La comédie L’avenir sera radieux projeté à Annaba : Quand Nanni Moretti se révolte contre l’insignifiance et... Netflix

27/04/2024 mis à jour: 08:45
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Vers un avenir radieux

Le dernier film du réalisateur italien Nanni Moretti, Vers un avenir radieux a été projeté lors de la cérémonie d’ouverture du 4e Festival d’Annaba du film méditerranéen, dans la soirée du mercredi 24 avril.

Nanni Moretti, 70 ans, a repris son prénom pour interpréter le personnage de Giovanni, metteur en scène en colère, dans la comédie Vers un avenir radieux (Il sol dell’avvenire) pour critiquer l’état déplorable, à ses yeux, du cinéma contemporain. Un cinéma débordant de sujets superficiels et violents et conditionné par les orientations des producteurs-diffuseurs des plateformes numériques comme Netflix. Giovanni doit réaliser un nouveau film sur un cirque hongrois qui visite l’Italie en 1956 quelques jours avant l’entrée des troupes soviétiques à Budapest en novembre de la même année pour écraser une insurrection. Ennio (Silvio Orlando), rédacteur en chef du journal l’Unita, organe officiel du PCI (Parti communiste italien), doit-il prendre position contre Moscou ou continuer à croire à l’idéal progressiste ? Dilemme. Lors d’une discussion avec l’équipe du film, un collaborateur de Giovanni s’interroge si des communistes avaient bien existé en Italie par le passé. «Les communistes ne vivaient qu’en Russie», dit-il. Giovanni lui rappelle qu’à un moment donné, le PCI compte près de deux millions d’adhérents. Le producteur français du film, au bord de la faillite, s’engage avec Giovanni même s’il paraît parfois peu convaincu par l’histoire.
 

Des idées dépassées ?

Paola (Margherita Buy), épouse de Giovanni,  produit un film d’un réalisateur plus jeune adepte des actions violentes. Le film est coproduit par les coréens. Giovanni a beau protester en assistant au tournage. Il dénonce des scènes qui heurtent le cinéma. La productrice et le réalisateur tiennent à leurs choix artistiques considérés comme vendeurs. Giovanni peine aussi à travailler avec une équipe technique qui multiplie les erreurs. Il trouve de la difficulté à rassembler sa fille et son épouse pour voir ensemble dans le salon un film à l’ancienne à la télévision en dégustant des crèmes glacées. Les deux femmes s’ennuient vite et reprennent leurs smartphones. L’épouse de Giovanni veut le quitter. «On parle de politique, de cinéma, du travail, de tout sauf de nous deux», se confie-t-elle à un psychologue. Sa fille, qui fait de la musique, s’éloigne de la maison parentale pour aller vers avec son ami. Giovanni commence à constater que ses idées sur la vie et sur le cinéma sont dépassées, voire figées. 

Doit-il s’adapter à la situation ?  Il accepte à contrecœur de discuter avec des producteurs de Netflix qui lui proposent de multiplier les rebondissements dans son scénario dès les premières minutes. La discussion échoue. Giovanni refuse de céder sur ses choix et sa vision sur le cinéma. Nanni Moretti avait confié qu’il a été blessé de voir un monstre du cinéma comme Martin Scorsese accepter, en 2021, de réaliser la plateforme américaine le long métrage The Irishman (l’irlandais) sur le crime organisé des années 1940-1950 aux Etats-Unis.


«Les plateformes, c’est pour les séries»

«Les plateformes, c’est pour les séries. Les films doivent se faire pour le cinéma. Tant qu’il y aura des cinémas ouverts, je ferai des films pour le cinéma. Quand j’écris un film, je ne peux pas imaginer que je l’écris pour un gamin de 14 ans en train de le regarder sur son téléphone portable», a confié Nanni Moretti, lors d’une interview. 

Le réalisateur de La messe est finie continue donc de croire à la magie du cinéma, au cinéma authentique, le cinéma d’auteur, avec des scènes et des images gorgées d’émotions et d’invitation à la réflexion. Le grand écran est, selon lui, incontournable. Dans L’avenir sera radieux, il rend hommage au PCI qui fut le seul parti communiste au monde à dénoncer la répression par les soviétiques de la révolte des hongrois 1956.

 Nanni Moretti a fait appel à trois autres scénaristes Francesca Marciano, Valia Santella et Federica Pontremoli pour écrire un film touchant, joyeux et triste à la fois, portant une importante part autobiographique. 

Nanni Moretti croit que le cinéma peut sauver le monde, d’où son retour au passé dans une comédie piquante et sucrée à la fois pour dire, peut être, que rien n’est encore perdu. Les utopies ne sont pas mortes, autant que les rêves.

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