L’échange d'assiettées durant le mois sacré de Ramadhan est une tradition qui se perpétue à El Meridima, un des plus anciens et plus grands quartiers de la ville frontalière d’El Kala, dans la wilaya d’El Tarf. L'échange de mets entre voisins, proches, amis et connaissances constitue une des caractéristiques les plus louables des habitants de cette cité qui traduit leur attachement aux valeurs communautaires de solidarité et de convivialité, particulièrement durant ce mois de jeûne qui incite à la générosité et à la compassion. A quelques minutes de l’appel à la prière du Maghreb qui marque la fin du jeûne, El Meridina connaît des allers et retours intenses des enfants et des jeunes portant des plats à offrir aux habitants du voisinage. Une dynamique qui s’étend jusqu’aux immeubles des nouvelles cités résidentielles mitoyennes. Les mères de familles tiennent particulièrement à cette tradition de partage et de bonté veillant à en assurer la transmission aux nouvelles générations, affirment, dans un déclaration à l’APS, des habitants de la cité. Par ces gestes simples, les gens d’El Meridima tiennent à consolider les rapports de bon voisinage et à revitaliser les relations familiales au travers cette tradition d’échange d'assiettées tout le long du mois sacré, coutume héritée des parents et grands-parents, souligne Badis, un habitant de la cité, tout en précisant qu’"El Meloukhia" et le Couscous au lait et raisins secs sont les plus échangés entre les familles. Badis confie que, dès sa tendre enfance, il voyait sa mère envoyer un plat de f’tour à sa tente paternelle, tandis que leur propre table de f’tour recevait tous les jours un ou deux plats de la part de voisines. De son côté, Messaoud, un ancien habitant de la cité El Meridima, a pris l’initiative d’assurer des plats f’tour quotidiens à certaines familles démunies du village El Melha, une des zones les plus sinistrées lors des incendies de l’été 2022. Il est assisté dans son action de solidarité par son épouse Fatima et ses deux fils, Mohamed et Saïd. La Baraka de Ramadhan croît par le don et le partage Les habitants d’El Meridima sont unanimes à assurer que cette tradition amène les gens à se sentir proches les uns des autres et répand les sentiments de magnanimité et de bienveillance au sein de la communauté en dépit de la conjoncture difficile et certaines formes de modernité qui font fi de cette tradition. Rabiha, 65 ans, affirme ressentir une "immense joie" à chaque fois que l’on frappe à sa porte, peu avant la rupture du jeûne, car sachant que c’est Tarek (son neveu) apportant sa part de Meloukhia. Pour Nouri Hou, journaliste intéressé par le patrimoine populaire, l’échange de plats durant le Ramadhan est une tradition visible surtout dans les vieux quartiers populaires. L’échange d'assiettées, a-t-il ajouté, "ne doit pas se limiter aux seuls voisins, mais doit s'étendre aux familles qui se trouvent dans le besoin que nous connaissons dans nos quartiers sans qu’elles n'aient besoin d’exprimer leurs difficultés". Selon Nouri, l’implication des enfants à cette pratique sociale de partage permet d’ancrer dans leurs esprits cette valeur et de garantir sa perpétuation. De son côté, Redouane Laathamna, imam de la mosquée Abdallah ibn Zoubeïr de la cité Meridima, précise que l’Islam recommande de faire montre de bonté envers le voisin et envers autrui. "Cette tradition concrétise cette valeur et renforce la cohésion sociale et les relations de bon voisinage et d’entraide", a-t-il soutenu.