L’Unicef alerte sur la détresse des mineurs palestiniens : 17 000 enfants livrés à leur sort à Ghaza

03/02/2024 mis à jour: 00:58
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Photo : D. R.

 Jonathan Crickx, porte-parole de l’Unicef dans les Territoires palestiniens occupés, affirme que des milliers d’enfants palestiniens «sont non accompagnés ou séparés de leur famille» dans la Bande de Ghaza, et que la quasi-totalité des mineurs issus de l’enclave dévastée ont besoin de soutien psychologique.

C’est l’une des conséquences les plus dramatiques des crimes de masse israéliens à Ghaza : un grand nombre d’enfants se retrouvent orphelins, sans famille, ayant perdu leurs parents et parfois aussi leur fratrie dans les bombardements. Dans bien des situations, on a vu en effet des familles entières décimées après des raids intenses, et seul un petit gamin ou une petite fille survivaient miraculeusement au massacre.

Parfois, au-delà du noyau familial, même les grands-parents et la famille élargie, les oncles, les tantes, les cousins, périssaient dans les frappes. Dans d’autres scénarios, des parents se trouvent contraints de confier leurs enfants à des proches pour les mettre à l’abri ; des proches qui sont eux-mêmes démunis et sans défense. Ceci sans oublier que la majorité des victimes des tueries sionistes, comme le rappellent régulièrement les autorités palestiniennes, sont des femmes et des mineurs.

D’après l’Unicef, pas moins de 17 000 enfants sont livrés à leur sort dans la Bande de Ghaza. «Nos estimations indiquent que 17 000 enfants à Ghaza sont non accompagnés ou séparés de leur famille», a déclaré, en effet, ce vendredi 2 février Jonathan Crickx, directeur de la communication au bureau de l’Unicef en Palestine au cours d’un point de presse du staff des Nations unies à Genève.

Ce chiffre «correspond à environ 1% pour l’ensemble de la population déplacée (1,7 million)», a précisé Jonathan Crickx, qui intervenait en visioconférence depuis Jérusalem. D’après le porte-parole de l’Unicef-Palestine, «il est ‘extrêmement difficile’ de retrouver la trace de ses enfants, car parfois ‘ils ne peuvent même pas dire leur nom», lorsqu’ils arrivent dans les hôpitaux, blessés ou en état de choc», rapporte l’AFP.

«Lors des conflits, les enfants qui se retrouvent sans leurs parents sont souvent pris en charge par d’autres proches. Mais actuellement à Ghaza, où la population manque de nourriture, d’eau et d’abri, ‘ces familles élargies ont elles-mêmes du mal à subvenir aux besoins de leurs propres enfants et de leur famille.»

95 massacres commis depuis l’arrêt de la CIJ

Jonathan Crickx explique que ces pauvres petits qui sont profondément traumatisés par la violence insoutenable qu’ils subissent «présentent des symptômes tels que des niveaux extrêmement élevés d’anxiété persistante, une perte d’appétit.

Ils ne peuvent pas dormir, ils ont des crises émotionnelles ou ils sont pris de panique chaque fois qu’ils entendent un bombardement». Et de relever : «Avant cette guerre, l’Unicef estimait déjà que 500 000 enfants à Ghaza avaient besoin d’un soutien psychosocial. Aujourd’hui, nous estimons que presque tous les enfants ont besoin de ce soutien, soit plus d’un million d’enfants.»

De son côté, le patron de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, est revenu à la charge quant à la détresse humanitaire de la population civile de Ghaza. «Plus de 100 000 Ghazaouis sont morts, blessés ou portés disparus et présumés morts. Le risque de famine est élevé et augmente chaque jour.

Nous continuons de réclamer un accès sûr au personnel et aux fournitures humanitaires. Nous continuons d’exiger la libération des otages. Nous continuons d’exiger que les centres de soins de santé soient protégés et non attaqués ou militarisés. Nous continuons d’appeler à un cessez-le-feu», a-t-il martelé jeudi via la plateforme X.

Et tandis que les espoirs d’une trêve renaissent à la faveur des efforts diplomatiques des Etats-Unis, de l’Egypte et du Qatar, et dans l’attente de la réponse de la direction politique du mouvement Hamas, les bombardements s’intensifient sur Khan Younès. D’après le ministère de la Santé à Ghaza, 13 massacres ont été commis en vingt-quatre heures, soit entre jeudi soir et vendredi matin, dans l’enclave martyrisée, faisant 112 morts et 148 blessés.

Ces nouvelles victimes portent à 27 131 morts et  66 287 blessés le bilan humain de la guerre féroce que mène Israël depuis 119 jours contre Ghaza. L’agence d’information palestinienne Wafa nous apprend par ailleurs, en citant des sources médicales, que «l’occupant israélien a commis 95 massacres depuis l’arrêt rendu par la Cour internationale de justice, faisant 936 morts et 1652 blessés».

Les frappes israéliennes continuent à cibler massivement les secteurs sud de la Bande de Ghaza. L’aviation de l’occupant a mené plusieurs raids meurtriers dans la nuit de jeudi à vendredi sur les gouvernorats de Khan Younès et de Rafah.

Et ces attaques se sont poursuivies tout au long de la journée d’hier. Selon Al Jazeera, 15 civils ont trouvé la mort hier après-midi dans les bombardements de Khan Younès. Les victimes ont été transférées vers l’hôpital Nasser et l’hôpital El Amal qui restent toujours encerclés par les soldats sionistes.

Les troupes israéliennes se retirent du nord

L’agence Wafa indique que «5 martyrs ont été inhumés dans la cour de l’hôpital El Amal affilié au Croissant-Rouge palestinien à Khan Younès». En tout, 15 morts ont dû être enterrés dans ce même établissement hospitalier, souligne la même source. Wafa fait savoir par ailleurs que «des citoyens ont extirpé les corps de 12 chouhada de la famille Cherab qui étaient ensevelis sous les décombres de leur maison à Khan Younès bombardée il y a quelques semaines».

