Les principes et conditions d’une gestion performante des collectivités locales

02/01/2024 mis à jour: 12:22
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Brahim Lakhlef *

Les débats actuels sur la révision du code communal et de wilaya dans le but d’élargir leurs attributions et d’améliorer les performances de la gestion locale nous incitent à prendre en considération les résultats et les principes produits par les démarches appliquées avec succès dans beaucoup de pays.

La gouvernance territoriale est devenue une préoccupation majeure pour les pays, notamment pour les économies développées.

Le but recherché est d’assurer une meilleure concrétisation des objectifs économiques et sociaux et pouvoir également répondre à une demande incessante des populations locales qui veulent un système de gouvernance qui leur permet de participer activement à la définition et à l’application des politiques économiques et sociales qui répondent efficacement à leurs besoins spécifiques et qui protègent leurs ressources et valorisent leur territoire.

Depuis des décennies, l’OCDE a inscrit la gouvernance des territoires comme un facteur de développement, d’équilibre régional et de participation. Pour cerner le contenu de ce type de gouvernance et d’organisation, il est utile de rappeler quelques définitions retenues par des chercheurs dans ce domaine ou par les organisations internationales.

L’Union européenne, l’OCDE et le PNUD, par leurs études, analyses et évaluations, nous offrent des données intéressantes qui nous permettent de cerner le contenu de la notion de «gouvernance territoriale ou locale», ses caractéristiques, ses principes et les conditions qui déterminent ses performances.

Les différentes définitions se complètent, certaines d’entre elles privilégient la participation des citoyens avant tout autre considération, d’autres visent l’efficacité et l’efficience ou le développement dans tous ses aspects.

Mais la caractéristique la plus importante retenue par la quasi-totalité des définitions concerne la combinaison de deux objectifs fondamentaux : la réalisation, aux moindres coûts, des objectifs de développement et la participation effective des citoyens dans la définition de leurs besoins et dans la gestion de leur collectivité.

Des spécialistes octroient à la gouvernance territoriale plusieurs dimensions : une dimension spéciale (le territoire), une dimension politique (favoriser la participation des élus), une dimension stratégique (pour le développement du pays et des régions), une dimension économique et sociale et une dimension environnementale (protection de l’environnement et des ressources naturelles d’un territoire).

La gouvernance au niveau local évolue selon des principes adaptés à la nature de ses objectifs. Ces principes lui donnent une spécificité propre par rapport aux autres systèmes d’organisation.

Certains principes s’inspirent des caractéristiques et exigences de la bonne gouvernance et de la qualité des institutions d’un pays, notamment : la démocratie, la transparence, la participation, l’obligation de rendre compte, la communication, la disponibilité d’une information fiable, l’évaluation…

Mais la gouvernance territoriale, en plus des principes qui définissent une bonne gouvernance, possède ses spécificités propres. L’Union européenne a retenu une approche basée sur douze principes de gouvernance à appliquer au niveau local pour plus d’innovation et de croissance. Ces principes se présentent comme suit :

1. Participation, représentation, élections conformes au droit
2. Réactivité (objectifs, règles, structures et procédures adaptées aux attentes et aux besoins des citoyens).
3. Efficience et efficacité (utiliser les ressources disponibles de façon optimale, concrétiser les objectifs au moindre coût, audit en permanence…).
4. Ouverture et transparence (information disponible, fiable et vérifiable, impartialité dans la passation de marchés…).
5. Etat de droit (respect du droit et des décisions judiciaires, normes et réglementation établies conformément à les lois, appliquées d’une manière impartiale…).
6. Comportement et éthique (l’intérêt général passe avant l’intérêt individuel, lutte contre la corruption et conflits d’intérêts…) 
7. Compétences et capacités ; (placer les compétences à tous les niveaux de la gouvernance, mise en place d’un système qui pousse au perfectionnement et à l’évolution…).
8. Innovation et ouverture d’esprit face au changement (solutions nouvelles et efficaces pour résoudre les problèmes, recherche de méthodes modernes, créer un climat favorable au changement…).
9. Durabilité et orientations à long terme (prendre en compte les besoins des générations futures…).
10. Gestion financière saine (respect des règles et procédures, budgets pluriannuels, gestion et maîtrise des coûts…).
11. Droits de l’homme, diversité culturelle et cohérence sociale (application du droit sans discrimination, diversité culturelle comme une richesse, veiller à la cohérence sociale, aide aux plus démunis…).
12. Obligation de rendre compte (responsabilité, évaluation, sanction…).
Pour concrétiser ses objectifs, ce type de gouvernance s’appuie sur des déterminants de performance, notamment :  
L’existence d’une stratégie de développement
 

