La sauvegarde du patrimoine théâtral immatériel algérien ne se présente plus comme une option, aujourd’hui. C’est désormais un impératif qui consiste à récupérer les textes originaux des pièces jouées ou pas. Cette mission sert, entre autres objectifs, à fructifier un passé culturel que d’aucuns tendent à oublier, quand ils ne l’ignorent pas.
Le tracé du théâtre algérien serait tout aussi particulièrement enrichissant si les personnages encore vivants étaient impliqués dans des témoignages audio-visuels. Bouziane Ben Achour vient de contribuer à cette noble tâche à travers son ouvrage Journal de bord.
L’ouvrage est très «digest» à la lecture, nous pouvons nous promener aisément à travers ses sections, pas trop chargées, et les aborder de façon indépendante. De plus, et comme pour aider le lecteur à mieux appréhender et à assimiler ses analyses, Bouziane Ben Achour offre une partie didactique en explicitant le «style qui parle au cœur», qu’il a adopté dans son écriture.
L’auteur annote son ouvrage Ecritures vagabondes. Cette modestie participe manifestement de sa proximité, voire sa complicité avec le 6e art, ayant lui-même écrit plusieurs pièces. Tout au long de l’ouvrage, le lecteur est associé à un amour qui lie l’auteur aux réalisations dramaturgiques, de l’écriture, en passant par leur scénarisation jusqu’à leur concrétisation sur les planches. Le parcours d’un amoureux des arts, quel qu’il soit, ne peut être qu’un voyage vagabond.
A plus forte raison quand il s’agit du théâtre, qui exige une liberté dynamique toujours renouvelée. Bouziane Ben Achour invite, dans l’espace de son recueil, acteurs, metteurs en scène, écrivains…, il les campe sur une scène mémorielle qui nous gratifie d’autant de tableaux repères que de personnages qui ont conquis les planches algériennes, qui par le jeu, qui par la réalisation, ou encore la mise en scène.
Dans cette rétrospective d’un témoin, acteur et observateur aguerri des arts, l’évolution du théâtre algérien, «part du lion» dans l’ouvrage, est décrite dans un reportage où les témoignages passent par la plume de Ben Achour pour leur analyse et leur synthétisation. Le Journal égrène minutieusement les approches théâtrales en Algérie, de l’apparition de cet art jusqu’à nos jours en Algérie.
L’auteur adosse son exploration mémorielle aux grands noms qui ont marqué les planches, en textes, mises en scène et jeux. Les haltes mémorielles ; dont l’auteur ponctue ses «écritures vagabondes» sonnent comme une invitation adressée aussi bien à la corporation dramaturgique qu’aux jeunes chercheurs.
Il y a la nécessité pour les premiers à fixer les traces de leur parcours et des perspectives pour les seconds qui souhaitent transformer leur intérêt au théâtre en analyses ancrées sur différentes disciplines des sciences sociales (sociologie, littérature, linguistique, sociolinguistique, etc.), ou encore qui souhaitent exprimer leur passion pour la scène par des actes. Ils trouveront dans l’ouvrage de Ben Achour plusieurs pistes à explorer. Et diverses perspectives à concrétiser.
Bonne lecture !
Mohamed Berrached