Les défis complexes de la Tunisie

06/09/2022 mis à jour: 06:17
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Plusieurs grands défis attendent le président Kaïs Saïed après avoir obtenu le satisfecit populaire lors du référendum du 25 juillet 2022 sur son projet de Constitution. 

Les Tunisiens ont validé les choix politiques de leur Président, notamment le retour au régime présidentiel. Mais, ils font part de plusieurs doléances dans une ambiance caractérisée par une crise générale aiguë secouant le pays. A ce titre, et en dehors des tiraillements et de l’incertitude planant sur la vie politique, depuis le coup de force du 25 juillet 2021, il s’agit surtout de faire face à l’inflation galopante, née de la crise Covid, doublée de la guerre d’Ukraine. Il s’agit également du blocage des moteurs de développement du pays, comme la production et, surtout, la productivité. Il s’agit, aussi, de la réalisation des objectifs de la révolution du 14 janvier 2011, en ce qui concerne la lutte contre le chômage et la pauvreté. La majorité des Tunisiens lambda croit fermement que le président Saïed, «le fils du peuple», réussira là où les islamistes d’Ennahdha ont échoué durant la dernière décennie.
 

Le principal problème traînant encore – que la dizaine de gouvernements d’après 2011 n’a pas su résoudre –, c’est l’incapacité de la Tunisie à redémarrer économiquement après l’euphorie de la révolution. Le taux de croissance moyen du PIB après 2011 est inférieur à 2%, ce qui est synonyme de croissance exponentielle du taux de chômage, notamment celui des diplômés. L’Université tunisienne accordant chaque année plus de 50 000 diplômes, en plus de l’accumulation des non-diplômés sur le marché de l’emploi, alors que la croissance ne permet que la création de moins de 50 000 nouveaux postes. Par ailleurs, plus d’une décennie après la chute de Ben Ali, rares sont ceux qui n’incluent pas l’affaiblissement de l’Etat comme élément incontournable de l’évaluation de la nouvelle République. Lequel affaiblissement s’est traduit par l’absence de l’ordre, d’abord sur les routes avant de gagner la vie publique et, notamment, les divers établissements publics. Aucun sens de reddition des comptes. Des grèves sauvages pour un «oui» ou pour un «non», avec maintien des salaires. L’Etat peine à restaurer son autorité. Le président Saïed est appelé à pousser dans ce sens.
 

La restitution de l’autorité de l’Etat et la reprise économique représentent ainsi des objectifs primordiaux pour le président Saïed, à moyen terme. Toutefois, à court terme, c’est plutôt la lutte contre l’inflation, à 8,6%, et la stabilisation des gros indicateurs économiques et financiers qui inquiètent, malgré le fait que la Tunisie soit parvenue à stabiliser sa facture énergétique grâce au soutien de l’Algérie, qui a reconduit ses prix préférentiels à la STEG. Mais l’équilibre budgétaire reste posé, puisque le pays n’arrive plus à sortir sur les marchés financiers, en raison de sa mauvaise notation par les bureaux internationaux d’audit. Déjà, il est difficilement parvenu à boucler son budget 2021. Le gouvernement tunisien a, par ailleurs, besoin d’un accord avec le Fonds monétaire international pour boucler le budget 2022. 

Le FMI exige surtout de faire preuve d’harmonie sur le front social intérieur afin de pouvoir passer les réformes douloureuses concernant la caisse de compensation et la réforme des entreprises publiques. Le pacte social signé par le syndicat des patrons, UTICA, et celui des travailleurs, UGTT, sous l’aval du gouvernement Bouden, est la preuve de cette harmonie requise. Le FMI a toutefois fait un geste envers la Tunisie, en acceptant de planifier les réformes douloureuses à partir de 2024. Le président Saïed a surtout besoin de faire preuve d’efficacité dans l’amélioration du quotidien des Tunisiens. 

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