La formation et compétences 
L’accompagnement et l’ingénierie territoriale
La modernisation du secteur public
La participation de tous les acteurs concernés par le développement d’un territoire
La disponibilité d’une information fiable mise à la disposition de tous les acteurs publics et privés.

La coordination 
La confection de guides pour l’amélioration de la gouvernance locale

L’évaluation objective

A notre avis, cinq facteurs déterminants dans la réalisation des objectifs de développement local sont sous-estimés ou inexistants dans la gestion de nos collectivités locales : une stratégie de développement à moyen et long termes, l’ingénierie territoriale (assistance en compétences), la formation permanente, la disponibilité d’une information fiable et à la portée de tous les acteurs locaux et un système d’évaluation basé sur des indicateurs mesurables et pertinents pour éviter les évaluations subjectives.

Parmi ces facteurs déterminants, l’ingénierie territoriale et la gestion des projets doivent bénéficier d’un intérêt particulier.

L’ingénierie territoriale apporte aux responsables locaux (administratifs et élus) un ensemble d’outils, de méthodes et de compétences qui favorisent l’apprentissage et conduisent à une bonne maîtrise de la gestion des programmes de développement. Elle améliore les capacités des différents acteurs (entreprises, administration et élus).

C’est pour cette raison qu’au niveau européen l’ingénierie territoriale occupe une place prépondérante.

Elle contribue d’une manière effective au succès des stratégies et politiques de développement arrêtées au niveau de chaque L’ingénierie territoriale constitue un apport décisif dans la réussite de la stratégie de développement des territoires.

Cette démarche, qui consiste à fournir aux collectivités locales des compétences dans tous les domaines du niveau de la définition d’une stratégie, à la conception, au suivi et à l’évaluation des projets répond à un besoin certain d’assistance et d’expertise.

L’ingénierie territoriale se traduit par un apprentissage collectif et la coopération dans le développement territorial (Greffe 2002).En outre, la maîtrise de la gestion des projets constitue, elle aussi, une condition fondamentale qui détermine la réussite de la réalisation des projets en tenant compte des coûts, des délais et de la qualité des travaux.

Des spécialistes en gestion des projets estiment que beaucoup de stratégies de développement local échouent très souvent, non pas parce qu’elles sont incohérentes, mais parce qu’elles ne sont pas soutenues par un accompagnement suffisant et de qualité, souffrent d’un déficit en communication et les différents projets ne sont pas déclinés en plans d’action opérationnels ni bien pilotés.

Les normes ISO 9000/1006 retiennent la définition suivante du management des projets : «Le management d’un projet comprend : la palification, l’organisation le suivi de la progression et de la maîtrise de tous les aspects du projet dans un processus continu, afin d’atteindre les objectifs».Les normes ISO 21500 (2012) relatives aux lignes directrices du management de projet pour gérer un projet sous les trois contraintes : coûts, délais, qualité et atteindre la performance, retiennent cinq étapes : 

1. Le lancement du projet, constitution des équipes, définition des responsabilités et des différentes étapes, définition des objectifs.
2. La préparation de la réalisation du projet
3. La mise en œuvre du projet, application de la feuille de route                                        
4. La maîtrise : assurer le suivi, l’analyse, les corrections des écarts grâce à des indicateurs d’évaluation.
5. La clôture de la réalisation du projet en capitalisant les expériences
Dans le but d’assurer le maximum de chances à la réussite des projets de développement régional, des pays développés mettent à la disposition des acteurs locaux des «guides de réussite des projets de développement régional». 

Le développement du pays passe par la capacité des collectivités locales à réaliser les projets de développement dans le respect des délais, des coûts et des normes de qualité préalablement arrêtés. Rendre la gestion des collectivités locales performante est une option stratégique qui détermine la qualité de développement futur du pays. B. L.

 

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