Les faillites dans la crypto alimentent le débat sur la régulation

17/03/2023 mis à jour: 07:50
AFP
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Le secteur des cryptomonnaies est depuis des mois le théâtre d'une série de déboires et scandales, entre faillites de banques ou plateformes, et les régulateurs cherchent des solutions pour protéger les particuliers de fraudes et arnaques à répétition. Si la faillite de la Silicon Valley Bank (SVB) la semaine dernière a ébranlé la finance mondiale, celles de deux autres plus petites banques, prisées de l'industrie des crypto-actifs, Silvergate et Signature Bank, bousculent un peu plus l'industrie. Et ce, quelques mois après l'effondrement de la plateforme d'échanges FTX, qui était l'un des principaux acteurs du secteur. Ce sont notamment ces plateformes d'échanges sulfureuses que les régulateurs veulent encadrer car elles font "le lien entre le monde à la fois technologique et financier des cryptomonnaies avec une population novice et assez peu informée", explique à l'AFP Ludovic Desmedt, professeur d'économie à l'Université de Bourgogne. En France, 8% de la population avait déjà utilisé des cryptomonnaies en 2022, le double d'avant la pandémie de Covid, selon un sondage pour l'Association pour le développement des actifs numériques (ADAN). Le marché des cryptomonnaies représente plus de 1.000 milliards de dollars, en nette remontée sur les derniers mois même s'il reste loin de son sommet à 3.000 milliards de dollars atteint fin 2021.

Particuliers en danger 

"Les populations intéressées sont à la fois les moins fortunées et les plus fortunées", a précisé Bertrand Peyret, secrétaire général adjoint de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), lors d'une table ronde au Sénat début mars. Ces épargnants "sont arrivés au cours des confinements dans un marché non régulé et ont pris de grands risques sans le savoir, parfois dans des opérations illégales", déclare à l'AFP Martin Walker, qui a organisé en 2022 à Londres une conférence de critiques des cryptomonnaies. Il évoque "des conflits d'intérêts importants, alors que (ces plateformes, ndlr) vendent à leurs clients des actifs sur lesquels elles sont souvent positionnées". S'y ajoute l'extrême instabilité des valeurs, caisse de résonance des marchés, "sur fond d'opacité des comptes, alors que les valeurs des actifs sont le plus souvent déterminées dans des pays offshores". Les transactions illicites effectuées avec des cryptoactifs en 2022 ont plus que doublé sur un an à près de 21 milliards de dollars, malgré un marché qui s'est réduit, selon la plateforme de données Chainalysis. Sans même prendre en compte certaines utilisations illégales, comme le trafic de drogue.

L'UE légifère, Washington sévit

Pour limiter le risque, l'UE s'est accordée sur un projet de réglementation (MiCa), qui exige des plateformes plus de transparence et de rigueur, prévu pour entrer en vigueur l'an prochain.  Il remplacerait notamment les règles actuelles en France et l'autorité des marchés a déjà appelé les acteurs du secteur à anticiper les nouvelles mesures. Aux Etats-Unis, les élus planchent sur un encadrement précis des cryptos, mais la Maison Blanche a demandé en septembre aux régulateurs de sévir contre les actions illégales dans le secteur en se basant sur les règles qui existent pour la finance classique. Résultat: le gendarme des marchés, le SEC, a notamment engagé en janvier des poursuites contre les plateformes Genesis et Gemini, et en février, le régulateur new-yorkais a interdit à la plus grande plateforme du monde, Binance, d'émettre son "stablecoin", une cryptomonnaie dont le cours est censé être adossé au dollar. Au Royaume-Uni, le gouvernement a lancé en début d'année une consultation pour établir un cadre de régulation du secteur, sans l'étouffer, au risque de prendre du retard sur l'UE et les Etats-Unis. Réglementer les cryptomonnaies "ne va pas de soi", souligne Stéphane Reverre, cofondateur du cabinet Sun Zu Lab. Si les risques encourus par les petits porteurs sont lourds, "le monde des cryptos est fondé sur la recherche de décentralisation et de suppression des intermédiaires", à contre-courant de la réglementation, fait-il valoir. Certaines entreprises y sont favorables, comme Coinhouse, fleuron français visant "la transformation d'une partie de notre industrie financière et du monde des paiement", ainsi qu'"une clientèle d'épargnants", a expliqué devant le Sénat son PDG Nicolas Louvet. Mais pour M. Reverre, si les acteurs du secteur "veulent accéder aux petits porteurs, ils doivent accepter une part de réglementation, ou risquer de demeurer en marge" du système financier".

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