Le temps du dégel

17/06/2023 mis à jour: 06:00
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De nombreux projets relevant de divers secteurs d’activité ont fait l’objet de «dégel» et l’annonce de leur relance a été relayée à différents niveaux de l’administration et des assemblées élues.

 Ces mesures de déblocage touchant des programmes de développement dans des créneaux souvent stratégiques ou névralgiques ont le mérite de montrer que les décisions antérieures, prises en conséquence de la crise financière vécue par le pays, n’étaient pas définitives et n’entraînaient pas l’annulation de ces projets. Cependant, le rythme des déblocages, rappelant celui des décisions de suspension, soulève quelque appréhension sur la conduite des nouveaux plans de charge ainsi remis à l’ordre du jour. 

C’est dans des wilayas où la quasi-totalité des zones d’activités sont restées dans un état de sous-équipement chronique et de manque de viabilisation que des nouvelles zones industrielles sont annoncées, après avoir été mises sous le coude pendant des années au niveau des instances de décision. Etant entendu que l’annonce d’un projet n’équivaut pas à sa réalisation, il y a motif à s’interroger sur la rigueur d’une démarche qui manque pour le moins de pragmatisme. 

La phase du bilan et de l’audit a été allègrement occultée alors qu’elle aurait servi à comprendre le marasme qui persiste et à en évacuer les causes pour permettre une réelle amorce d’une dynamique économique. Le doute est encore plus prononcé quand ce sont des élus aux assemblées locales, réputés être très proches des réalités et au fait des priorités, qui s’investissent dans ces nouvelles perspectives alors que l’état des lieux est loin d’être établi et assaini. Il y a sans doute fort à faire avant d’esquisser de nouvelles promesses, des tâches souvent oubliées comme l’extension des voies de communication, en premier lieu les routes, et des réseaux d’énergie. 

Le secteur de la santé connaît également son lot de projets débloqués et les annonces y afférentes ne sont pas sans impact sur une population qui rencontre régulièrement des difficultés en matière de prise en charge sanitaire. Mais il n’est pas sûr que le dispositif du dégel des grands projets d’infrastructures comme les CHU, notamment dans des régions qui en sont déjà dotées, soit la solution prioritaire et exclusive au retard enregistré dans la mise à niveau de ce secteur vital. 

Si le déficit infrastructurel est indéniable, les défaillances dans le fonctionnement des centres hospitaliers existants sont également notoires. Un wali qui s’est rendu, il y a quelques semaines, dans un hôpital public, s’est retrouvé devant un service de radiologie fermé à clé, avant d’apprendre que le scanner était déclaré en panne. Cette situation peut être dupliquée des dizaines de fois à travers les secteurs sanitaires dans le pays. Les coups de colère épisodiques des autorités locales n’y peuvent rien, le mal a, d’une certaine manière, métastasé dans de nombreux services de santé. 

Le suivi des dialysés se fait en grande partie dans des cliniques privées où, à l’opposé des structures publiques, les appareils de radiologie sont opérationnels et en constant renouvellement. L’équation du système de santé est à plusieurs inconnues et le problème n’est toujours pas posé en termes clairs. Les équipements sont acquis au prix fort et les médecins sont formés en nombre, mais l’état des services de soins reste stationnaire. 

La solution n’est, bien entendu, pas de lancer en réalisation de nouvelles infrastructures en reproduisant les mêmes lacunes et dysfonctionnements.

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