Décor d’intérieur de la demeure d’une famille de la classe moyenne avec côté court un salon et ses fauteuils ainsi qu’une grande baie vitrée côté jardin. On est en soirée. Aïcha, campée par Farida Benhamouda, s’apprête à fêter ses 25 ans de mariage avec Miloud, Ahmed Bekhal dans le rôle.
Ce dernier, dépenaillé, surgit brusquement chez lui, victime d’une méchante agression qu’il vient de subir sur la voie publique. Il n’a du son salut qu’à Titou, un chien errant, qui l’a pris en affection.
Safia (Nawal Benaïssa), médecin de son état et amie du couple, survient après lui. Les quiproquos s’ensuivent sauf que l’acte d’exposition par trop laborieux et langagier, se perd dans son développement d’autant que les personnages s’expriment et se meuvent dans un comique populacier qui dépare avec leur situation sociale petite bourgeoise.
Les habitués du travail d’écriture scénique et dramatique d’Azzedine Abbar sont désarçonnés par ce qui apparaît de prime abord comme une comédie débridée aux personnages caricaturaux et outranciers, tirant vers un théâtre boulevardier qui n’est pas particulièrement celui qu’affectionne Azzedine Abbar, le metteur en scène.
L’on est d’autant surpris que c’est lui qui a assuré la réécriture de Les compères, la pièce de Dusan Kovacevic, un écrivain, dramaturge et scénariste serbe qui lui verse dans un tragi-comique et l’absurde.
Il faut attendre l’entrée en lice d’Abdellilah Merbouh et son jeu incarné en inspecteur de police, pour s’apercevoir qu’il s’agit d’une comédie autrement plus relevée.
Et là, on retrouve le Azzedine Abbar qu’on connaît, adepte d’un théâtre exigeant, fouillé au possible par ses obsessions existentielles. Dès cet instant, le jeu se rééquilibre quelque peu et le spectacle acquiert le rythme qui lui sied, Ahmed Bekhal ne lui donnant plus le la par un sur-jeu qui entraîne à croire qu’il est le personnage principal alors qu’en fait il n’est qu’un trompe l’œil, le personnage central étant plutôt celui qu’on entend de bout en bout du spectacle mais qui n'apparaît jamais sur scène.
Chut, ne disons pas plus sur l’intrigue qui se corse et qui se pare d’une étrangeté avec l’apparition d’un autre inspecteur de police traducteur du langage de l’espèce canine.
C’est dire donc la nécessité des réajustements à faire après la générale pour que le spectacle s’écarte du premier degré et qu’il cultive l'ambiguïté qui lui sied.