La plus jeune victime recensée est un nourrisson âgé d’à peine un jour, et la plus âgée, une femme de 97 ans.
Le dernier rapport du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme (HCDH), publié vendredi, révèle l’ampleur tragique de la guerre en cours dans la bande de Ghaza. Selon ce document, 44% des victimes sont des enfants, certains si jeunes qu’ils n’avaient vécu qu’une poignée d’heures.
Ces chiffres glaçants témoignent de l'horreur et la barbarie de infligée aux Palestiniens de Ghaza piégés dans une enclave déjà frappée par des années de blocus. La plus jeune victime recensée est un nourrisson âgé d’à peine un jour, et la plus âgée, une femme de 97 ans. Face à ces chiffres, Volker Turk, Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme, a fermement dénoncé ce qu’il qualifie de «mépris flagrant» pour la vie civile. Selon lui, la guerre menée par Israel ne respecte plus les «règles conçues pour limiter et prévenir la souffrance humaine en temps de conflit armé». Turk exhorte Israël à respecter ses obligations internationales.
Pourtant, l’État sioniste, fort de l’impunité dont il jouit, maintient un état de siège rigoureux sur le nord de Ghaza, aggravant une situation humanitaire déjà désastreuse en coupant l’accès à l’aide essentielle. Dans ce rapport, le HCDH souligne que près de 70% des décès confirmés sont ceux de femmes et d’enfants, pris au piège dans un des territoires les plus densément peuplés au monde. L’usage par l’armée d’occupation israélienne d’armements ayant un large impact dans des zones urbaines densifiées est également mis en cause : dans 88% des attaques documentées, cinq victimes ou plus ont perdu la vie dans un même assaut, soulignant l’effet de masse de ces frappes.
Ce bilan lourd soulève des questions fondamentales quant à la légitimité et la légalité des de cette offensive militaires. Le rapport du HCDH n’hésite pas à évoquer la possibilité que ces actions relèvent de crimes contre l’humanité, et alerte sur le fait que, si elles sont commises avec l’intention de détruire une communauté en tout ou en partie, elles pourraient être qualifiées de génocide. Cette perspective a des implications graves pour la communauté internationale et les institutions de justice, qui devront évaluer ces accusations.
Le gouvernement israélien, de son côté, a rejeté catégoriquement le rapport, l’accusant de s’appuyer sur des informations non vérifiées. Les données rapportées par les Nations unies s’appuient pourtant sur une vérification méticuleuse des chiffres disponibles depuis le 7 octobre 2023. Sur environ 10 000 cas vérifiés pour un total de 34 500 personnes tuées entre novembre 2023 et avril 2024, «nous avons jusqu’à présent constaté que près de 70 pour cent étaient des enfants et des femmes», a déclaré Ajith Sunghay, responsable des activités du bureau des droits de l’homme de l’ONU dans les territoires palestiniens.
Le «black-out» de l’information
Pour l’affirmer, Ajith Sunghay souligne la méthodologie rigoureuse de vérification du Haut-Commissariat, qui exige au moins trois sources distinctes.«Nous pensons que cela est représentatif de la répartition du nombre total de morts. Une proportion similaire à celle donnée par les autorités de Ghaza», a souligné auprès de l’AFP Ravina Shamdasani, porte-parole du Haut-Commissariat.
Parmi les décès vérifiés, 4700 étaient des enfants
et 2461 étaient des femmes. Au-delà des meurtres perpétrés par Israël, une autre bataille se joue : celle de l’information. Les journalistes travaillant à Ghaza, en particulier dans le nord de l’enclave, sont pris pour cible dans ce que l’on pourrait qualifier de black-out organisé. Selon Reporters Sans Frontières (RSF), Israël compromet activement le travail des journalistes en leur rendant l’exercice de leur métier presque impossible.
Cette stratégie étouffe les récits de première main et empêche ainsi le monde de connaître la vérité sur les conditions déplorables des habitants de l’enclave. Les coupures répétées d’électricité et d’Internet dans ces zones compliquent encore davantage la couverture des événements, et les journalistes qui persistent à exercer leur métier le font dans des conditions insoutenables. «J’ai peur dès que je commence à filmer», confie à RSF un journaliste encore présent dans le nord de Ghaza.
Depuis le début de la guerre, plus de 140 journalistes ont été tués dans la bande de Ghaza, dont au moins 39 alors qu’ils exerçaient leur mission d’information. Face à cette situation, RSF a intensifié ses efforts en créant un centre au Liban pour soutenir les journalistes de la région, en leur offrant un soutien matériel et psychologique.
«A Ghaza, les autorités israéliennes s’obstinent à rendre les conditions du journalisme impossible, et ce d’une manière plus offensive encore au nord du territoire, empêchant, de fait, toute image et toute voix qui pourraient rendre compte de la guerre en cours et des conditions humanitaires effroyables imposées à la population. Israël compromet ainsi le travail de la justice qui se base, en partie, sur les témoignages des victimes civiles consignés par les journalistes.
Cet état de siège sur l’information est intolérable», écrit l’organisation dans un communiqué. L’enjeu va bien au-delà de Ghaza : le monde est témoin d’un drame dont il ne peut détourner les yeux sans compromettre l’intégrité même de la communauté internationale. Les images, les récits, et les témoignages des journalistes sont indispensables pour documenter et juger de la légitimité des actes commis en temps de guerre. RSF a déjà déposé plusieurs plaintes auprès de la Cour pénale internationale pour crimes de guerre.