Dans cet entretien, Kahina Hadjara, porte-parole de l’Association des enfants de la lune, revient sur la dernière opération de solidarité qui a permis la collecte d’un lot de médicaments. Elle évoque également le plaidoyer qui sera adressé aux ministères de l’Education et de la Santé.
- A cette période de l’année, plusieurs enfants abandonnent les bancs de l'école à cause du manque de moyens de protection. Comment se déroule leur scolarité ?
Les enfants de la lune ne peuvent et ne doivent pas s’exposer à la lumière et au soleil. Malgré le manque de moyens de protection au niveau des classes, des classes et des familles, ils vont tout de même à l’école.
Cependant, la quasi-totalité d’entre eux ne suit pas le troisième trimestre, connu pour sa chaleur et son soleil dangereux pour leur peau et leur vie. Et nous avons une partie qui n’est plus scolarisée. C'est le choix fait par les parents pour les protéger d'un potentiel cancer.
- En-dehors de l'école, quel état des lieux faites-vous aujourd'hui de la situation de ces enfants ?
Les enfants de la lune, ce sont des enfants mais aussi des adultes atteints d’une maladie rare, qui s’appelle xéroderma pigmentosum. C’est une maladie malheureusement incurable et ces personnes souffrent d’une sensibilité aux rayons ultraviolets (UV) . C’est pour cela qu’ils ne peuvent pas s’exposer à la lumière et au soleil au risque d'un cancer de la peau.
Malheureusement, les produits entrant dans le protocole de soins préventifs pour protéger la peau de ces malades sont classés comme produits cosmétiques, donc non remboursables par la CNAS. Les crèmes solaires, les aqualarms ou la vitamine D relèvent d’un traitement obligatoire et quotidien, selon les cas. Mais les prix ne cessent d’augmenter et deviennent une charge intenable pour les familles comptant un enfant de la lune ou plusieurs sous le même toit.
Pour ce qui est de l’état des lieux de leur situation, la triste réalité est que nous enregistrons une moyenne de vie qui ne dépasse pas les 22 ans. C’est une situation dramatique sachant que dans d’autres pays, la moyenne de vie est nettement plus élevée. Le manque de prise en charge et de sensibilisation de parents pour protéger leurs enfants fait que cette catégorie d’enfants ne vit pas longtemps et nous enregistrons des décès continuellement.
- Combien sont-ils aujourd’hui ?
A notre niveau, nous disposons d’une liste de 200 enfants et adultes. Mais nous pensons que le nombre des personnes malades dépasse le double sur le territoire national. Il n’existe pas de statistiques officielles en la matière.
- Qu’en est-il des appels lancés par votre association en direction des différents ministères ?
Nous avons lancé plusieurs appels aux pouvoirs publics pour les prendre en charge, surtout que les soins ne sont pas remboursés par la Sécurité sociale et représentent un fardeau pour les familles dont la plupart ne dispose que d'un revenu modeste. L’idéal serait de doter ces patients de tenues protectrices leur permettant de vivre plus longtemps.
Néanmoins, ces tenues sont indisponibles sur le marché local et coûtent extrêmement chères. A défaut, permettre un accès gratuit aux différents produits entrant dans le protocole de protection demeure une de nos revendications essentielles.
Lors d'un des Conseils des ministres, le président de la République a instruit le ministère de la Santé de prendre en charge les personnes atteintes de maladies rares. Nous sommes en train de préparer un dossier pour le déposer au niveau du ministère de la Santé et éventuellement du ministère de l’Education ainsi que celui de la Solidarité.
- Plusieurs opérations de solidarité ont eu lieu, à l’exemple des collectes des bouchons en plastique dont les revenus sont dédiés à l’achat de médicaments…
Les bouchons en plastique ne sont qu'une petite goutte dans un océan de solutions. C'est une action écologique et humanitaire qui n'est absolument pas suffisante pour subvenir aux besoins des malades. C'était plus une manière de sensibiliser et faire connaître la maladie qu'autre chose.
On vient d’ailleurs d’acheter un lot important de médicaments, comme les pommades et les crèmes, grâce à la vente de ces bouchons. Les autres associations peuvent nous aider à faire de cette simple collecte de bouchons une action qui perdurera, ou organiser des actions ou un événements au profit des enfants de la lune pour faire connaître un plus leur maladie et leur souffrance.
Après, il est vrai que des dons de crèmes solaires et autres sont les bienvenus. Des partenariats avec des associations dans le domaine de la santé pour pouvoir prendre en charge les enfants seraient aussi les bienvenus. Mais le travail de fond doit être fait par les différents ministères.