A l’instar de nombreux pays, l’Algérie fait face à une problématique cruciale de gestion des déchets. La loi 01-19 de 2001 a été promulguée pour instaurer une gestion des déchets respectueuse de l’environnement, en adoptant des méthodes écologiques et techniques. Au-delà des aspects environnementaux, cette gestion implique également des considérations sociologiques significatives.
Le secteur informel occupe une place prépondérante dans le recyclage et la valorisation des déchets en Algérie, dépassant de loin les performances du secteur formel. La reconnaissance et l’intégration de ces acteurs informels sont donc essentielles pour une gestion efficace et transparente des déchets.Il convient de noter que l’incorporation du secteur informel dans l’économie structurée est un défi complexe, mais qui peut être abordé de diverses manières. Malgré les obstacles, les avantages d’une telle intégration sont considérables.
La création d’emplois formels représente une stratégie déterminante pour intégrer les acteurs de la collecte informelle. En les employant au sein d’établissements publics ou privés, on leur assure non seulement une stabilité de carrière, mais également l’accès à une protection sociale.
Parallèlement, la structuration des récupérateurs informels en coopératives pourrait renforcer leur statut social et leur capacité de se positionner dans le marché des déchets en toute transparence. Cela faciliterait le partage des ressources, l’échange de savoir-faire et l’accès élargi au marché du recyclage.
La formation représente aussi un levier d’intégration, avec la mise en place de programmes visant à perfectionner les compétences des acteurs informels, à les sensibiliser aux risques sanitaires et sécuritaires du secteur et à les former aux techniques modernes et sanitaires de récupération et de recyclage.
Encourager l’entreprenariat par le soutien à la création de microentreprises dans la gestion des déchets permettrait aux acteurs informels de devenir entrepreneurs, avec l’appui nécessaire en financement, en formation et en accès aux marchés, notamment à la commande publique.
Une autre méthode consisterait à intégrer ces récupérateurs au sein des schémas communaux de gestion des déchets, en les reconnaissant comme partenaires et en leur confiant notamment des circuits de collecte.
Enfin, les programmes d’inclusion sociale peuvent être déterminants pour franchir cet obstacle psychologique qui freine l’intégration du secteur informel.
Ces programmes devraient offrir un éventail de services, dont l’accès à la formation, facilitant ainsi l’intégration de ces professionnels essentiels dans le secteur des déchets.
Des exemples internationaux illustrent la réussite de l’intégration du secteur informel dans la gestion des déchets. En Inde, les «ragpickers» constituent un maillon essentiel du système de collecte des déchets. Au Brésil, les «catadores» ont vu leur situation s’améliorer grâce à la formation de coopératives.
En Egypte, la communauté des «zabbaleen» au Caire a développé un modèle économique basé sur une efficacité remarquable en matière de récupération et de recyclage.
Ces expériences montrent que l’intégration du secteur informel peut être adaptée à différentes réalités et cultures et avoir un impact positif sur l’environnement, l’économie locale et la vie sociale.
En conclusion, la gestion des déchets en Algérie représente une opportunité d’intégration socio-économique pour le secteur informel. Les stratégies d’intégration peuvent prendre diverses formes, allant de la création d’emplois formels à l’organisation en coopératives, en passant par des programmes de formation et de soutien à la création de microentreprises.
L’intégration de ces acteurs dans les systèmes officiels de gestion des déchets des communes et l’instauration de programmes d’inclusion sociale peuvent également jouer un rôle déterminant.
Cependant, pour que ces stratégies réussissent, une collaboration étroite entre divers acteurs-clés est essentielle : les différents départements ministériels concernés, les collectivités locales, la société civile, les secteur entreprises et, bien sûr, les acteurs du secteur informel eux-mêmes.
En somme, une intégration réfléchie et stratégiquement planifiée du secteur informel dans le domaine de la gestion des déchets aura sans aucun doute un impact socio-économique positif et significatif pour notre pays.
Par Karim Ouamane , Directeur général de l’Agence nationale des déchets