Législatives du 17 décembre en Tunisie : Un nouveau mode de scrutin pour mettre fin à la domination des islamistes

11/04/2022 mis à jour: 06:37
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Le bras de fer entre le président Saïed et Rachid Ghannouchi risque de se poursuivre pendant encore longtemps

Les premiers résultats de la consultation populaire, organisée du 15 janvier au 20 mars derniers, ont conforté l’option de scrutin uninominal, longtemps défendu par le président Saïed. Les résultats ont montré que 70,7% des réponses ont choisi ce mode contre 21,8% pour un scrutin de listes. Lequel résultat a fait que le président tunisien parle depuis d’un nouveau modèle de scrutin et d’élections qui vont aboutir à un Parlement représentatif des Tunisiens, «pas comme les précédents», ne cesse-t-il d’assurer. 

La consultation populaire a vu la participation de 534 915 Tunisiens, soit un échantillon non négligeable, puisqu’ils représentent près de 10% des électeurs potentiels. «Le nombre est suffisant puisque la consultation est juste appelée à orienter les questions du référendum ; elle n’a pas d’aspect décisionnel», explique le professeur Amine Mahfoudh, l’un des experts constitutionnalistes de la sphère présidentielle, pressenti pour appartenir à la commission qui va synthétiser les résultats de la consultation et en faire ressortir les questions du référendum du 25 juillet. Il y a donc une orientation vers un scrutin uninominal, aux dépens du scrutin de listes ; tendance devant être confirmée lors du référendum du 25 juillet. Il y a également 86,4% favorables au régime présidentiel et 70,4% pour l’Etat de droit. 

Les résultats de la consultation présentent toutefois un hic pour le professeur Mahfoudh, réticent sur certaines questions, comme le retrait de la délégation populaire. «Nous avons convenu, moi et mes deux collègues, Pr Belaïd et Ben Moussa, de nous retirer si jamais la question du retrait de la délégation est soumise», ajoute-t-il. Le retrait de la délégation signifie autoriser les électeurs à retirer leur confiance à l’élu en cours du mandat. 

Pour le constitutionnaliste, «le retrait de la délégation est une source de désordre ; on peut l’éviter en écourtant les mandats électoraux». Or, plus de 90% des réponses de la consultation populaire ont opté pour ledit retrait de la délégation. C’est ce qui explique, semble-t-il, la réticence à faire paraître la composition de la commission devant aider à écrire les questions du référendum.

En marche

Près de neuf mois se sont écoulés depuis le coup de force du 25 juillet 2021 du président tunisien, Kaïs Saïed ; les faits confirment désormais qu’il est le seul maître à bord en Tunisie et que la majorité écrasante des citoyens ne s’attache, pas du tout, ni au Parlement dissous ni à la classe politique chassée du pouvoir. 

Même le petit sursaut du 30 mars dernier du Parlement gelé, avec sa plénière tenue à distance, n’a eu pour effet que d’offrir une opportunité au président Saïed pour dissoudre ladite instance, en se basant sur l’article 72 de la Constitution, puisqu’il y a eu tentative d’atteinte à l’unité de l’Etat. 

Saïed a, par ailleurs, saisi au vol la même action pour écarter les «putschistes» du dialogue national attendu, alors qu’il n’avait pas trouvé auparavant d’argument valable pour justifier leur exclusion. 

Saïed a assuré que «le prochain Parlement traduira la volonté du peuple, à l’opposé des précédents». Il a souligné que «le scrutin adoptera un nouveau mode électoral, en harmonie avec les choix exprimés lors de la dernière consultation nationale». Il a insisté sur le fait que «la Tunisie n’a de leçons à recevoir de personne et qu’il y aura un dialogue où les putschistes seront exclus». Il est à rappeler que le président tunisien a déjà assuré, lors de précédentes déclarations, que «les prochaines élections législatives du 17 décembre 2022 se feront selon un scrutin uninominal». 

Toutefois, on attend toujours la désignation de la commission d’experts qui va traduire les résultats de la consultation nationale en question pour le prochain référendum, qui se tiendra le 25 juillet prochain. On attend également les acteurs du dialogue national annoncé. Les centrales syndicales, l’UGTT et l’Utica, ainsi que l’Ordre des avocats, La Ligue tunisienne des droits de l’homme (LTDH), l’Union nationale de la femme (UNFT) et l’Organisation tunisienne des femmes démocrates (OTFD) seront de la partie pour avoir été déjà reçues par le président Saïed. Mais le chemin est encore semé d’embûches. Toutes ces composantes sont loin de parler des langages similaires.

Tunis
De notre correspondant  Mourad Sellami

Plus d’un millier de manifestants protestent contre le président Saïed

Plus d’un millier de manifestants, dont une majorité de partisans du parti d’inspiration islamiste Ennahdha, se sont rassemblés hier au centre de Tunis pour protester de nouveau contre la politique du président Kaïs Saïed, qui a récemment dissous le Parlement. «Dégage», «Le peuple veut destituer le Président», «A bas le coup d’Etat», «Constitution, travail et dignité», ont notamment scandé les protestataires, rassemblés à l’appel du parti Ennahdha et du mouvement Citoyens contre le coup d’Etat, ont constaté des journalistes de l’AFP. Les manifestants, dont aussi plusieurs figures de gauche, ont dénoncé la dissolution du Parlement décidée le 30 mars par Kaïs Saïed, estimant qu’«il n’y a pas de démocratie sans un pouvoir législatif». Le ministère de l’Intérieur avait déployé un dispositif policier massif à grand renfort de barrières métalliques et d’unités antiémeute pour contrôler cette manifestation. Les opposants de M. Saïed, qui ont organisé plusieurs manifestations ces derniers mois pour dénoncer sa politique, qualifient de «coup d’Etat» son accaparement de tous les pouvoirs depuis le 25 juillet. Après des mois de blocage politique, M. Saïed, élu fin 2019, s’est arrogé à cette date les pleins pouvoirs, en limogeant le Premier ministre et en suspendant le Parlement dominé par le parti d’inspiration islamiste Ennahdha, sa bête noire. AFP

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