A Khan  Younès toujours, une Palestinienne a été tuée et plusieurs personnes ont été blessées dans une attaque sur une école abritant des déplacés à l’ouest de la ville sudiste. Treize civils ont en outre été blessés dans une frappe contre une maison près des locaux du Croissant-Rouge palestinien.

A Rafah, quatre personnes ont péri dans le bombardement d’une maison appartenant à la famille Al Diri, à Haï Annasr, à l’est de la ville. Et au centre de la Bande de Ghaza, une équipe du Croissant-Rouge palestinien a récupéré les corps de six martyrs au camp d’El Bureij en coordination avec les Nations unies. Ils ont été transférés vers l’hôpital Chouhada Al Aqsa à Deir El Balah.

Il est utile de s’arrêter sur cette info d’importance : les troupes israéliennes se sont retirées, jeudi dernier, du nord-ouest du gouvernorat de Ghaza et du nord de la Bande de Ghaza, ont annoncé plusieurs médias. «L’armée israélienne s’est retirée ce jeudi des zones du nord-ouest des gouvernorats de Ghaza et du nord de l’enclave, et ce, pour la première fois depuis le début de son offensive militaire terrestre le 27 octobre 2023», rapportait jeudi l’agence Anadolu.

L’agence turque ajoute que l’armée sioniste s’est retirée «des zones dans lesquelles elle avait pénétré dans la région occidentale du gouvernorat du nord de la Bande de Ghaza qui inclut les quartiers d’Al Tawam, d’Al Karama et l’avenue Al Rashid».

«L’armée s’est également retirée des quartiers résidentiels situés dans les zones nord-ouest du gouvernorat de Ghaza, à savoir la Sécurité générale, Al-Maqoussi, Tours des renseignements, Bahloul et l’avenue Al-Rashid.» «Quelques heures après le retrait, les habitants de ces zones sont allés inspecter leurs maisons et leurs biens, qu’ils ont été obligés de quitter au début de la guerre contre la Bande de Ghaza.»

L’agence rappelle que «depuis la mi-décembre, l’armée a entamé son retrait progressif des zones du gouvernorat du Nord, suivi début janvier par des retraits partiels des quartiers et des zones du gouvernorat de Ghaza».

Sur les sites d’où les soldats israéliens ont décampé, c’est l’effroi. Dans la ville de Ghaza, «des citoyens ont exhumé des corps en décomposition après le retrait des forces de l’occupant des lieux», indique Wafa, avant d’ajouter : «Des images et des vidéos diffusées par des journalistes et des citoyens ont montré les effets de la destruction d’une ampleur inédite laissés par l’occupant israélien dans un certain nombre de quartiers à Ghaza.»

Rafah au bord de l’explosion

Comme nous le disions, l’armée israélienne concentre ses attaques sur le sud du territoire, obligeant les civils à chercher encore un autre endroit sûr où s’abriter des raids aveugles. L’ONU affirme que 184 000 Palestiniens de la région se sont inscrits «pour demander une aide humanitaire après avoir été contraints de quitter la partie ouest de la ville de Khan Younès où se concentrent les opérations militaires israéliennes», signale l’AFP.

Des flux massifs de déplacés sont désormais concentrés à Rafah, aux frontières fermées avec l’Egypte. D’après l’ONU, plus de 1,3 million d’habitants sur les 2,4 millions d’âmes de la Bande de Ghaza se sont réfugiés à Rafah dans des conditions épouvantables.

Ils sont «menacés en plein hiver par la famine et les épidémies» note l’AFP. «Les tentes et les bâches en plastique qui ont envahi par milliers les rues de la ville surpeuplée ont encore été inondées vendredi par des pluies diluviennes.»

«La plupart vivent dans des abris de fortune, des tentes ou à l’air libre. Rafah est une usine à désespoir et nous craignons ce qui va se passer ensuite», a alerté Jens Laerke, un porte-parole du bureau de coordination des Affaires humanitaires (Ocha) de l’ONU, cité par l’agence de presse française.

Alors que la catastrophe humanitaire ne fait qu’empirer de jour en jour, les efforts de médiation pour essayer de sceller une trêve entre Palestiniens et Israéliens donnent quelques signes d’espoir. Pour rappel, dimanche dernier, une réunion s’est tenue à Paris entre le chef de la CIA William Burns, les responsables du renseignement égyptien et israélien ainsi que le Premier ministre qatari, et une proposition a émané de ces tractations.

«Selon une source du Hamas, la proposition porte sur trois phases, dont la première prévoit une trêve de six semaines durant laquelle Israël devra libérer entre 200 et 300 prisonniers palestiniens en échange de 35 à 40 otages détenus à Ghaza, et 200 à 300 camions d’aide pourront entrer chaque jour dans le territoire palestinien» détaille l’AFP.

Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères du Qatar, Majed Al Ansari, a assuré jeudi que cette proposition a été «approuvée par la partie israélienne». «Nous avons maintenant une première confirmation positive de la part du Hamas» a-t-il assuré dans la foulée, espérant dans le même temps que «dans les deux prochaines semaines, nous serons en mesure de partager de bonnes nouvelles à ce sujet».

Cet enthousiasme a été vite refroidi par un cadre du Hamas qui affirmera à l’AFP que la déclaration du Qatar était «précipitée et fausse». Il faudra donc attendre l’issue des discussions entre le chef du bureau politique de Hamas, Ismaïl Haniyeh, et les autorités égyptiennes, au Caire, pour connaître la réponse du mouvement de résistance palestinien. 

 

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