La vie politique algérienne est carrément à l’arrêt. La rentrée politique, coïncidant habituellement avec le début du mois de septembre et la fin des vacances d’été, est morose. Hormis l’ouverture de la session parlementaire 2022-2023 et des sorties ministérielles, les activités politiques sont quasi inexistantes.
Les partis, toutes tendances confondues, donnent l’impression d’avoir prolongé leurs congés en s’inspirant… de la rentrée scolaire renvoyée à la fin du mois en cours. Pourtant, il y a beaucoup à dire sur la situation sociale, politique, économique et culturelle du pays.
Fait inédit, les formations politiques algériennes, du moins celles disposant d’un certain encrage et d’une vie organique notable, ont abandonné y compris les habituelles universités d’été qui leur donnaient l’occasion de s’exprimer sur des questions d’intérêt national et de former également leurs militants respectifs. En effet, depuis le début de l’été, les activités des partis ont été carrément suspendues.
Dans le camp de l’opposition, le RCD et le FFS sont les seuls à avoir organisé, à l’occasion du 20 Août, une activité de célébration du Congrès de la Soummam de 1956, avec une mobilisation de leurs militants sur le site ayant abrité l’événement à Ifri Ouzellaguen, dans la wilaya de Béjaïa.
D’autres acteurs politiques, à l’image du coordinateur du MDS, Fethi Ghares, et du porte-parole de l’UDS, Karim Tabbou, ont été, quant à eux, empêchés d’arriver à Ifri après leur interpellation par les services de sécurité qui les ont retenus dans les commissariats de police jusqu’à la fin de la journée. Le Parti des travailleurs (PT) a, certes, rendus publics des communiqués sur, notamment, les derniers feux de forêt à l’est du pays, mais n’a pas organisé d’activités politiques publiques.
Hibernation
Même scénario pour les partis islamistes, à l’image du MSP, qui se sont également éclipsés de la scène, tout comme les anciens partis au pouvoir, dont le RND et le FLN. Ce dernier semble préoccupé par la préparation de son 11e congrès, retardé de plusieurs années. D’autres formations, quant à elles, sont réduites à de simples mouvements de soutien aux politiques du pouvoir en place.
Pourquoi cette hibernation ? Les partis observent-ils une pause après la tempête du hirak de 2019, pour tenter de rebondir sur de bonnes bases ? Sont-ils fragilisés par le verrouillage des espaces de réunion et d’expression ? Pour de nombreux observateurs de la scène nationale, l’Algérie traverse une situation politique «d’exception».
Le mouvement populaire du 22 février 2019 a changé la donne et les partis se sont rendus compte de la nécessite de faire leurs auto-critiques et de changer leurs méthodes d’exercer la politique. Les fameuses formations qui croyaient détenir la majorité sont descendues brusquement de leur tour d’ivoire pour réaliser que leur prétendue suprématie était tout simplement factice.
Mais pas seulement. L’attitude du pouvoir en place, qui impose un contrôle hermétique sur la scène politique et médiatique, ainsi que sa tendance à actionner prestement l’administration, les services de sécurité et la justice contre les acteurs récalcitrants, a fortement impacté les partis qui sont complètement bridés.
Le conditionnement des activités partisanes par l’obtention préalable d’autorisation administrative, alors que la Constitution amendée en 2020 a instauré le régime déclaratif, freine gravement l’action des partis. Pis encore, certaines formations d’obédience démocratique sont empêchées même d’utiliser leurs propres sièges pour l’organisation d’activités.
C’est le cas du RCD, qui avait reçu des mises en demeure du ministère de l’Intérieur pour avoir abrité des réunions du PAD et du MDS qui risque d’être suspendu pour les mêmes motifs. Il faut noter aussi que pour la première fois depuis l’avènement du pluralisme politique, des partis (PST) et des associations (RAJ) sont suspendus ou dissous pour des motifs très peu convaincants. Cette chape de plomb ne fait que fragiliser davantage la classe politique.