Soixante-douze prévenus jugés en appel dans l’affaire Sonatrach : Trois anciens ministres, trois ex-PDG de Sonatrach et six sociétés étrangères devant le juge

10/04/2023 mis à jour: 03:00
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le pôle pénal financier et économique près le tribunal de Sidi M’hamed à Alger.

Jusqu’en fin de journée, le procès de Sonatrach n’était toujours pas ouvert. Ne voyant pas finir l’examen d’une autre affaire prévue le même jour, la présidente a décidé de faire l’appel des prévenus et de leur demander de revenir aujourd’hui avant de les libérer. 

L’autre affaire concerne les dossiers BRC, SLC-Lavalin, Petrofac, Saipem et JGC, qui avaient fait scandale, ainsi que celui de l’autoroute Est-Ouest, qui avait éclaboussé le défunt Président déchu, en 2006-2010. Ils avaient, par la suite, été mis sous le coude, l’été 2013, puis ont été rouverts en 2021. 

Plus de 70 prévenus, parmi lesquels six sociétés en tant que personnes morales, ont été déférés, en janvier dernier, devant le pôle pénal financier et économique près le tribunal de Sidi M’hamed, à Alger. Deux anciens ministres, Chakib Khelil de l’Energie, Mohamed Bedjaoui des Affaires étrangères, en fuite à l’étranger, ont été condamnés à des peines respectives de 20 et 5 ans de prison ferme assorties d’une amende d’un million de dinars et de la confirmation du mandat d’arrêt international émis à leur encontre. 
 

Le premier a été reconnu coupable des délits d’«octroi d’indus avantages», «détournement»,  «dilapidation de deniers publics», «corruption», «trafic d’influence» et «conflit d’intérêt»,  des faits liés à son intervention dans les marchés de l’autoroute Est-Ouest, notamment sa relation avec le trafiquant d’armes français Pierre Falcon, alors que le second a été condamné pour «passation de marché public en violation de la réglementation», «corruption», «trafic d’influence», «abus de fonction volontaire dans le but de bénéficier d’indus avantages», «violation de la réglementation de change et de mouvement de capitaux de et vers l’étranger», «conflit d’intérêt», «acceptation d’indus cadeaux». 

Des griefs liés aux contrats obtenus par Saipem, filiale du géant pétrolier italien Eni, grâce à Farid Bedjaoui (neveu de Mohamed Bedjaoui), son conseiller financier. Un peine de 10 ans de prison contre l’ancien ministre des Travaux publics Amar Ghoul (en détention) pour des «faits de corruption», tandis que trois anciens PDG de Sonatrach, Mohamed Meziane, Abdelhamid Zerguine et Abdelmoumène Ould Kaddour, ainsi que l’ancien PDG de Sonelgaz et ancien ministre de l’Energie, Noureddine Bouterfa, ont été condamnés à des peines respectives de 5, 3, 10 et 5 ans de prison ferme. 

Onze marchés confiés à BRC

La condamnation de Mohamed Meziane concerne les marchés obtenus par Saipem et celle infligée à Ould Kaddour est liée à l’affaire des 11 marchés confiés à BRC.  En fuite à l’étranger depuis 2010, Réda Hamech, l’ancien chef de cabinet de Mohamed Meziane et homme de confiance de Chakib Khelil, ainsi que Farid Bedjaoui, conseiller financier de Khelil, également en fuite à l’étranger, ont, quant à eux, écopé d’une peine de 10 ans de prison ferme prononcée par défaut. 

Cité dans plusieurs affaires de corruption à l’international, l’ancien vice-président à la division construction de SNC-Lavalin Riadh Ben Aïssa, poursuivi en Suisse où il était détenu pour des faits de corruption en Libye, et au Canada, vers où il a été extradé pour y être jugé pour une affaire de corruption, a joué un rôle dans l’octroi à SLC-Lavalin de plusieurs marchés en Algérie, dont ceux de la réalisation de la centrale électrique de Hadjret Ennous à Tipasa en 2008, et du complexe gazier de Rhourde Nouss en 2009. 

Il a écopé d’une peine de 7 ans de prison ferme, par défaut, assortie d’un mandat d’arrêt international, alors que Tullio Orsi, ex-patron de Saipem Algérie, qui avait quitté le pays la veille des interpellations opérées par les services de sécurité chargés de l’enquête préliminaire sur Sonatrach, a été condamné à 6 ans de prison. 

Le canadien SLC-Lavalin, le britannique Petrofac et le japonais JGC ont écopé de la même peine et pour les mêmes griefs liés au marché de construction de la centrale électrique de Hadjret Ennous, à Tipasa, et celui de la réalisation du complexe gazier de Rhourde Ennous au sud du pays. Dans ce dossier, l’ex-PDG de Sonelgaz, Noureddine Boutarfa, l’ancien PDG de Sonatrach Mohamed Meziane et Chakib Khelil ont été condamnés. 

L’ex-ministre de l’Energie a également été condamné pour l’affaire BRC, au même titre que Abdelmoumène Ould Kaddour et Abdelhamid Zerguine, et qui concerne 13 marchés de gré à gré obtenus par BRC (joint-venture entre Sonatrach et la compagnie américaine Brown and Root) auprès de nombreux ministères, sur instruction de Chakib Khelil, puis sous-traités et surfacturés. 

Cinq autres peines allant de 3 à 6 ans de prison ferme ont été prononcées, alors que plus d’une dizaine de prévenus ont bénéficié de la relaxe. Le pôle financier a, par ailleurs, condamné Chakib Khelil, Réda Hamech et Mohamed Bedjaoui à s’acquitter de la somme de 10 millions de dinars au titre de dédommagement.  
 

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