Le décret n° 2023-9 du 8 mars 2023, publié par le Journal officiel tunisien le 9 mars, annonce la dissolution de tous les conseils municipaux et désigne les secrétaires généraux des municipalités pour assurer l’intérim sous l’égide du gouverneur de la région jusqu’à l’élection des nouveaux conseils.
La décision avait été prise la veille, lors d’un Conseil de ministres, en présence du président Kaïs Saïed, avec deux autres décrets ordonnant la révision de la loi électorale des collectivités locales et organisant leur structure. «Un pas en plus vers l’installation de l’approche conseilliste dans les structures représentatives de la population», selon le politologue Mohamed Bououd. La dissolution des conseils municipaux est survenue quatre jours avant la réunion inaugurale, prévue demain 13 mars, de la nouvelle Assemblée des représentants du peuple, élue en deux tours, les 17 décembre 2022 et 29 janvier 2023.
Le président Saïed semble exploiter la faible résistance à sa mainmise évolutive sur tous les pouvoirs en Tunisie pour étendre sa domination aux uniques institutions élues en mai 2018 sous l’ancien pouvoir, et échappant de droit à son autorité directe. Le politologue Mohamed Bououd pense toutefois que «l’impact très réduit de ces conseils sur la vie courante des citoyens fait que leur dissolution passe inaperçue».
Bououd rappelle que «les budgets des municipalités couvrent à peine les charges salariales de leurs employés et ne prévoient pratiquement pas d’investissements, ni même d’entretien de matériel roulant, dont plus des trois quarts sont bloqués, selon le dernier rapport de la Cour des comptes».
Conseillisme
La théorie conseilliste, dont s’inspirerait le président Saïed, prône l’installation d’autorités locales au sein de conseils régionaux parmi les élus de la région, qui réunissent, au hasard et à tour de rôle, une partie des élus municipaux. Le choix se ferait au hasard et les mandats sont de deux ans, au bout desquels un autre choix se ferait pour le passage de témoins. «C’est une forme de gouvernance du peuple par le peuple, comme ne cesse de l’affirmer le président Saïed», ajoute Mohamed Bououd.
Il est toutefois à remarquer que la situation socioéconomique et financière très difficile, traversée par la Tunisie et les Tunisiens ces derniers temps, pèse lourdement sur le citoyen lamda, avec un taux d’inflation dépassant les 10% ces deux derniers mois. C’est le principal souci des Tunisiens, loin des querelles politiques et du mode de désignation de leurs représentants. La peur d’une inflation hors contrôle durant le mois de Ramadhan, prévu le 23 mars, hante tous les Tunisiens, gouvernement compris.
Le ministère du Commerce a certes fixé, depuis le 9 mars, les prix d’une liste de fruits et de légumes, mais la rigueur du contrôle est absente dans le pays, depuis la chute du régime de Ben Ali le 14 janvier 2011. C’est pour cette raison que la dissolution des conseils municipaux est passée pratiquement inaperçue.
Tunis
de notre correspondant Mourad Sellami