’Emmanuel Macron en ne suspendant pas sa réforme des retraites «délégitime à la fois la démocratie et ses oppositions et il délégitime aussi la démocratie sociale qui devrait exister dans ce pays».

Rappelant la contestation lundi en Israël, elle ajoute : «Même Benyamin Netanyahu, qui n’est pas connu comme étant le plus grand démocrate, a décidé de faire une pause sur sa réforme (de la justice)».

La médiation : la perche tendue au gouvernement

Depuis le week-end, plusieurs voix avaient souhaité que, devant le chaos qui guette, le pouvoir tempère et revienne sur sa loi de réforme des retraites.

Sans pour autant capituler. C’est là que la perche tendue au gouvernement semblait être une solution adéquate. Hier après-midi les tractations en coulisses et les propos divers n’ont pas manqué à ce sujet.

Et notamment du côté du groupe des députés Modem (membre de la majorité présidentielle) : «Le temps est venu de trouver des points de convergence avec les syndicats et renouer le dialogue», a déclaré leur chef de file aux journalistes à l’Assemblée nationale.

Une nouvelle preuve que la «macronie» craquelle et qu’en haut lieu, on avance les pions dans cette partie d’échecs et mat où nul ne veut s’avouer perdant.

Le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, dans un climat de fronde et d’embrasement potentiel répondant par la négative : «On n’a pas forcément besoin de médiation pour se parler directement». Pour le patron de la CFDT, Laurent Berger, c’est une «insupportable» fin de non-recevoir.

Cela pousse à «s’interroger sur qui veut vraiment le dialogue». Pour Murielle Guilbert, de Solidaires, cette nouvelle «porte dans la figure», atteste de l’«irresponsabilité totale du gouvernement».

La jeunesse est dans la rue

Toutes ces tergiversations alors que la parole de la rue s’annonçait bruyante avec des grèves dans des secteurs stratégiques comme le ramassage des ordures à Paris, les raffineries (avec la pénurie de carburant qui s’étend en région parisienne), les ports, les transports, les écoles, les universités...

Avec des gestes incontrôlés comme des axes routiers coupés ; des opérations «péages autoroutiers gratuits» par des piquets de manifestants… ou encore la permanence d’une députée macroniste murée.

Des milliers de manifestants étaient attendus dans les grandes villes mais aussi dans la plupart des villes moyennes en région, autant de bombes à retardement pouvant dégénérer avec parmi les manifestants, des personnes de plus en plus irritées, fâchées de revendiquer dans la rue depuis le mois de janvier sans que le pouvoir ne les entende.

D’où les actes désespérés de certains et l’emploi d’une force parfois disproportionnée des policiers. La défenseure des droits, Claire Hédon annonçait hier avoir fait l’objet de 65 saisines depuis le début du mouvement : «Par des personnes qui se disent victimes ou témoins de privation de liberté dans les nasses, de violences, d’interpellations suivies de gardes à vue».

D’où son appel à une «désescalade», alors que la jeunesse descend de plus en plus dans les manifs avec sa vivacité coutumière. A ce sujet, Imane Ouelhadj, présidente de l’association étudiante UNEF, a estimé que pour les jeunes, le 49.3 a été «le moment de bascule, la goutte d’eau qui a fait déborder le vase».

Un appel des évêques

Symbole fort à la mi-journée, à Paris la tour Eiffel était fermée, faute de personnels. Plus militant, le blocage à Paris des voies à la gare de Lyon et à Marseille, gare Saint-Charles, avec une pancarte brandie où on lisait «Bon, c’était sympa les manifestations, maintenant c’est la révolution».

A un pouvoir qui, hier encore, au moment où nous écrivions ces lignes, parlait toujours de la légitimité de sa loi et de son maintien de l’ordre, malgré toute la documentation accumulée sur les excès constatés, l’Eglise catholique s’exprimait depuis Lourdes.

Le président de la Conférence des évêques de France remarquant que cette violence est «un symptôme alarmant de l’état du tissu social» : «…les violences commises par certains groupes qui érigent la violence en arme politique, les drames parfois provoqués par les réactions pas toujours assez maîtrisées de ceux qui servent l’ordre public, troublent nos concitoyens».

L’évêque Eric de Moulins-Beaufort appelant lui aussi indirectement à la médiation : «La crise autour de la réforme des retraites met en question fortement les processus de concertation et de décisions collectives prévus par nos institutions ou, à tout le moins, leur mise en œuvre concrète».

 

Perturbation des vols aériens

La Direction générale de l’aviation civile (DGAC) a une nouvelle fois demandé hier aux compagnies aériennes de renoncer à une partie de leurs vols jeudi et vendredi, notamment à Paris-Orly, en raison de la grève de contrôleurs aériens.

Ces mesures préventives, exigées par la DGAC pour les 11e et 12e journées consécutives, concerneront demain 20% des mouvements à Orly, Marseille et Toulouse, et vendredi 25% des vols à Orly ainsi que 20% de ceux de Lyon, Marseille, Toulouse, Bordeaux et Nantes, a précisé l’administration. R. I.

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