Cinq jours avant sa diffusion prévue sur France 5, le documentaire-évènement Algérie, Sections armes spéciales a été retiré de l’antenne.
Le film de 52 minutes, fruit de l’enquête de l’historien Christophe Lafaye et de la documentariste Claire Billet, abordait un sujet de l’utilisation d’armes chimiques par la France pendant la guerre de Libération nationale. Alors que le voile devait enfin été levé sur un secret défense enfoui depuis plus de soixante ans, la chaîne publique française en a décidé autrement.
Devant le tollé provoqué, France télévisions est revenue sur sa décision, en choisissant de rendre le documentaire accessibles ur la plateforme de streaming france.tv. Dans un communiqué, France télévisions a justifié cette déprogrammation par la nécessité de consacrer la soirée du 16 mars à des documentaires liés à l'actualité internationale, notamment les tensions entre les Etats-Unis et la Russie. Ainsi, les spectateurs verront à la place Opération Trump, les espions russes à la conquête de l'Amérique et Russie, un peuple qui marche au pas.
Pourtant, en pleine crise diplomatique entre Alger et Paris, le documentaire en question était également d’une brûlante actualité. La presse française s’interroge d’autant que la production Syrie : la chute du clan Assad, initialement prévue avant le documentaire sur l’Algérie, a rapidement été reprogrammée au 23 mars, tandis que le film Algérie, Sections armes spéciales demeure sans date de diffusion. La question du contexte diplomatique tendu entre la France et l’Algérie pourrait, à lire les commentaires, peser dans la balance.
Difficultés d’accès aux archives
Il est à préciser, à propos, que cela fait plusieurs mois que les débats sur les crimes coloniaux ont refait surface, attisés par des polémiques comme celle liée aux propos du journaliste Jean-Michel Apathie sur les crimes français en Algérie. L’historien Christophe Lafaye, qui a collaboré à ce film, confiait récemment toute la difficulté en France d’évoquer ces questions. «Les difficultés d’accès aux archives et la frilosité des institutions ont rendu l’enquête complexe», affirmait-il.
Dans ce film, qui a été diffusé il y a quelques jours sur la chaîne suisse RTS, la réalisatrice Claire Billet dévoile l’ampleur et le contexte de ces opérations à travers des documents d’archives et des interviews d’experts en armes nucléaires, biologiques et chimiques. L’enquête révèle que ces armes ont été testées, ordonnées et utilisées à grande échelle, en dépit des lois et des conventions internationales.
La réalisatrice raconte son parcours semé d’embûches pour retrouver des traces de ces événements.
Peu de documents officiels subsistent, et les archives militaires restent largement inaccessibles.
Pourtant, grâce aux témoignages vivants et aux archives nationales d’Outre-Mer, le film, dont la production exécutive a été menée en Algérie par Thala Prod, parvient à reconstituer la réalité de cette guerre chimique et à mettre en lumière les silences qui l’entourent.