L’affaire de la découverte, le 26 mai 2018, à bord d’un navire, à destination du port d’Oran, de 701 kg de cocaïne, dissimulés dans des cartons de viande surgelée, importée du Brésil sera examinée aujourd’hui par le tribunal criminel de première instance, à Dar El Beida à Alger.
L’enquête judiciaire prendra plus de deux ans, avant que la chambre d’accusation près la cour d’Alger ne valide les conclusions du juge d’instruction de la 2e chambre du pôle pénal spécialisé, près le tribunal de Sidi M’hamed, qui après 18 mois sans aucun acte de procédure, a inculpé et placé en détention le principal mis en cause, Kamel Chikhi, un magnat de l’immobilier connu sous le nom d’«El Boucher», ses deux frères, un de ses associés, son directeur commercial et un de ses agents exerçant au port d’Oran, pour les chefs d’accusation de «constitution d’une organisation criminelle dans le but d’importer, de commercialiser et de distribuer de la drogue», et de «blanchiment d’argent».
L’affaire avait fait couler beaucoup d’encre et suscité l’envoi de commissions rogatoires à de nombreux pays pour tenter de comprendre les circonstances dans lesquelles les 701 kg de cocaïne pure, ont été embarqués à bord du navire MC Vega Mercury, dissimulés dans des paquets de viande surgelée importée du Brésil, par deux sociétés de Kamel Chikhi, Sarl Dounia Meat et Sarl Amazone.
La découverte a été faite alors que le navire était en rade en attente de débarquement de la marchandise, lorsque les garde-côtes ont investi, en ce 26 mai 2018, le navire. Avec l’arrestation de Kamel Chikhi, l’enquête va lever le voile sur une grande affaire de corruption, dans laquelle de nombreux fonctionnaires de l’Etat, de hauts gradés de l’armée, de la police et des agents de l’administration foncière ont été cités.
Certains mis en cause ont été jugés et condamnés à des peines de prison pour «perception d’indus cadeaux» et «octrois d’indus avantages», «abus de fonction» et «dilapidation de deniers publics». L’enquête sur l’importation des 701 kg de cocaïne butait face aux lenteurs des réponses aux commissions rogatoires transmises à de nombreux pays.
Durant plus de trois ans, le juge d’instruction n’a pu trouver de réponses sur l’origine de cette drogue, ses propriétaires, et sa destination, surtout que Kamel Chikhi et durant toutes les étapes de l’enquête a nié tout lien avec cette cargaison, dont la découverte a provoqué, rappelons-le, des déclarations inédites de l’ancien Directeur général de la Sûreté nationale, Abdelghani Hamel, et ce, après l’incarcération de son chauffeur personnel, dans le cadre de cette enquête.
L’ex-chef de la police avait fait état, en direct sur une chaîne de télévision privée, de «dépassements dans l’enquête», précisant que «celui qui veut lutter contre la corruption doit être lui-même propre», avant d’affirmer que ses services «détenaient des dossiers en relation avec cette affaire».
Des propos qui ciblaient non seulement le patron de la Gendarmerie nationale, alors le général Menad Nouba (en détention pour une affaire de corruption), mais aussi feu Gaïd Salah, chef d’état-major de l’Anp et vice-ministre de la Défense, qui suivait de près l’enquête.