La situation apocalyptique que vivent les Palestiniens de Ghaza et de la Cisjordanie occupée depuis le début de la guerre, qui entre dans son cinquième mois, contraste dramatiquement, outrageusement avec la démarche institutionnelle de fausse bonne conscience dans laquelle se drape la riposte internationale face à cette tragédie du siècle.
Que faut-il de plus aux décideurs anthropophages de ce monde, entre les mains desquelles se trouve le sort de l’humanité, dans le cas précis de la population palestinienne de Ghaza, livrée à la folie meurtrière et destructrice de l’armée d’occupation israélienne, pour arrêter l’entreprise génocidaire contre les populations civiles palestiniennes ?
Non-assistance à population en danger, complicité de génocide, la guerre contre Ghaza a franchi un seuil inquiétant dans la faillite géopolitique et morale du système de gouvernance de l’ordre mondial en place.
Alors que les Palestiniens continuent de tomber en martyrs, en grand nombre, sous le déluge des bombes, transformant Ghaza en un champ de ruines, dans les cénacles où l’on est censé «réfléchir» à une issue à cette sale guerre, on tergiverse, on palabre, on pousse l’outrecuidance jusqu’à vouloir négocier l’acheminement de l’aide humanitaire à une population assiégée, affamée, exposée à une catastrophe sanitaire.
Pis, les alliés d’Israël n’éprouvent aucun embarras à se faire les chantres de la poursuite de la guerre ! C’est la posture qu’adopte l’administration Biden depuis le début de la guerre en faisant capoter, en usant et abusant du droit de veto américain, toutes les résolutions onusiennes appelant à un cessez-le-feu immédiat et inconditionnel.
La dernière résolution soumise au Conseil de sécurité, avant-hier mardi, à l’initiative de l’Algérie, a connu le même sort. Toutefois, ce confort politique dans lequel se meut Washington, fort de son statut de membre permanent du Conseil de sécurité, cache mal son isolement de plus en manifeste par rapport à ses alliés arabes et occidentaux qui n’hésitent plus à prendre leurs distances avec la position américaine de soutien inconditionnel à Israël et à l’option militaire.
En effet, il est significatif de relever que le seul vote contre a été le fait des Américains, le Royaume-Uni s’étant abstenu. C’est là une grande avancée dans la consécration du droit sur la force et l’impunité qui permet d’espérer une issue rapide à l’entreprise génocidaire contre Ghaza.
L’autre bataille, juridique celle-là, se joue à la Cour internationale de justice. La CIJ recueille, depuis lundi, les témoignages et plaidoiries des 52 pays, dont l’Algérie, ayant formulé le désir d’apporter leur contribution et éclairage sur le génocide perpétré par l’entité sioniste contre le peuple palestinien à Ghaza.
C’est la première fois dans l’histoire qu’un débat sur la nature coloniale, raciste, génocidaire de l’entité israélienne s’invite au niveau de la plus haute Cour de justice de l’Onu. Même si les audiences de la CIJ sur «les conséquences juridiques découlant des pratiques et politiques d’Israël» ont un caractère consultatif, il n’en demeure pas moins que l’activation des juridictions internationales est loin d’être un fait anodin, comme le prouve l’inquiétude grandissante suscitée dans les rangs israéliens.
Il s’agit là, incontestablement, d’une victoire morale et politique majeure à l’actif de la cause palestinienne et des forces éprises de paix dans le monde, qui ont contribué à la mise à nu d’Israël et du sionisme international montrés au monde sous leur véritable visage suprémaciste, colonial, ne concevant le droit à l’existence des Palestiniens qu’en dehors de la Palestine, conformément au plan sioniste de la judaïsation de ce territoire. Y aura-t-il une suite après les audiences en cours au niveau de la CIJ ?
Dans les prochains jours, le gouvernement israélien devra rendre à la Cour internationale de justice son rapport sur les accusations de génocide portées contre l’entité sioniste. Là aussi, il faudra s’attendre à une mobilisation des alliés d’Israël, comme c’est le cas au Conseil de sécurité de l’Onu, pour sauver le soldat Netanyahu et les démons de son cabinet de guerre des griffes de la justice internationale.
Face au dévoiement des missions des organes de maintien de la paix et de la sécurité internationales mis au service d’ enjeux de puissance, face aux limites, à la lourdeur de la machine judiciaire de la CIJ – le temps judiciaire est souvent en net décalage par rapport au temps politique et aux situations d’urgence, requérant des décisions rapides et courageuses, comme c’est le cas de la tragédie de Ghaza – les peuples opprimés, sous domination coloniale, n’ont-ils donc d’autre choix que de capituler devant l’impunité et les violations du droit international ?
En attendant les réformes du Conseil de sécurité et des autres institutions onusiennes, tel que souhaité par les Etats exclus du système de gouvernance mondiale en place, la solution au martyre subi par les Palestiniens de Ghaza et des Territoires occupés viendra-t-elle de la pression de l’opinion internationale, particulièrement celle des pays arabes, occidentaux et des Etats-Unis d’Amérique, alliés d’Israël ?
Il est un fait indéniable que la bataille de l’opinion a joué un rôle majeur dans le recadrage du conflit et le réajustement des positions de soutien inconditionnel, dogmatique, au «droit d’Israël à se défendre». L’avenir politique des équipes au pouvoir s’annonce des plus incertains. C’est le cas du candidat américain sortant, Joe Biden, engagé dans la course à sa propre succession, dans une élection qu’il a déjà perdue, selon les analystes.