Alors que l’Europe cherche les moyens de se défaire de sa dépendance au gaz russe, dans le sillage de la crise ukrainienne, les prix du gaz naturel américain censé répondre en partie à la demande énergétique du vieux continent s’envolent, en raison de fortes exportations et de faibles stocks.
Les Etats-Unis avaient fait part de leur intention d’augmenter leurs exportations de gaz vers l’UE de 66% pour l’aider à rompre avec la Russie, les cours du gaz ont augmenté de plus de 170% en un an et ils s’échangent désormais à près de 8 dollars, alors qu’en février, il s’échangeait à 4 dollars par MMBtu (équivalent à 28 m3) Le gaz naturel américain a atteint ainsi son plus haut niveau en 13 ans, dépassant brièvement les 8 dollars pour la première fois depuis 2008, en raison de la crise de l’approvisionnement mondial. Le prix de référence du gaz naturel américain se maintient à plus de 7 dollars le million d’unités thermiques britanniques (MMBtu) sur l’Henry Hub. C’est plus du double du prix de l’indice de référence américain par rapport au début de cette année.
La semaine dernière, les prix du gaz naturel aux Etats-Unis avaient déjà enregistré un record depuis 2008 à 7,3 dollars le MMBtu. Le rallye du gaz a été motivé, selon Bloomberg, par «une crise mondiale du carburant qui se répercute sur les marchés, alors que les fournisseurs luttent pour faire face à une augmentation de la consommation post-pandémique, encore exacerbée par la guerre de la Russie en Ukraine. Alors que les prix du gaz aux Etats-Unis sont restés bien inférieurs aux taux en Europe et en Asie grâce à une abondance de champs de schiste, cette décote a diminué». Le média indique que «les stocks souterrains sont inférieurs à la normale pour cette période de l’année et les Etats-Unis exportent chaque molécule de gaz naturel liquéfié possible pour aider l’Europe à réduire sa dépendance à l’approvisionnement énergétique russe.
Dans le même temps, la production reste inférieure aux niveaux d’avant la pandémie, malgré les prévisions gouvernementales prévoyant une production record du bassin permien ce printemps».
Les stocks restent inférieurs de près de 18% à la normale, tandis que des températures inférieures à la normale sont attendues dans certaines parties du nord des Etats-Unis du 25 avril au 1er mai. Cela pourrait augmenter la demande de combustible de chauffage et de centrale électrique, détournant l’approvisionnement qui va normalement au stockage, pendant cette période de l’année. Une pénurie de charbon aux Etats-Unis a également contribué à alimenter le rallye du gaz, limitant la capacité des générateurs d’électricité à changer de carburant.
La situation du marché américain inquiète en Europe. Ainsi, en Espagne la presse rapporte des inquiétudes quant à la hausse des prix du gaz aux Etats-Unis, alors que le pays du sud de l’Europe se fournit de plus en plus en GNL américain.
L’escalade des prix complique la situation en Europe
«L’escalade du prix des contrats à terme sur le gaz américain complique encore la situation en Europe et en Espagne en raison de leur forte dépendance énergétique vis-à-vis de la Russie, dans un cas, et de l’Algérie, dans l’autre. Les compagnies nationales de gaz sont désormais confrontées à une augmentation du gaz en provenance d’Algérie, puisque les autorités du pays africain veulent répondre à la demande de Naturgy de baisser les prix d’achat en 2020, lorsque la pandémie a fait chuter les prix du gaz et que l’Algérie a accepté de réduire les prix du gaz aux Espagnols», écrit le journal OK Diario.
Cette hausse aura sa conséquence évidente pour l’Espagne. Maintenant qu’elle dépend du gaz nord-américain pour couvrir près de la moitié de sa demande, les prix grimpent à des chiffres inconnus. L’accord que les Etats-Unis et la Commission européenne ont signé il y a trois semaines comprenait l’engagement nord-américain d’inonder l’Europe de gaz, mais aussi que «la formule de tarification devrait refléter les fondamentaux du marché à long terme et inclure le prix du gaz naturel Henry Hub», selon le communiqué publié par les deux parties en mars, répercuté par le média espagnol. Celui-ci avertit que «le scénario n’est pas positif pour l’Espagne.
Alors que l’Algérie pousse à la hausse des prix et signe des accords avec l’Italie pour en faire un partenaire privilégié, l’alternative, le gaz en provenance des Etats-Unis, s’envole à des prix records. Et le tout avec la négociation de plus en plus difficile entre l’Espagne et le Portugal et la Commission européenne pour leur permettre de limiter le prix du gaz à 30 euros et de pouvoir couper l’électricité de moitié sur le marché de gros», conclut le journal.