Plus de 9000 détenus palestiniens sont dans les geôles israéliennes, dont 3500 en détention administrative, c’est-à-dire sans procès ni inculpation. De nombreuses ONG de défense des droits de l’homme ont dénoncé les conditions extrêmement difficiles de détention, citant «les mauvais traitements, la torture, les violences sexuelles, l’humiliation, le refus de nourriture, etc.» Les images de prisonniers mains ligotées et yeux bandés, exposés comme des trophées de guerre par les soldats israéliens, ont choqué plus d’un.
Ils sont près de 7740 Palestiniens à avoir été arrêtés par les forces d’occupation israéliennes depuis le 7 octobre dernier, dont 16 durant ces dernières 24 heures (entre samedi et dimanche) en Cisjordanie.
C’est ce qu’a déclaré hier, dans un communiqué conjoint, l’Autorité des affaires des prisonniers et ex-prisonniers et de la Société des prisonniers palestiniens, précisant que durant ces opérations d’arrestation, les victimes ont fait l’objet de violence et de maltraitance, alors que leurs biens et maisons sont systématiquement détruits.
La même source a affirmé, en outre, que le nombre total des détenus palestiniens dans les prisons israéliennes dépasse les 9000, dont 3500 en détention administrative sans procès ni inculpation. Depuis des décennies, la situation des détenus palestiniens dans les prisons a toujours été sévèrement critiquée par les ONG des droits de l’homme, y compris israéliennes, celle-ci s’est gravement détériorée durant les cinq mois de guerre génocidaire menée par l’entité sioniste à Ghaza.
Il y a quelques jours, des ONG de défense des droits de l’homme ont alerté sur la détérioration de l’état de santé du militant palestinien Merouane Berghouti, en détention depuis 22 ans, après son agression par des gardiens de prison. Le député israélien Ahmed Tebbi a déclaré qu’il avait reçu un coup le 6 du mois en cours suivi d’un autre le 12, provoquant une hémorragie, qui l’a laissé dans un état critique.
Tebbi a alerté sur «ces agressions» que subissent les prisonniers palestiniens dans les prisons où, selon lui, 16 détenus ont trouvé la mort. Une semaine auparavant, les autorités israéliennes annonçaient la mort de 27 détenus palestiniens sans en expliquer les raisons.
Depuis le 7 octobre, l’armée israélienne a intensifié les rafles de jour comme de nuit, et des dizaines, voire des centaines de Palestiniens ont été dirigés dans des conditions inhumaines vers des centres de détention, puis vers des prisons connues pour être des lieux de torture.
Les images de prisonniers palestiniens, les mains ligotées, les yeux bandés, en sous-vêtements, assis à même le sol, dans un froid glacial, maltraités par des soldats israéliens sont souvent diffusées sur la Toile, suscitant la condamnation des internautes. Il ne s’agit pas d’actes isolés, mais d’opérations militaires récurrentes qui consistent à exhiber les captifs palestiniens comme des trophées de guerre.
Il y a quelques jours, les principales chaînes de télévision israéliennes (Channel 13 publique et Channel 14 privée) ont diffusé des reportages qui décrivent la torture systématique des Palestiniens dans les prisons israéliennes.
«Actes d’humiliation»
ces scènes ont suscité la réaction de nombreuses organisations de défense des droits de l’homme qui ont alerté sur les abus récurrents et généralisés auxquels sont confrontés les prisonniers palestiniens dans les prisons israéliennes, surtout après la diffusion par des soldats israéliens de vidéos les montrant en train de torturer ou d’humilier des détenus palestiniens.
Certaines vidéos, diffusées par la Chaîne 14, montrent carrément des actes de torture sur des détenus, présentés comme des combattants ou des cadres du Hamas, dans leurs cellules, mains et pieds enchaînés et liés, les yeux bandés, souvent à genoux, la tête sur le sol, sur fond de propos haineux et racistes des gardiens et des soldats.
Plus grave. Un responsable de la prison explique : «Ils n’ont pas de matelas. Ils n’ont rien… nous les contrôlons à 100%, leur nourriture, leur sommeil… nous leur montrons que nous sommes les maîtres de la maison.» Des vidéos qui confirment les témoignages glaçants de détenus récemment arrêtés, rendus publics hier par deux ONG palestiniennes, la Commission des affaires des ex-détenus et le Club des prisonniers.
Il est fait état «d’agressions répétées» au cours du processus d’arrestation et de détention dans les cellules «Hasharon», «d’actes d’humiliation», de «torture», «de fouilles à nu» que subissent les détenus, avant d’être transférés au centre de détention «Damoun», où ils sont soumis à des conditions de détention «atroces et sans précédent».
Certains détenus ont raconté avoir été «étroitement attachés avec des menottes en plastique, les yeux bandés et forcés à marcher sur une longue distance».
Des témoignages qui se ressemblent et qui racontent l’horreur à laquelle font face également les détenues palestiniennes dans le centre de détention d’Hasharon, connu comme étant un lieu de sévices, de torture et d’humiliations pour les prisonnières, et cela s’est dramatiquement aggravé après le 7 octobre, avec les fouilles à nu et agressions dans les cellules de détention.
