La porosité des frontières, en raison de l’insuffisance et de la désorganisation des moyens locaux de lutte, permet aux groupes terroristes une aisance de mouvement qui leur fait traverser les lignes et prendre refuge dans des sanctuaires naturels protégés.
Immense choc en Ouganda et partout en Afrique. Dans la nuit du 16 au 17 juin, 42 personnes, dont 39 lycéens hébergés à l’internat de l’établissement scolaire où ils suivent leurs cours, ont été tuées dans d’atroces conditions. L’attaque perpétrée dans la localité de Mpondwe-Lhubiriha, située non loin des frontières avec la République démocratique du Congo (RDC), aurait été menée par le groupe des Forces démocratiques alliées (FDA), selon les autorités ougandaises.
La milice, contrairement à ce que peut laisser penser son appellation, a une franche obédience islamo-djihadiste, et ses leaders ont prêté allégeance à la nébuleuse de l’Etat islamique. Selon des témoignages recueillis par la presse sur place, les lycéens ont été surpris dans leur sommeil, brûlés vifs ou achevés à la machette. L’horreur est destinée à provoquer une onde de terreur dans tout le pays et les pays frontaliers. Les terroristes ont, par ailleurs, enlevé six personnes, en fuyant vers le Parc national des Virunga, en territoire congolais.
Selon des analystes, l’acte vise un retentissement qui dépasse les frontières de l’Ouganda en effet, et à souligner un ancrage transfrontalier de l’Etat islamique et de son réseau d’allégeance. Les condamnations internationales n’ont pas tardé. Antonio Guterres, le secrétaire général de l’ONU, a condamné avec force l’attaque et a appelé à la libération immédiate des personnes enlevées.
L’Algérie, à travers un communiqué du ministère des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l’étranger, a pour sa part condamné «énergiquement l’attentat terroriste lâche». Le communiqué réaffirme «la nécessité de renforcer la coopération et la coordination régionales et internationales pour lutter contre le terrorisme sous toutes ses formes et s’employer à tarir ses sources de financement».
Sur place, le gouvernement ougandais, à sa tête le président Yoweri Museveni, s’est engagé à éliminer les responsables de l’attaque. «Leur action – désespérée, lâche, terroriste – ne les sauvera pas», a déclaré le Président, objet d’une contestation interne qu’il tente de contrôler en dirigeant le pays d’une main de fer.
La porosité des frontières, en raison de l’insuffisance et de la désorganisation des moyens locaux de lutte, permet donc aux groupes terroristes une aisance de mouvement qui leur fait traverser les lignes et prendre refuge dans des sanctuaires naturels protégés. Selon le pistage des services de sécurité locaux, cités par l’AFP, les terroristes ont battu retraite vers la vaste réserve naturelle du Virunga, à cheval entre l’Ouganda et le Rwanda.
Les experts font savoir que l’aire naturelle sert de refuge aux miliciens depuis plusieurs années et aucune mobilisation n’a pu jusqu’ici les en déloger. Les rapports des institutions spécialisées alertent de plus en plus ces dernières années sur un déplacement des épicentres mondiaux de l’extrémisme violent vers l’Afrique. Au Sahel, les actes terroristes ont augmenté de 2000% en une dizaine d’années, alors que 50% des décès imputés au terrorisme dans le monde sont déplorés en Afrique subsaharienne.
L’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale, comme on le voit avec l’Ouganda et la RDC, sont certes moins frappées, mais la trajectoire mortifère de développement de foyers terroristes semble être en marche. Les zones de non-droits se multiplient, favorisées par les instabilités et fragilités institutionnelles et la persistance des impasses économiques.