Réaxer le dialogue

29/05/2022 mis à jour: 00:57
2020

Les cycles de dialogue ont été, dans l’histoire récente du pays, réédités sous plusieurs formes et appellations. En faisant le bilan de ces rounds dont certains ont laissé de mémorables images, on s’apercevra que ces laborieux dispositifs officiels ont rarement changé le cours des événements ou fait évoluer la vie politique vers plus de modernité et de démocratie. 

L’opposition est restée dans l’opposition, les islamistes fidèles à leur sombre projet, et le pouvoir continue d’accomplir sa tâche de prédilection : organiser les élections et les gagner. Une nouvelle phase de dialogue a été annoncée ces dernières semaines. Qu’apportera-t-elle de nouveau ? Ce sont précisément d’anciennes figures, ou celles portant le sceau du système, qui ont été les premières à répondre à cet appel et à faire des déclarations qui se rejoignent sur la nécessité de créer un «front interne solide». Les objectifs qui transparaissent de cette initiative sont si nombreux qu’ils ne peuvent pas être promis à une réelle prise en charge par de simples prises de contact au sommet de l’Etat. 

Du reste, il est difficile d’envisager que des questions de politique étrangère ou de sécurité soient intégrées dans ces discussions, dès lors qu’elles relèvent du seul ressort du chef de l’Etat. Il faut également rappeler que le meilleur rempart contre les crises et les tensions dans le monde est la capacité de production, d’exportation et, à la limite, d’autosuffisance prioritairement alimentaire. Ce sont, en vérité, les questions ou les «échéances» économiques qui préoccupent les dirigeants. Une rencontre prévue il y a une dizaine de jours à l’effet de recueillir un consensus sur la réforme des subventions a été reportée sine die. La véritable impasse se trouve à ce niveau.

Comment sortir du «tout social» et investir dans la relance de la production sans créer de graves fractures dans la société. Les révoltes les plus incontrôlables sont celles dites «du pain» et les manifestations les moins souhaitées sont celles des chômeurs. Dans ce registre essentiel, le pouvoir est entre le désarroi et l’indécision. Il s’est précocement fourvoyé en promettant la hausse des salaires pour rasséréner le front social, avant d’essuyer en retour une salve des syndicats qui campent sur l’exigence d’un relèvement conséquent du niveau de vie en plein marasme économique. Dans ce qui s’apparente à une fuite en avant des autorités, des acteurs de la vie publique préfèrent botter en touche, en réitérant l’ancienne demande d’ouverture des espaces politiques, à l’heure où la liberté d’expression est globalisée, infinie, échappant même aux dispositifs de lutte contre les fausses nouvelles, la diffamation et les atteintes diverses.

Le temps est sans doute venu de réaxer le dialogue dans le sens horizontal, et ce, dans toutes les entités, politiques et économiques. La fin de la notion anesthésiante de l’Etat-providence va s’accompagner de celle des situations de rente à tous les niveaux de la vie nationale, où l’absence d’initiative a ancré l’inertie et ouvert la voie à la régression et à la récession. 

Au sein des organisations politiques comme dans les collectivités locales et les assemblées élues, la culture d’entreprise, et son corollaire l’obligation de résultats, doit être réhabilitée pour espérer réinventer un nouveau destin pour le pays.

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