L’Iran est revenu ces dernières semaines à un rythme de production d’uranium enrichi à 60% similaire à celui du début de l’année, poursuivant son escalade nucléaire même s’il nie vouloir se doter de la bombe, a indiqué hier l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). «Le pays a augmenté sa production d’uranium hautement enrichi au cours des dernières semaines, alors qu’il avait ralenti le rythme depuis le milieu de l’année 2023», a déclaré l’agence onusienne dans un communiqué, relayée par l’AFP.
L’Iran a fait grimper sa production d’uranium enrichi à 60% à environ 9 kg par mois depuis la fin du mois de novembre, ce qui «représente une augmentation par rapport aux quelque 3 kg produits par mois depuis juin et un retour au taux mensuel de 9 kg au cours du premier semestre 2023», a-t-elle précisé.
En novembre, un rapport confidentiel de l’AIEA indiquait que les stocks d’uranium enrichi en Iran dépassaient de 22 fois la limite autorisée par l’accord international de 2015 encadrant les activités atomiques de Téhéran, en échange d’une levée des sanctions internationales. L’accord a volé en éclats à la suite du retrait de Washington en 2018 décidé par le président américain de l’époque, Donald Trump. Son successeur Joe Biden a tenté de le ranimer via des discussions menées à Vienne, mais elles sont au point mort depuis l’été 2022.
L’Iran, qui s’est rapproché de Moscou depuis le début de l’intervention russe en Ukraine, a par ailleurs exclu des inspecteurs de l’AIEA et débranché des caméras nécessaires à la surveillance de son programme nucléaire. Il enrichit à des niveaux loin du plafond fixé par la communauté internationale à 3,67%, équivalant à ce qui est utilisé dans les centrales nucléaires pour la production d’électricité.
«Inutile»
En novembre, la République islamique disposait de 567,1 kg enrichis à 20% et de 128,3 kg à 60%. Soit plus de trois fois la matière en théorie nécessaire pour fabriquer une bombe atomique, à un niveau de 90%. Fin février, l’AIEA a indiqué dans son rapport avoir détecté en Iran des particules d’uranium enrichi à 83,7%, soit juste en deçà des 90% nécessaires pour produire une bombe atomique.
Elles ont été découvertes à la suite de la collecte d’échantillons en janvier dans l’usine souterraine de Fordo, a précisé l’instance onusienne, qui confirme ainsi des informations données par des sources diplomatiques. Ainsi, elle a demandé «des clarifications» et «les discussions sont toujours en cours» pour déterminer l’origine de ces particules. Quelques jours auparavant, Téhéran a affirmé «n’avoir pas fait de tentative pour enrichir au-delà de 60%». Le 5 juin, le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken, a répété que l’administration Biden considérait l’Iran comme la principale menace pour Israël et qu’il ne lui serait jamais permis d’obtenir l’arme nucléaire.
«Si l’Iran rejette la voie de la diplomatie, alors, comme le président (Joe) Biden l’a clairement indiqué à de nombreuses reprises, nous n’écartons aucune possibilité pour s’assurer que l’Iran n’obtienne pas d’armes nucléaires», a assuré le secrétaire d’État américain lors d’un discours à Washington devant le lobby pro-israélien Aipac. En octobre, le directeur général de l’AIEA, Rafael Grossi, a appelé la communauté internationale à ne pas faillir en Iran comme elle l’a fait en Corée du Nord, aujourd’hui dotée de la bombe atomique.
Début décembre, le ministre iranien des Affaires étrangères, Hossein Amir-Abdollahian a déclaré que la relance éventuelle de l’accord conclu en 2015 sur le nucléaire est devenue de plus en plus «inutile » pour l’Iran. «Aujourd’hui, plus on avance, plus le JCPOA (acronyme de l’accord sur le nucléaire en anglais, ndlr) devient inutile», a affirmé Hossein Amir-Abdollahian lors d’un discours devant les étudiants de l’université de Téhéran.
«Etant donné que les lignes rouges (de l’Iran) ont parfois été ignorées par l’autre partie, nous ne sommes pas actuellement sur la voie de revenir à l’accord», a indiqué Hossein Amir-Abdollahian. «Bien entendu, cela ne signifie pas que nous avons laissé l’accord de côté. Si l’accord sert nos intérêts, (nous l’accepterons) avec tous ses défauts», a-t-il ajouté.