Les bourses modestes éprouvées par la cherté de la vie : Une fête de l’Aïd au goût aigre-doux

18/04/2023 mis à jour: 02:45
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Les prix des effets vestimentaires, notamment pour les enfants, sont cette année inaccessibles pour les petites bourses

A quelques encablures de la fête, le rythme des achats s'accélère. Traditionnellement, les familles préparent les gâteaux et se ruent sur les magasins de vêtements pour enfants, qui arboreront leurs plus beaux habits pour la fête. 

Mais la gaieté affichée est loin de masquer la morosité générale. Les chefs de famille nous confient le stress face à la perspective de devoir subir le contrecoup d'une forte hausse des dépenses pour faire plaisir aux proches. Les prix des effets vestimentaires, notamment pour les enfants, sont cette année inaccessibles pour les petites bourses, avec une qualité qui relève du deuxième choix dans les plupart des cas. Les prix jugés trop élevés il y a quelques années paraissent aujourd’hui carrément inabordables pour les bourses modestes. 

«Il est vrai que nous avons pour habitude de nous plaindre chaque année des prix jugés élevés des vêtements de l’Aïd, mais ce n’est rien par rapport aux prix de cette année», affirme, dépité, un cadre dans une entité publique et père de trois enfants. Il nous fait le compte des dépenses : les vêtements de l’Aïd de ses deux enfants de 6 et 9 ans ont coûté près de 8000 DA chacun (chaussures comprises) et il a déboursé pour les habits de son fils de 12 ans près de 12 000 DA. 

«En tout et pour tout, j’ai dépensé 28 000 DA, soit la moitié de mon salaire, rien que pour les vêtements de l’Aïd», confie-t-il, expliquant qu’il a tenté cette année d’acheter malin, évitant de céder aux exigences des enfants. «Cette année, les vêtements proposés par les magasins de franchises internationales n’étaient pas dans nos cordes, nous avons choisi de nous rendre dans les boutiques qui proposent les vêtements au kilo, représentant ainsi un bon rapport qualité-prix», nous dit-il. 

Dans l’un des magasins spécialisés dans la vente de vêtements de marques européennes à des prix déstockés, situé à Draria, il faut jouer des coudes pour mettre la main sur les produits proposés. Les prix oscillent entre 2200 DA le kilo pour les baskets et 3300 DA le kilo pour les vêtements. Une aubaine pour bon nombre de familles qui veulent continuer à acheter des vêtements de qualité sans se ruiner. 

L’autre destination des petites et moyennes bourses est le magasin Le Printemps à El Mohammedia, qui ne désemplit pas durant la dernière semaine du Ramadhan. «Quand on a une famille nombreuse, c’est un bon compromis, on y trouve des t-shirts à partir de 1000 DA, des chemises à 1500 DA et des pantalons ou des robes à partir de 2500 DA. Cela a l’air très correct, mais quand on a quatre enfants, la facture grimpe très vite», affirme, dans un sourire, une dame à la sortie du magasin. Son ticket de caisse affiche la modique somme de 20 000 DA, soit l’équivalent du Smig algérien. 

Les centres commerciaux de la capitale sont également pris d’assaut par les familles qui veulent acheter des vêtements pour leurs petites têtes brunes. Les prix exorbitants affichés par certaines enseignes ne semblent pas dissuader parents et enfants d’acquérir les vêtements à la mode. «Cela reste un sacrifice que l’on consent une fois l’an. Mais ce qui était possible il y a quelques années ne l’est plus aujourd’hui, car les prix sont passés du simple au double. 

Certaines marques ne vendent plus rien en dessous de 4000 DA. Et il est à remarquer que l’offre de ces magasins s’est nettement rétrécie», constate un jeune père de famille, qui se dit cadre dans une société privée. A cela s’ajoute les dépenses pour les gâteaux de l’Aïd dont les prix des ingrédients nécessaires à leur confection ont également pris l’ascenseur. 

Dans les pâtisseries, les gâteaux aux amendes, qui se vendaient autrefois à 80 DA la pièce, se négocient à pas moins de 170 DA la pièce. Une situation intenable pour certaines familles car, en plus des revenus en berne et d’une inflation galopante, le budget a été épuisé par les dépenses durant un Ramadhan particulièrement difficile. 

Bon nombre de personnes que nous avons interrogées se refusent néanmoins à laisser la cherté de la vie leur gâcher la fête, faisant tout ce qui est en leur pouvoir pour assurer des vêtements faisant la joie des bambins et offrir des gâteaux au miel rendant la fête plus douce et les retrouvailles en famille plus chaleureuses. 

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