Plus aucun endroit n’est sûr dans la bande de Ghaza : Israël s’en prend aux humanitaires

03/04/2024 mis à jour: 03:52
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Photo : D. R.

L’armée israélienne a pilonné un convoi d’aide de l’Ong américaine World Central Kitchen  (WCK) à Ghaza, tuant sept humanitaires dont un chauffeur palestinien et des étrangers polonais, australien et britannique.

Trois camions ont été délibérément visés par des missiles, sous  prétexte qu’un combattant de Hamas s’y trouvait parmi les occupants. L’attaque a suscité une avalanche de condamnations, mais aussi la suspension des activités de WCK, à  Ghaza, où elle venait de distribuer plus de 100 tonnes de repas à la population.

L’aviation sioniste a bombardé, dans la nuit de lundi à mardi, un convoi de trois véhicules d’aide alimentaire appartenant à l’ONG humanitaire américaine WCK (World Central Kitchen), qui assure la livraison de repas à la population de Ghaza, tuant  sept de ses collaborateurs, originaires de la Pologne, de l’Australie et du Royaume-Uni, ainsi qu’un Palestinien qui faisait office de chauffeur.

Les trois véhicules bombardés étaient reconnaissables à l’insigne de l’ONG bien visible sur leurs toits et ne pouvaient ne pas être reconnus par les avions de chasse. Ils ont été délibérément ciblés, d’autant que l’armée d’occupation sioniste était informée de leur déplacement et de leur itinéraire. Sur les images largement partagées sur les réseaux sociaux, on voit clairement l’impact des tirs de missiles et visiblement il ne s’agit pas d’un seul tir de missiles mais de trois, qui ont ciblé les trois véhicules.

Citant «des sources de sécurité», le journal israélien Haaretz a affirmé, hier,  que le convoi a été attaqué, «car on soupçonnait qu’un membre armé du Hamas s’était joint aux volontaires étrangers, mais il est resté dans l’entrepôt d’où le voyage avait commencé (…) Après le premier tir de missile, les passagers ont tenté de se déplacer vers un autre véhicule et ont été attaqués une deuxième et une troisième fois».

Des actes qui constituent une violation caractérisée du droit humanitaire suscitant de nombreuses réactions au niveau international. La première a été celle de l’Ong WCK, qui, immédiatement, a annoncé la suspension de ses activités à Ghaza, après avoir confirmé l’attaque contre son convoi, sorti la nuit pour rejoindre son entrepôt à Deir Al Balah, ainsi que la nationalité des victimes, australienne, polonaise, britannique, parmi lesquelles certaines avaient la double nationalité, canadienne et américaine.

«J’ai le cœur brisé et je suis consternée que nous, WCK, et le monde ayons perdu de belles vies aujourd’hui à cause d’une attaque ciblée des forces israéliennes», a déclaré la présidente de WCK, Erin Gore, en précisant : «Le convoi a traversé la zone de déconfliction à bord de deux véhicules blindés portant le logo WCK et d’un véhicule à pont souple (…) malgré la coordination avec les forces armées israéliennes, le convoi a été touché alors qu’il quittait un entrepôt.» «C’est une tragédie.

Les travailleurs humanitaires et les civils ne devraient jamais  être pris pour cible. Jamais», a écrit la présidente dans un communiqué diffusé hier. Dans une première déclaration, reprise par les médias de son pays, le Premier ministre de l’Etat hébreu a tout de suite minimisé les actes criminels commis par son armée en affirmant tout bonnement : «Ce genre de choses peuvent arriver dans toutes les guerres.» Des propos qui ont provoqué une avalanche de réactions, avant qu’il ne se ravise, quelques heures plus tard,  en déclarant : «Nos forces armées ont mené une frappe non intentionnelle contre des civils.»

«Les humanitaires étaient des héros»

Un mensonge difficile à faire admettre, notamment aux pays dont sont originaires au moins quatre victimes. Ainsi, le Premier ministre australien, Antony Albanese, a convoqué l’ambassadeur d’Israël  et demandé des explications, alors que son homologue britannique a affirmé avoir «exigé» de Tel-Aviv,  «une enquête urgente et des explications totales et transparentes sur ce qui s’est passé».

La Commissaire onusienne des droits de l’homme en Palestine occupée, Francesca Albanese, n’a pas mis de gants pour accabler l’entité sioniste. « Israël a pilonné une ambassade d’un troisième pays et a tué une équipe d’humanitaires. Il a franchi toutes les lignes rouges sans être punis. Il faut des sanctions et des inculpations », a-t-elle déclaré.

Le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken, a réclamé «une enquête rapide  et impartiale sur cette attaque» au moment où le ministère des Affaires étrangère polonais annonçait que «le ministère public a ouvert une enquête sur l’attaque contre le convoi humanitaire qu’il considère déjà comme une affaire pénale». Le chef de la diplomatie française a, pour sa part, condamné le pilonnage par l’armée israélienne du convoi, et la présidente du Parlement européen a réclamé de son côté une enquête.

Le premier responsable du PAM (Programme mondial de l’alimentation) s’est déclaré «sous le choc» avant d’ajouter : «L’attaque contre le personnel humanitaire est inacceptable.  Leur intégrité et celle de ceux qui reçoivent leur aide est très importante.»  Une condamnation également de l’OMS (Organisation mondiale de la santé) de ce qu’elle a présenté comme une violation du droit humanitaire.

Le chef du Bureau de la coordination des affaires humanitaires a exprimé «sa grande colère» contre ce qu’il a qualifié de «violation du droit humanitaire». Le porte-parole de l’Onu a quant à lui indiqué que le secrétaire général de l’Onu, «confirme la nécessité de respecter les obligations vis-à-vis du droit international, notamment le droit humanitaire».

Le Premier ministre espagnol a exprimé la «colère» de son pays «contre cette attaque qui a ciblé des humanitaires» avant d’ajouter de manière poignante : «Ces humanitaires étaient des héros tandis qu’ils tentaient de nourrir des  personnes souffrant de famine. 

Toutes nos condoléances et notre compassion à leurs familles.» Le ministre des Affaires étrangères de Chypre, d’où les navires de l’Ong prenaient leur départ à destination de Ghaza, a lui aussi condamné, fermement, le pilonnage du convoi humanitaire et rappelé par la même occasion «la nécessité de protéger les humanitaires à Ghaza».

Pour le président de la Commission européenne, «il faut une enquête et la poursuite des auteurs» de ce crime. Avec cette attaque,  Israël ne fait que confirmer son obsession à utiliser la famine comme arme de guerre. D’abord par la campagne qu’il mène contre l’Unrwa, interdisant à son responsable tout accès à Ghaza, tout aussi aux tonnes d’aides bloquées à Rafah, côté égyptien.

L’Etat hébreu a déjà tué plus d’une centaine d’humanitaires et persiste à continuer dans son entreprise de privation de nourriture pour les Palestiniens, en dépit des injonctions qui lui ont été faites par la CIJ (Cour internationale de justice), pour laisser entrer l’aide humanitaire à grande échelle et de la résolution du Conseil de sécurité, qui l’oblige à faire de même. 

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