Les postes de Premier ministre et de ministres ont cette particularité d’être des sièges éjectables par excellence dans le système de gouvernance algérien. A tort ou à raison, des membres de l’Executif sont débarqués de leurs ministères respectifs sans que l’on sache souvent ce qui leur est reproché. Incompétence ?
Echec dans l’accomplissement de leur mission ? Même lorsque la communication institutionnelle se résout à faire l’effort de motiver l’éviction d’un ministre ou d’un haut fonctionnaire de l’Etat, on n’y voit que du flou, à l’instar du cas de l’ex-conseiller à la présidence de la République chargé des affaires religieuses, limogé il y a quelques jours pour «manquement au droit de réserve». Avant lui, d’autres ministres, notamment ceux de l’Agriculture, des Transports furent sèchement remerciés, suivant le même modus operandi.
Le limogeage de l’ex-ministre des Transports pour «faute grave», selon le communiqué officiel, avait donné libre cours à toutes sortes de spéculations au sein de l’opinion publique. Cette valse de ministres, qui a tendance à devenir une seconde nature, pose assurément, à la base, un sérieux problème de casting des membres de l’équipe gouvernementale et, par extension, des nominations aux postes supérieurs des institutions de l’Etat.
Le choix opéré, sur la base du clientélisme politique, des arbitrages du sérail, au détriment des critères de compétence avérée et de probité morale des candidats, nourrit la médiocratie et l’amateurisme que l’on découvre après coup, causant de sérieux préjudices au développement sectoriel et à la cohésion sociale.
La question liée à la performance de l’action de l’Exécutif a été évoquée par le président Abdelmadjid Tebboune lors de sa rencontre de ce samedi avec des représentants de la presse nationale sous l’angle de la sanction individuelle, de chaque membre du gouvernement, sur la base de son bilan et de l’exécution rigoureuse des décisions du Conseil des ministres.
Cette clarification du chef de l’Etat intervient alors que des rumeurs relayées par certains médias circulent sur un changement imminent à la tête du gouvernement avec le départ du Premier ministre Aïmene Benabderrahmane. Selon toute vraisemblance, cette option ne semble pas à l’ordre du jour, à bien décrypter le message de Tebboune. Le président de la République a, toutefois, annoncé un changement partiel du gouvernement qui touchera les ministres jugés défaillants.
Une manière de signifier que les couacs enregistrés dans certains secteurs d’activités ne sont pas imputables au Premier ministre, encore moins à un manque de pertinence et de réalisme du programme d’action du gouvernement, mais bien à des ministres qui ne mouilleraient pas suffisamment le maillot, comme le voudrait le président Tebboune.
Un avis qui n’est que partiellement partagé par certains observateurs qui pointent, pour leur part, la nature présidentialiste du système politique algérien qui ne laisse pas une grande marge de manœuvre à l’Exécutif et au Premier ministre.
Entre les deux fonctions, présidentielle et gouvernementale, il n’y a pas de place pour d’éventuels arbitrages sur le contenu des politiques publiques à mener et le choix de l’équipe gouvernementale chargée de leur mise en œuvre.
Compte tenu de l’expérience du passé et du risque d’instabilité que fait courir au pays cette propension à recourir de manière récurrente à un remaniement partiel du gouvernement, il y a aujourd’hui, de l’avis des experts, une nécessaire réflexion à entreprendre pour une meilleure articulation des différents pouvoirs.