- Plusieurs pays, principalement en Europe, ont recensé des cas de variole du singe ou «monkeypox». Que sait-on aujourd’hui de cette maladie ?
La variole du singe comme la variole humaine sont des maladies virales induites par des virus de la famille des poxvirus. C’est une très large famille de virus à ADN et dont la particule virale est enveloppée. Les poxvirus existent depuis très longtemps, chez l’homme, les singes, les bovins, les chevaux, les moutons, les chèvres, les oiseaux, etc. La plupart des poxvirus ne causent pas de maladies graves et/ou létales chez leurs hôtes et ne causent pas des zoonoses chez l’homme. Par contre, le poxvirus des singes est capable d’infecter l’homme et d’induire des maladies chez les personnes infectées. Ce virus était jusqu’à présent endémique dans certains pays de l’Afrique centrale et de l’Ouest. Et plus récemment, il a été importé dans plusieurs pays d’Europe, aux Etats-Unis et en Afrique du Nord. Le réservoir naturel du virus n’est pas encore totalement identifié, mais il s’agirait de rongeurs. Dans les régions africaines endémiques, la mortalité est en moyenne de 5% et qui serait due à des complications de surinfection.
- A quel point la variole est-elle contagieuse et comment se transmet-elle à l’homme ?
La contagion s’effectue par contact prolongé entre un individu infecté et une personne non infectée. Il n’y a pas de transmission par les voies respiratoire à travers des gouttelettes comme dans le cas de la Covid-19. Les précautions à prendre sont d’éviter les contacts avec la personne infectée, d’isoler la personne infectée, de procéder aux mesures d’hygiène classiques (port de gants et protection pour le personnel soignant, décontamination avec de l’eau et du savon, ne pas manipuler le linge des patients à mains nues, bien décontaminer le linge à haute température, etc.).
A ce jour, on ne connaît pas les raisons de la rapidité de dissémination de la maladie en dehors des pays endémiques ; s’agit-il d’un variant différent de celui qui circule depuis près de 50 ans en Afrique centrale et de l’Ouest ? Est-ce que le virus a acquis des capacités plus élevées de transmission d’homme à homme ?
La transmission d’homme à homme est-elle favorisée par d’autres facteurs ? Ce sont des questions auxquelles les laboratoires de recherches tentent de répondre rapidement afin d’optimiser les mesures sanitaires.
- Quels sont les symptômes de cette zoonose ?
A partir du début de la contagion, les signes cliniques s’étalent sur une période d’un peu plus de deux semaines. Dans la première phase d’environ deux jours, il y a une forte fièvre accompagnée de maux de tête, de courbatures et douleurs musculaires.
Il s’ensuit la phase de l’éruption cutanée qui se caractérise par l’apparition spontanée sur la surface du corps des boutons remplis de liquide blanc contenant le virus. Les membres supérieurs et inférieurs ainsi que la surface de la figure sont les plus touchés. Les parties génitales peuvent être aussi fortement touchées. Cette phase peut être aussi accompagnée d’adénopathie (gonflement des ganglions,..). Dans le cas où il n’y a pas de complication par surinfection, l’infection se résorbe au bout de 2-3 semaines.
- La vaccination est-elle nécessaire ?
Actuellement, il n’y a pas de traitement pour stopper la maladie. Les personnes de 50 ans et plus ont été vaccinées contre la variole humaine et sont donc protégées au moins à 80% contre la variole du singe. Le vaccin contre la variole existe et le personnel de santé qui serait amené à être en contact avec les patients varioleux peuvent se faire vacciner. Il n’est absolument pas nécessaire à l’heure actuelle de vacciner massivement les populations, ni de les confiner, ni de fermer les frontières ou les écoles.
Propos recueillis par Nadir Iddir
Bio express
Virologue, Yahia Chebloune est directeur de recherches et directeur du Laboratoire pathogénèse et vaccination lentivirales (Paval Lab) USC Inrae/UGA à Grenoble (France). Il est fondateur et conseiller scientifique de la Biotech Aiova qui développe les vaccins du futur. Il est expert évaluateur de projets européens, nord-américains et de plusieurs autres pays. Expert évaluateur dans de nombreux journaux scientifiques à comité de lecture et membre de conseils scientifiques de nombreuses institutions internationales et algériennes, il a à son actif plus de 350 publications internationales et communications à des congrès.