Larbaâ Nath Irathen (Tizi Ouzou) : Le sociologue Brahim Salhi «ressuscité»

16/09/2024 mis à jour: 03:21
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Des enseignants de l’université de Tizi Ouzou ont revisité le parcours et l’œuvre du Pr Brahim Salhi - Photo : D. R.

Un vibrant hommage, rehaussé par la présence, entre autres, d’enseignants universitaires, du secrétaire général 
du HCA et d’élus locaux, a été organisé vendredi à la mémoire du Pr Salhi.

Le sociologue Brahim Salhi a eu droit, vendredi, à un vibrant hommage à Ighil Tazert, dans la commune de Larbaâ Nath Irathen, à Tizi Ouzou.Les membres de l’association culturelle du  village ont concocté un programme d’activités aussi riche que varie pour honorer la mémoire de ce chercheur  ravi aux siens le 25 août 2016, à l’âge de 64 ans.

«Salhi a laissé une œuvre inachevé», nous confie Hakim Amrouche, un des jeunes enseignants qui ont travaillé avec le défunt quand il était doyen de la faculté des sciences humaines et sociales de l’université Mouloud Mammeri de Tizi Ouzou. «Il  s’en est allé au moment où il a encore beaucoup à donner pour l’université et la société en général. Il avait des projets.

Aujourd’hui, il mérite tous les hommages, car son parcours est celui d’un grand bâtisseur», ajoute-t-il. Même sentiment chez Ouiddir Belhimer, qui a travaillé sous la direction du défunt, notamment durant la période de sa thèse de doctorat.

Lui aussi connaît parfaitement le Pr Salhi, tout comme Mohand Akli Haddibi, Mohand Ouamar Oussalem, enseignant à la faculté d’économie de Tizi Ouzou, mais très connu aussi pour son travail pour tamazight. «Brahim était un ami, un collègue et un frère dans le militantisme. Je l’ai connu à Paris, durant les années 1975-1976, avec Ramdane Achab. Puis, je l’ai retrouvé, comme collègue, à l’université de Tizi Ouzou. Nous avons réalisé ensemble plusieurs projets, comme celui sur l’artisanat traditionnel et celui sur l’économie de montagne», témoigne-t-il. 
Éditer les travaux du Pr Salhi

De son côté, l’enseignant d’histoire, Tahar Ouhached, a plaidé pour l’édition des travaux de Brahim Salhi pour leur éviter de sombrer dans l’oubli. «C’est un grand spécialiste de la sociologie religieuse», a-t-il souligné. L’universitaire Karim Salhi a, notamment, parlé du défunt comme quelqu’un qui dispose d’une rigueur inflexible. «Je l’ai connu quand j’étais étudiant en magistère. Il nous assurait les modules de sociologie et d’anthropologie.

Le Pr Salhi a occupé plusieurs postes importants. Il a été vice-recteur, chef de département de langue et culture amazighes et doyen de la faculté des sciences humaines et sociales avant d’être nommé directeur du Centre d’étude et de recherche en éducation.

Il avait le sens de la rigueur et de l’humour aussi», raconte-t-il. «C’est un faiseur d’élite», ajoute, pour sa part, Omar Belkhir avant que Farid Boutaba n’évoque la période de création de la faculté des sciences humaines et sociales de Tizi Ouzou  où le défunt était le premier à avoir occupé le poste de doyen de cet établissement.

«Un homme que je respectais beaucoup», a-t-il déclaré pour résumer sa relation de travail avec le regretté. Nous avons rencontré aussi la veuve et d’autres membres de la famille du chercheur disparu  qui ont  exprimé leurs remerciements aux  initiateurs de cet hommage.

«Il était quelqu’un qui comprend, qui aime écouter, il était aussi humble, modeste, très apprécié dans son milieu de travail et dans le village.  Il a fait ses études  à Alger, puis en France. Il est revenu en 1979, à l’ouverture de l’université de Tizi Ouzou. Après, il n’a jamais quitté  l’enseignement et la recherche et il n’a jamais arrêté de travailler.

C’est un  bosseur qui a laissé plusieurs ouvrages. Il a aidé beaucoup d’étudiants. D’ailleurs, après son décès, c’est sa femme qui a repris les doctorants qu’il encadrait dans le cadre de leurs thèses», témoignent, avec beaucoup d’émotion, ses deux sœurs, Houria et Saliha.

Un faiseur d’élite

A la même occasion, une exposition de livres de Brahim Salhi a été mise en place à l’intérieur de l’école primaire  du village où se sont déroulées les activités de cet hommage. Les visiteurs ont ainsi découvert les ouvrages du défunt qui a écrit, entre autres, des livres sous les thèmes «Algérie : citoyenneté et identité» et «La Tariqa Rahmania.

De l’avènement à l’insurrection de 1871». Par ailleurs, notons qu’un recueillement sur la tombe du sociologue disparu a eu lieu également durant la même journée au cimetière  d’Ighil Tazert où repose en paix  Brahim Salhi.  «Notre village a  donné un intellectuel d’envergure internationale qui a travaillé dans les domaines de la sociologie, de l’anthropologie, de l’éducation et des sciences politiques.

Il a consacré sa vie à la recherche et au développement des sciences dans notre pays.  Aujourd’hui, il mérite tous les hommages, d’autant plus que ses travaux sont d’une importance particulière pour la société», souligne Toufik Hachemi, président de l’association culturelle Ighilt Tazart, qui tient, à l’occasion, à remercier tous ceux qui ont contribué à la réussite de cet événement qui, précise-t-il, s’est déroulé de manière grandiose grâce, a-t-il ajouté, à la collaboration de l’APC de Larbaâ Nath Irathen, l’APW, la direction de la culture, le théâtre régional Kateb Yacine de Tizi Ouzou ainsi que le HCA (Haut-Commissariat à l’amazighité).

Le secrétaire général du HCA, Si Hachemi Assad, qui a pris part à cet hommage, dira, dans son intervention, que «cette initiative consiste en un point de départ pour réfléchir  à un grand hommage au Pr Salhi à travers un colloque  pour décortiquer le parcours et l’œuvre de cet homme du savoir qui a travaillé dans plusieurs universités algériennes. Il a été parmi les personnes qui ont ouvert le département de langue et culture amazighes de Tizi Ouzou.

Aujourd’hui, il y a plusieurs universités, et même l’ENES d’Alger, qui  forment des enseignants de tamazight», rappelle-t-il. Notons que le HCA a réédité  l’ouvrage du Pr Salhi La Tariqa Rahmania. De l’avènement à l’insurrection de 1871, dont un lot d’exemplaires de ce livre a été remis à l’association du village Ighil Tazert.

Un concours à la mémoire du sociologue

Cette année, l’activité centrale de cet hommage, est le concours du savoir dédié à la mémoire de Brahim Salhi. Quarante-six élèves des différents paliers ont pris part à cette compétition encadrée par Lyes Belaïdi, un jeune enseignant de tamazight.  Ainsi,  dans le cycle primaire, Maria Hachemi a décroché le premier prix, Lidia et Ania Rabhi se sont  distinguées parmi les collégiens  qui ont participé à ce concours.

Dans le cycle secondaire (lycée), la première place est revenue à Hachemi Lyna. «Ce concours est un moyen pour inciter les enfants de notre village à exceller dans leurs études. C’est une sorte de motivation afin de les encourager à travailler davantage à l’école. Nous l’avons baptisé Brahim Salhi pour que ces élèves prenne le parcours de cet intellectuel comme exemple»,  précisent les organisateurs de ce vibrant hommage. H. Az. 

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