Israël continuera à s’opposer à la reconnaissance unilatérale d’un Etat palestinien.» Benyamin Netanyahu renouvelle l’opposition de son gouvernement à toute idée de solution politique globale à l’occupation, selon la formule des deux Etats, même si l’option revient avec force dans les agendas diplomatiques un peu partout dans le monde.
A commencer par les Etats-Unis, dont la présidence pilote en ce moment un projet engageant notamment les partenaires arabes de la région, à savoir l’Egypte, la Jordanie, le Qatar, l’Arabie Saoudite et les Emirats arabes unis. Ledit projet s’articule autour d’un cycle de négociations incluant l’Autorité palestinienne, et la mise en place d’un calendrier devant aboutir à la constitution d’un Etat palestinien.
Le tout devrait passer par la proclamation d’une trêve d’assez longue durée dans la Bande de Ghaza, l’ouverture de passages pour l’acheminement des aides humanitaires aux populations, et la libération définitive des plus de 130 détenus israéliens encore aux mains du Hamas.
La formule proposerait également, selon la presse américaine et israélienne, la formation d’un gouvernement provisoire palestinien à qui reviendrait, selon des attributions qui restent à définir, la gestion de l’enclave palestinienne. L’engagement des Etats arabes, parrainé par la Maison-Blanche, d’enclencher un processus étendu de normalisation des relations avec Tel-Aviv serait, dans ce cadre, la contrepartie à accorder à Israël pour l’amener à s’inscrire dans le projet.
L’on sait que lors de sa dernière visite au Moyen-Orient, le secrétaire d’Etat américain, Anthony Blinken, a eu les assurances du prince héritier saoudien quant à ses prédispositions à relancer un processus de normalisation avec l’Etat hébreu dès que celui-ci aura accepté d’œuvrer pour l’établissement d’un Etat palestinien.
«Aucun état palestinien ne sera créé…»
Il se confirme cependant que Benyamin Netanyahu et ses hommes de main politiques issus de l’extrême droite ont d’autres projets. Dans la suite des déclarations du Premier ministre israélien, Itamar Ben Gvir, ministre israélien de la Sécurité intérieure et fournisseur officiel d’armes aux colons, a ainsi déclaré qu’«après le 7 octobre, il est plus clair que jamais qu’il est défendu de leur (les Palestiniens) donner un Etat. Tant que nous serons au gouvernement, aucun Etat palestinien ne sera créé».
L’homme a le mérite d’exprimer clairement la position de Tel-Aviv sur la question et trouve que cela procède du «délire» d’imaginer que le gouvernement puisse accepter «la constitution d’un Etat terroriste aux côtés d’Israël». Sûrs de l’impunité que leur garantit un ordre mondial aux institutions neutralisées par la polarisation et les enjeux de suprématie géopolitique, les dirigeants de l’Etat hébreu sont décidés à mener la guerre comme ils l’entendent et à tirer le maximum de profits stratégiques, avant toute cessation des hostilités.
Leur statut de privilégiés historiques dans la liste des priorités dogmatiques pérennes de la diplomatie américaine leur permet même de naviguer à contre-courant des intérêts immédiats de la Maison-Blanche.
L’administration Biden, qui tente de vendre un projet d’apaisement dans la région pour amortir l’onde de choc militaire régionale générée par la guerre de Ghaza, se heurte là encore à l’entêtement du partenaire Netanyahu. La guerre de basse intensité que mènent les organisations inscrites dans l’«axe de résistance», parrainé par l’Iran contre les troupes US, impose un front que Washington ne voulait surtout pas ouvrir. Pas
maintenant.
Ces complications et leurs conséquences sur le partenariat avec les Etats arabes de la région, l’effritement des soutiens pro-israéliens dans le monde, y compris en Occident, et la montée des hostilités populaires envers la puissance américaine sont pour Washington le résultat direct de la prolongation de la campagne génocidaire du gouvernement israélien à Ghaza.
Selon des échos de plus en plus persistants de la presse spécialisée américaine, Joe Biden et ses proches collaborateurs sont plus que jamais remontés contre Netanyahu et son jusqu’au-boutisme.
L’ancrage stratégique du principe de relations privilégiées avec l’Etat hébreu dans la doctrine diplomatique de Washington et ses leviers organiques dans la structure même de l’establishment américain dissuadent cependant toute déclaration de divorce avec le maître de Tel-Aviv, ou à tout le moins toute opposition décisive à ses projections, qui plus est dans ce contexte de guerre ouverte au Moyen Orient.
Et Netanyahu en est parfaitement conscient et s’adjuge des marges de manœuvres affranchies de la tutelle directe de la Maison-Blanche.
Lors de sa dernière entrevue avec Anthony Blinken, le Premier ministre israélien a tenu à faire parvenir un message à Joe Biden : qu’il devait cesser de plaider pour cette histoire des deux Etats, sous peine de voir les perspectives de paix encore plus compromises au Moyen-Orient.