Les deux ONG ont évoqué le sort des détenues palestiniennes de la prison de Damoun, où se trouvent 67 Palestiniennes, dont 4 de Ghaza, ainsi qu’une mère et ses deux filles, toutes «soumises à des conditions extrêmement difficiles, en raison du double isolement collectif qui leur est imposé».
Ces témoignages s’ajoutent aux images terrifiantes de dizaines de prisonniers regroupés, assis par terre, les yeux bandés et les mains ligotées derrière le dos. Ces images ont suscité réprobation et condamnation.
Un groupe d’ONG israéliennes s’est rendu à Genève pour alerter sur ce qui est qualifié de «crise majeure» dans les prisons israéliennes, où 7 prisonniers palestiniens sont morts depuis le 7 octobre dernier. «Nous sommes extrêmement inquiets», a déclaré Tal Steiner, directrice exécutive du Comité public contre la torture en Israël, dans un entretien à l’AFP.
«Nous sommes face à une crise (...) il y a près de 10 000 Palestiniens détenus par Israël, (…) une augmentation de 200% par rapport à une année normale (...). Nous assistons à une utilisation généralisée et systématique de très nombreux moyens pour infliger des tortures et des mauvais traitements aux Palestiniens», a déclaré Tal Steiner, ajoutant qu’«au moins 27 Palestiniens sont morts dans ces lieux de détention depuis octobre. Ce qui est sans précédent».
Selon elle, les prisonniers sont souvent enfermés «dans des cages en plein air», où «ils sont menottés et ont les yeux bandés 24 heures sur 24». Selon Mme Steiner, «les prisonniers dorment à même le sol, sont battus et privés de soins médicaux. Les détenus à Ghaza – y compris des enfants – sont régis par la loi israélienne sur les combattants irréguliers, qui les prive de nombreux droits».
En fait, depuis le 8 octobre dernier, «la crise dans les centres de détention et les prisons israéliens a été vraiment ignorée», a déclaré à l’AFP Miriam Azem du centre juridique Adalah, qui défend les droits des citoyens palestiniens d’Israël. Son organisation, a-t-elle affirmé, «a documenté 19 cas de torture au sein du système pénitentiaire israélien depuis le 7 octobre, dont des violences sexuelles. Nous assistons à une utilisation généralisée et systématique de très nombreux moyens pour infliger des tortures et des mauvais traitements aux Palestiniens».
Cas de viol
Il y a quelques jours, des «responsables israéliens de la sécurité» ont déclaré à Haaretz que, selon leurs propres estimations, «seuls 10 à 15% des centaines d’hommes ghazaouis à moitié nus et ligotés, arrêtés dans la bande ces derniers jours, sont des membres du Hamas ou des personnes qui se sont identifiées à l’organisation».
Après avoir rendu visite à un groupe de prisonnières palestiniennes, Me Hasan Abadi a affirmé, dans un entretien accordé au site Middal East Eye, que «les femmes lui avaient parlé de menaces de viol et s’étaient dites soumises à une politique de famine en prison». D’autres prisonnières, enlevées par les forces israéliennes, ont parlé d’abus sexuels, de coups, de privation de nourriture, d’absence de soins médicaux et d’autres tourments psychologiques.
Même les experts de l’Onu ont dénoncé il y a un mois des cas de viol et d’agressions sexuelles commis sur des détenues palestiniennes par les autorités israéliennes. Le 11 mars, le Club des prisonniers palestiniens a accusé Israël d’affamer plus de 9100 prisonniers depuis le 7 octobre jusqu’à ce mois de Ramadhan.
Dans un communiqué, l’organisation de défense des prisonniers palestiniens a affirmé : «Avec l’avènement du mois de Ramadhan, l’administration pénitentiaire de l’occupation israélienne continue de pratiquer la politique consistant à affamer plus de 9100 prisonniers après le 7 octobre, parmi lesquels des femmes, des enfants et des malades.
En plus de cela, Israël pratique une politique de restrictions sur la pratique de rituels religieux des prisonniers, et notamment sur la prière, l’appel à la prière et la lecture du Coran (…). A cela s’ajoutent la réduction des repas et la mauvaise nourriture qui leur est fournie, ce qui a affecté leur état de santé.»
Le Club a mis en garde l’autorité israélienne en déclarant : «Affamer les prisonniers constitue la politique la plus dangereuse imposée par l’occupation après le 7 octobre, en plus de la torture et des mauvais traitements qui ont affecté tous les prisonniers, hommes et femmes, ainsi que les enfants détenus, et leur ont causé des problèmes de santé, et plus précisément au niveau du système digestif.»
Ce constat alarmant dans les prisons israéliennes entre dans le cadre de cette punition collective infligée au peuple palestinien après l’attaque du 7 octobre dernier.
Au-delà des vies fauchées des détenus, et dont le nombre pourrait être de loin plus important que celui annoncé officiellement, les prisonniers palestiniens sont traités de manière tellement inhumaine et terrifiante qu’ils ne pourront jamais s’en sortir indemnes. Une autre guerre qui se passe loin des yeux, dans les prisons israéliennes, des lieux où le droit ne s’applique pas.