Me Brahim Tairi. Président de l’UNOA : «Nous sommes très optimistes après le renvoi des projets à l’APN»

16/09/2023 mis à jour: 15:08
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Photo : D. R.

Dans cet entretien, le président de l’Union nationale des Ordres des avocats (UNOA), Me Brahim Tairi, a expliqué le recours au boycott des activités judiciaires pour dénoncer le contenu des deux projets de loi portant code pénal et code de procédure pénale.

- Vous avez décidé de boycotter durant une semaine toutes les activités judiciaires pour dénoncer les projets de loi portant code pénal et code de procédure pénale. Une telle action ne va-t-elle pas pénaliser le justiciable ?

Une telle action a été décidée dans l’intérêt du justiciable. Les projets de textes que nous dénonçons concernent, en premier lieu, le justiciable avant même l’avocat. Cela ne date pas d’aujourd’hui. Notre première réaction à ces textes a été exprimée en début du mois de juin dernier, lorsque nous avions été invités par des membres de la commission juridique de l’APN, au débat sur ces projets.

Nous étions surpris, parce que le ministre s’était engagé à associer l’organisation dans l’élaboration de ces textes. Comment pourrions-nous prendre part à l’examen en une journée ou deux, de près de 800 articles ? C’est impossible. Nous ne voulions pas être des faire-valoir. Ces deux projets contiennent au moins une centaine d’articles attentatoires aux principes des libertés individuelles et collectives, d’équité en matière de procès, et de présomption d’innocence, dictés et garantis par la Constitution.

Nous avons été exclus du débat. Pourtant, tout portait à croire, y compris dans les engagements publics du ministre [Abderrachid Tabi, ndlr], que notre participation à l’enrichissement de ces deux textes était acquise. Ce qui n’a pas été le cas. Raison pour laquelle nous avons estimé qu’il était de notre devoir de défendre le justiciable qui sera la première victime de ces textes, s’ils venaient à être promulgués. Notre action a pour but de protéger les droits et les libertés et d’asseoir les bases de l’Etat de droit.

- A ce jour, de nombreux boycotts n’ont fait que perturber les activités judiciaires sans pour autant que ses initiateurs n’obtiennent gain de cause. Vous attendez-vous à un retrait de ces deux projets de textes ?

Je suis très optimiste pour les jours à venir. La commission juridique de l’Assemblée nationale a décidé de renvoyer l’examen des deux projets de loi, pour enrichissement. Cela veut dire que ces derniers vont être revus et certainement par l’Union, qui représente  la profession d’avocat.

- Que reprochez-vous à ces textes ?

Nous avions énuméré une partie des articles attentatoires aux droits et aux libertés. D’abord le retrait des jurés de la composante des tribunaux criminels qui existent depuis l’indépendance et qui consacrent le principe d’un tribunal populaire, puisque ses décisions sont prononcées au nom du peuple. Au lieu de revoir le choix des membres du jury, ils ont mis fin à ce qui restait des bases d’un procès équitable en matière criminelle.

La même chose pour la comparution immédiate dont l’institution n’a fait qu’augmenter le nombre des détentions provisoires, et au lieu de recourir à un juge des libertés, on est revenu à l’aveu et donné au procureur le choix, ce qui a abouti à une inégalité des justiciables en matière d’aveu et de comparution immédiate. Ce ne sont là que quelques atteintes aux droits parce que la liste reste longue et nous l’avons bien expliqué dans notre communiqué du 2 septembre dernier.

Depuis, rien n’a été fait, jusqu’à jeudi dernier, puisque nous avons été informés du retrait de ces deux projets de loi, pour enrichissement. Nous n’avons aucun agenda caché à l’exception de celui qui défend le justiciable, le droit à la défense et l’Etat de droit. Notre objectif est de donner une meilleure image à notre justice. Nous espérons y arriver avec la conjugaison de tous les efforts. Rien ne peut se faire sans débats et discussions.

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