Marché des hydrocarbures : L’Opep accuse l’AIE de diffamer l’industrie pétrolière et gazière

29/11/2023 mis à jour: 08:06
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Une nouvelle controverse secoue le marché pétrolier ces derniers jours - Photo : D. R.

L’Opep et l’AIE se sont affrontées à plusieurs reprises sur des questions telles que les perspectives de demande de pétrole à long terme.

L’Organisation des pays producteurs de pétrole (Opep) accuse, dans une note publiée sur son site internet, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) de diffamer l’industrie pétrolière et gazière, l’accusant d’aggraver la crise climatique en appelant à l’arrêt des investissements dans le secteur, ce qui mettrait, selon l’Opep, la sécurité énergétique en péril et compromet la sécurité des approvisionnements.

L’OPEP accuse également l’AIE de chercher à «restreindre les actions et les choix souverains» des pays en développement, producteurs de pétrole et de gaz, en faisant pression sur leurs compagnies pétrolières nationales.

L’Opep fait référence à un document rendu public jeudi dernier par l’AIE, dans lequel l’organisme économique de l’OCDE estime que l’industrie des combustibles fossiles était confrontée à un «moment de vérité», où les producteurs devaient choisir entre aggraver la crise climatique ou passer à une énergie propre.

Répondant à ces accusations, le secrétaire général de l’OPEP, Haitham Al Ghais, a déclaré : «Il est ironique que l’AIE, une agence qui a régulièrement modifié ses discours et ses prévisions ces dernières années, s’adresse désormais à l’industrie pétrolière et gazière et déclare qu’il s’agit d’un ‘‘moment de la vérité’’.»

La manière dont l’AIE «a malheureusement utilisé ses plateformes de médias sociaux ces derniers jours pour critiquer et instruire l’industrie pétrolière et gazière est pour le moins peu diplomatique. L’OPEP elle-même n’est pas une organisation qui prescrirait aux autres ce qu’ils devraient faire.

Cela vilipende en outre injustement l’industrie, accusée comme étant à l’origine de la crise climatique», regrette le SG de l’Opep. «Dans un monde où davantage de dialogue est nécessaire, pointer du doigt (l’Opep) n’est pas une approche constructive.

Il est important de travailler en collaboration et d’agir avec détermination pour garantir que les émissions soient réduites et que les gens aient accès aux produits et services énergétiques dont ils ont besoin pour mener une vie confortable. Ces deux défis ne devraient pas être incompatibles», a déclaré M. Al Ghais.

«Illusion»

L’Organisation des pays exportateurs de pétrole et l’AIE, basée à Paris, se sont affrontées à plusieurs reprises ces dernières années sur des questions telles que les perspectives de demande de pétrole à long terme et les investissements dans de nouveaux approvisionnements en hydrocarbures. L’année dernière, l’Opep a abandonné l’AIE comme source de données sur le marché pétrolier.

La dernière sortie médiatique de l’AIE survient alors que les Emirats arabes unis (EAU), un important producteur de l’OPEP, se prépare à accueillir la COP28, le sommet de l’ONU sur le climat.

«Malheureusement, le rapport de l’AIE qualifie désormais des technologies de captage, stockage et valorisation du CO2 (CCUS-Carbon Capture, Use and Storage) d’‘‘illusion’’, même si les rapports d’évaluation du groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat approuvent ces technologies comme faisant partie de la solution pour lutter contre le changement climatique», Fait remarquer l’Opep.

Celle-ci répond aux propos de l’AIE, qui estime dans son récent rapport que «l’industrie doit s’engager à véritablement aider le monde à répondre à ses besoins énergétiques et à atteindre ses objectifs climatiques – ce qui signifie abandonner l’illusion selon laquelle des quantités invraisemblables de capture de carbone sont la solution».

L’AIE réplique aux déclarations des Emirats arabes unis – deuxième pays arabe à accueillir le sommet sur le climat après l’Egypte en 2022 – qui avaient appelé, aux côtés d’autres producteurs d’énergie du Golfe, à ce qu’ils considèrent comme une transition énergétique plus réaliste dans laquelle les combustibles fossiles continueraient à jouer un rôle dans la sécurisation des approvisionnements énergétiques tandis que les industries se décarboneraient.

«La sécurité énergétique, l’accès à l’énergie et l’abordabilité de l’énergie pour tous doivent aller de pair avec la réduction des émissions à effet de serre. Cela nécessite des investissements majeurs dans toutes les énergies, toutes les technologies, ainsi qu’une compréhension des besoins de tous les peuples.

A l’OPEP, nous répétons que nous pensons que le monde doit se concentrer sur la réduction des émissions, et non sur le choix des sources d’énergie», a souligné pour sa part le SG de l’Opep dans une longue réponse aux accusations de l’AIE.

«Cette industrie se tourne vers les énergies renouvelables, avec des investissements majeurs, et investit dans des technologies visant à réduire les émissions, telles que le CCUS, le captage direct de l’air, l’élimination du dioxyde de carbone et l’hydrogène propre. En fait, certains pays membres de l’OPEP sont des leaders mondiaux à cet égard», ajoute l’Opep.

Le secrétaire général de l’Opep estime que s’il y a un «moment de vérité» à venir, tel que préconise l’AIE, «nous devons comprendre que tous les pays ont leur propre voie de transition énergétique ordonnée, nous devons avoir l’assurance que toutes les voix sont entendues, et pas seulement quelques-unes, et nous devons garantir que les transitions énergétiques permettent la croissance économique, améliorent la mobilité sociale et favorisent l’accès à l’énergie, et réduire les émissions à effet de serre en même temps».

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