Le procès en appel de l’affaire relative au détournement de terres agricoles à Tipasa au profit de proches de hauts dignitaires du régime Bouteflika s’est poursuivi, hier, au tribunal pénal près la cour de Boumerdès, avec les plaidoiries du procureur de la République et des avocats de la défense.
L’affaire concerne, pour rappel, l’attribution dans le cadre de l’investissement de 4 lots de terrain à vocation agricole, dont l’un des bénéficiaires est Toufik Hamel, le fils de l’ex-patron de la DGSN. Elle a été rejugée après l’acceptation par la Cour suprême du pourvoi en cassation interjeté par la défense.
Dans sa plaidoirie, le représentant du parquet a dressé un sévère réquisitoire contre les accusés, parmi lesquels se trouvent trois anciens walis de Tipasa, l’ex-DGSN Abdelghani Hamel, son fils Toufik, l’ex-ministre des Finances, Hadj Baba Ammi, et d’autres anciens hauts cadres de la même wilaya. Ils sont poursuivis pour «détournement de foncier agricole», «abus de fonction», «dilapidation de biens publics» et «trafic d’influence».
Après avoir énuméré les infractions commises dans ce dossier, le procureur a demandé le durcissement des peines prononcées en juin 2020 à l’encontre de tous les inculpés, excepté l’ancien directeur général des Domaines, Kheznadji Djamel, contre lequel il a requis 5 ans de prison ferme assortie d’une amende de 500 000 DA.
Pour sa part, l’avocat du Trésor public a présenté un rapport au juge, où il a été demandé le paiement d’une somme de 100 000 DA en guise d’indemnisations pour les dommages subis par l’Etat dans cette affaire. Les inculpés avaient, rappelons-le, écopé de lourdes peines en 2e instance.
L’ex-DGSN et l’ancien wali, Moussa Ghelai, ont été condamnés à 12 ans de prison, Mustapha Layadhi et Kadi Abdelkader à 10 ans, tandis que Hadj Baba Ammi a écopé de 4 ans de prison ferme sans mandat de dépôt.
Les autres ont été condamnés entre 1 et 5 ans de prison. Hier, les avocats de la défense ont mis en avant l’absence de preuves justifiant les griefs retenus contre leurs clients. Pour Me Brahim Tairi, l’attribution des 4 lots de terrain ne souffre d’aucune ambiguïté, soulignant que le Conseil d’Etat n’a toujours pas statué dans l’affaire liée à la nature de ces terres.
«L’ancien wali Mustapha Layadhi a délivré 187 actes de concession quand il était à la tête de la wilaya. Bizarrement tous ont été légaux, sauf ceux où figurent les noms de Toufik Hamel et Zerad Abdelhakim», a-t-il asséné.
Me Hadjadj Adel, dénonce «une affaire fabriquée», ajoutant «qu’on ne peut pas discuter de la loi quand le droit est absent».
«C’est une affaire fabriquée. S’il n’y avait pas Chafik Hamel parmi les bénéficiaires des terrains en question, on ne serait pas là aujourd’hui. Or, quel est le tort de ce jeune entrepreneur algérien si ce n’est celui de vouloir investir dans son pays. Le terrain qu’on lui a attribué était une décharge, mais cela ne l’a pas empêché de payer les redevances à l’Etat», a-t-il appuyé.
Et d’enchaîner : «Tout ce qui s’est dit dans ce procès relève du domaine administratif. Où est le caractère pénal de l’affaire ? On doit se rendre compte qu’on est en train de juger de hauts cadres de l’Etat. S’ils avaient abusé de leurs pouvoirs, ils auraient donné des terrains à leurs proches à El Mouradia, pas dans un coin isolé à Tipasa.».
Les plaidoiries se sont poursuivies jusqu’à une heure tardive de la journée. Pour certains avocats, le verdict de cette affaire pourrait être rendu dans une ou deux semaines.