L’autrice Amina Damerdji vient de remporter le Prix littéraire Transfuge 2024 pour son roman Bientôt les vivants (288 pages), publié aux éditions Gallimard.
L’écrivaine, avec un style plaisant, nous transporte d’abord dans l’Algérie de 1988, les premières émeutes réprimées, la montée en puissance du mouvement islamiste, période annonciatrice d’un futur noir. Une histoire douloureuse.
La jeune Selma vit dans la proche banlieue d’Alger.
Elle n’a qu’une passion : l’équitation qu’elle pratique dans un centre non loin du village de Sidi Youcef, où se déroulera en 1997 l’un des épisodes les plus atroces de la guerre civile.
Elle consacre tout son temps libre au dressage d’un cheval que tout le monde craint, tandis que les déchirements de l’histoire traversent sa famille comme toute la société algérienne : certains sont farouchement opposés aux islamistes, d’autres penchent pour le FIS, d’autres encore profitent du chaos pour s’enrichir…
C’est dans ce contexte tragique que Selma apprendra à grandir, trouvant dans la relation avec son cheval et avec la nature un antidote à la violence des hommes. Bien que le martyre du village de Sidi Youcef éclaire d’une lumière terrible les trajectoires des divers personnages, ce roman reste constamment chaleureux et humain.
Un extrait du roman : «Aïcha courut à travers le village. Ses jambes tremblaient et son cœur battait si fort qu’il semblait vouloir sortir de sa poitrine. Elle connaissait le mot, dhabahine, les égorgeurs. Dhabahine, dhabahine !» Contactée, l’auteure a déclaré à chaud : «Ce prix m’honore et m’émeut d’autant plus que ce roman a pour cadre l’Algérie de mon enfance, une Algérie déchirée par la violence, qui a été peu racontée.
Il me semble naturel de dédier ce prix Transfuge du meilleur roman français à tous ceux et celles qui ont été percutés par la décennie noire algérienne…» Amina Damerdji, qui est née en 1987 en Californie aux Etats-Unis, a grandi à Alger, puis en Bourgogne et à Paris où elle réside, a aussi vécu à Madrid et à Cuba.
Elle est chercheure en lettres et en sciences sociales. Dès son jeune âge, elle a été bercée par les œuvres de Baudelaire, Rimbaud, Balzac, Stendhal, Joyce Carol, Gide, Aragon, Proust et Gabriel Garcia Marquez, entre autres…
Le verbe facile, elle dit encore, pour raconter brièvement sa carrière d’autrice : «Mon premier roman, Laissez-moi vous rejoindre (paru en 2021) est à la première personne : j’avais besoin de me sentir au plus près de ce personnage inventé à partir d’une personne réelle, Haydée Santamaría, de l’habiter dans sa chair.
Mais pour le deuxième, portant sur une histoire qui m’est beaucoup plus proche, c’est la troisième personne qui s’est imposée. Là, au contraire, j’avais besoin d’une distance pour laisser l’écriture respirer». Amina Damerdji, une écrivaine à lire et à découvrir…