Il n’est pas normal que les pays et des instances internationales nous demandent de lutter contre la corruption, et dans le même temps ils ne nous donnent pas un coup de main pour récupérer les fonds détournés».
Cette phrase lourde de sens a été lancée, samedi dernier, par le Premier ministre, Aïmene Benabderrahmane. Elle sonne comme un regret de voir les efforts de l’Algérie pour récupérer l’argent transféré illégalement à l’étranger freinés par un manque de coopération de la part des partenaires étranger. Le premier responsable du gouvernement ne le dit pas explicitement. Mais il le sous-entend à travers cette déclaration qui intervient à la fin de son discours, prononcé à l’occasion du lancement de la Stratégie nationale de transparence, de prévention et de lutte contre la corruption (2023-2027).
En effet, après avoir exposé les mesures prises pour renforcer la lutte contre la corruption, Aïmene Benabderrahmane réitère l’appel de l’Algérie aux pays et aux partenaires étrangers de coopérer en vue de récupérer les fonds détournés. «Je profite de cette occasion pour inviter tous les pays et les partenaires étrangères à nous aider et à aider tous les pays en développement en vue de récupérer l’agent détourné et transféré à l’étranger», lance-t-il.
Parfois, ajoute-t-il, «ces pays assurent un refuge pour ces fonds». «Nous demandons à ces organes et à ces pays ayant bénéficié de la domiciliation de cet argent chez eux à nous aider à les récupérer», ajoute-t-il, sans toutefois s’étaler sur le sujet et sans citer les pays concernés par cet appel. Depuis 2019, rappelons-le, la récupération des fonds détournés était le cheval de bataille des autorités.
Sans révéler les montants ciblés, les autorités se sont contentées jusque-là de donner les chiffres concernant les procédures internationales engagées. En décembre 2022, le ministre de la Justice, Abderrachid Tabi avait fait part de «l’émission de 224 commissions rogatoires pour la récupération des fonds détournés, réparties sur 30 pays».
Le garde des Sceaux avait reconnu, toutefois, que «la récupération de ces fonds et biens au niveau international est un processus difficile et compliqué, en raison de plusieurs facteurs dont la différence existant entre les systèmes judiciaires d’un pays à l’autre, et les réponses divergentes des pays à ce processus». «A l’entame de l’opération, nous avons été confrontés à des pays non convaincus par la démarche. Néanmoins, l’ampleur des dégâts a convaincu ces pays de la nécessité de fournir aide et assistance pour la récupération des biens du peuple algérien», avait-il précisé.
Afin de dissiper les doutes sur la véracité des chiffres annoncés concernant l’opération de récupération de cet argent, le ministre assure que «tous les détails de ce bilan sont consignés dans un rapport de 1.400 pages». Au niveau national, avait-il précisé, la valeur des fonds récupérés dépasse les 20 milliards de dollars américains. «La justice a mis la main sur ces biens répartis sur les différentes wilayas du pays», avait-il indiqué, citant la confiscation «d’habitations, de biens touristiques, des villas luxueuses à travers les wilayas du pays, ainsi que des dizaines d’usines, dont des usines de montage automobile et d’autres activant dans divers domaines, outre la saisie de bijoux et des pierres précieuses et la confiscation de 6447 comptes bancaires et 4203 véhicules, tous types confondus». Il avait souligné aussi «la confiscation de 23 774 biens mobiliers, de 425 habitations, et de 14 promotions immobilières, chacune comprenant jusqu’à 1000 logements ».