Le lundi 15 avril 2019, un important incendie s’est déclaré à la Cathédrale de Notre-Dame de Paris, en France, un site exceptionnel classé sur la liste du patrimoine universel. Le sinistre, qualifié de plus grande catastrophe survenue dans ce monument depuis sa construction au XIVe siècle, a soulevé avec insistance la problématique de la protection et de la sauvegarde des sites historiques et archéologiques contre les multiples risques qui les menacent.
Depuis, la question ne cesse de préoccuper experts et spécialistes dans le monde à l’ère des changements climatiques et de la pollution devenant les plus importants facteurs de risque, sans compter les dangers des séismes, des inondations et de l’urbanisation sauvage, mais aussi les actes de vandalisme et de pillage.
Cette préoccupation demeure aujourd’hui un souci majeur pour les pouvoirs publics et les gens du domaine en Algérie, qui figure parmi les pays les plus riches en vestiges historiques et archéologiques en Afrique et dans le monde arabe. Mais en réalité, nos sites et monuments classés sur les listes du patrimoine mondial et national sont-ils suffisamment protégés ?
On est en droit de s’interroger au vu des multiples alertes lancées depuis des années, se multipliant lors de la célébration du Mois du patrimoine, du 18 avril au 18 mai. Le seul mois de l’année durant lequel les Algériens apprennent à découvrir leur patrimoine, pour finir par l’oublier après. Le constat est désormais alarmant, alors que les mesures préventives ne sont pas encore classées parmi les priorités, sans oublier l’inexistence d’une culture patrimoniale au sein de la majorité de la population.
Que se passerait-il si par malheur (même si on ne le souhaite pas) un incendie, comme celui de Notre-Dame de Paris, survienne à cause d’un «méchant» court-circuit électrique, ou d’un départ de feu imprévisible dans l’un des monuments emblématiques à Alger, Oran, Constantine, Sétif, Tlemcen ou d’autres villes de l’Algérie ? Cela fait vraiment peur de l’imaginer, alors pour le vivre, ce sera une autre histoire. Que dire alors de tous ces vestiges laissés à l’abandon, attendant une opération de valorisation, traînant dans les tiroirs faute de financements ?
Les exemples ne manquent guère. Dans la ville de Tébessa, qui compte plus de 60% des vestiges archéologiques de l’Algérie, la situation n’incite pas à l’optimisme. La même topologie prévaut également à Timgad, Sétif, M’sila, Guelma, Oum El Bouaghi, Ouargla et dans les régions éloignées sur le vaste territoire algérien, où tout ce qui représente un pan de l’histoire est pillé, dilapidé et vandalisé, alors qu’il devait être présenté avec fierté aux touristes étrangers. Malheureusement, ce patrimoine est toujours perçu comme des fragments de pierres sans importance.
Que dire alors de La Casbah d’Alger, classée patrimoine mondial depuis 1992, où 80% de ses constructions menacent de tomber en ruine. Le sort de la vieille médina de Constantine, classée patrimoine national en 2005, n’est guère meilleur. Si les pouvoirs publics ont montré leur bonne volonté à travers la révision du système juridique relatif à la protection du patrimoine culturel, il a toujours été difficile de regarder la réalité en face.
Avec les milliers de sites découverts fortuitement lors des travaux d’aménagement, révélant la richesse immense du patrimoine historique algérien, la problématique de la sauvegarde devient plus qu’une urgence. Malheureusement, ils sont rares ces intervenants qui font appel aux archéologues et aux services concernés, et ce sont les bulldozers qui finiront par détruire ce patrimoine enfoui sous le sol, et c’est là le grand danger.