Même si beaucoup s’attendaient à ce que le président américain, Donald Trump, contourne l’invalidation par les démocrate au Sénat de la loi portant sur des sanctions contre la Cour pénale internationale (CPI), à travers un décret exécutif, la signature de ce dernier, dans la nuit de jeudi à hier, et la déclaration «d’urgence nationale pour répondre à la menace posée par les efforts de la CPI» ont fait l’effet d’une bombe et suscité des réactions virulentes, y compris parmi les plus puissants des alliés de Washington.
Ce décret l’autorise à imposer des sanctions économiques agressives contre la juridiction, pour avoir émis des mandats d’arrêt contre le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahu et son ancien ministre de la Défense, Yoav Gallant, des actions qu’il a qualifiées d'«illégitimes et sans fondement, visant l’Amérique et notre allié Israël».
Il lui donne aussi de larges prérogatives,qui lui permettent de «geler les avoirs» des fonctionnaires de la CPI, d’imposer à ces derniers ainsi qu’aux membres de leurs familles des «interdictions de voyage», s’ils «sont impliqués dans des efforts visant à enquêter sur des citoyens des Etats-Unis et de certains alliés ou à les poursuivre».
Dans ce décret, la CPI est accusée d’avoir «abusé de son pouvoir» en émettant des mandats «qui créent un précédent dangereux» et «mettent en danger les citoyens américains et leur personnel militaire». Bien plus. Le président américain affirme que «la CPI n’a aucune juridiction sur les Etats-Unis ou Israël» et l’accuse d’avoir «créé un précédent dangereux» avec ses actions contre les deux pays (…) Cette conduite malveillante «menace à son tour de porter atteinte à la souveraineté des Etats-Unis et porte atteinte au travail essentiel de sécurité nationale et de politique étrangère du gouvernement des Etats-Unis et de nos alliés, y compris Israël».
Israël et la Hongrie, premiers soutiens aux sanctions
De ce fait, le président américain averti la Cour qu’elle devrait «respecter la décision des pays à de ne pas soumettre leur personnel à la juridiction de la CPI». La première réaction est celle du Premier ministre israélien, encore à Washington pour une visite qui a débuté dimanche et s’achèvera aujourd’hui.
Dans une déclaration diffusée sur son compte X, il a écrit : «Merci président Trump pour votre audacieux décret sur la CPI. Il défendra l’Amérique et Israël contre cette Cour corrompue, anti-américaine et antisémite, qui n’a aucune compétence ni aucune base pour se lancer dans une guerre juridique contre nous.» Lui emboîtant le pas, son homologue hongrois, Viktor Orban, a également exprimé son soutien à la décision de Trump en écrivant sur son compte X : «Il est temps que la Hongrie réexamine ce que nous faisons dans une organisation internationale qui est sous sanctions américaines !
De nouveaux vents soufflent sur la politique internationale. Nous appelons cela la tornade Trump.» Trump n’a pas manqué de répliquer, pour apporter quelques précisions sur le contenu de son décret signé 48 heures après sa réunion avec Netanyahu. «Les Etats-Unis imposeront des conséquences tangibles et significatives aux responsables des transgressions de la CPI, en bloquant les biens et les avoirs et en suspendant l'entrée aux Etats-Unis des responsables de la CPI et des membres de leurs familles.» Les fonctionnaires de la CPI s’attendaient à une telle décision.
En alerte, ils ont passé la nuit de jeudi à hier à attendre le contenu du décret, la teneur des sanctions et le personnel ciblé. Ils savaient que Trump n’allait pas abandonner l’objectif qu'il s’est assigné, lors de son premier mandat, lorsqu’il a promulgué la même loi, appelée «Loi d’invasion de La Haye», qui prévoyait les mêmes sanctions dont a fait l’objet, d’ailleurs, l’ancienne procureure en chef, la Gambienne Fattou Bensouda, et certains de ses collègues, pour avoir enquêté sur les crimes de guerre commis en Afghanistan par des soldats américains et en Palestine, avant qu’elle ne soit abrogée, en 2020, par l’administration Biden.
Selon des «confidences» de certains magistrats de la juridiction, après l’émission des mandats d’arrêt contre les dirigeants israéliens, la Cour s’était «préparée à des mesures de représailles de la part de l’administration Trump». Elle avait «pris des mesures proactives pour protéger ses employés d’éventuelles sanctions américaines, en versant trois mois de salaire à l’avance et en se préparant à des restrictions financières qui pourraient entraver son travail».
La CPI affirme son engagement à poursuivre son travail
En décembre 2024, la présidente de la Cour, lors d’une assemblée générale de ses 125 Etats membres, la juge Tomoko Akane a averti que les sanctions américaines pourraient «compromettre le fonctionnement de la Cour dans tous les cas et mettre en péril son existence même».
Dans son communiqué diffusé hier, la CPI a condamné les mesures de Trump, en affirmant que son décret exécutif «vise à imposer des sanctions à ses fonctionnaires et à nuire à son travail judiciaire indépendant et impartial».
Elle a exprimé son «ferme soutien» à son personnel et son «engagement à continuer de rendre justice et d’apporter de l’espoir à des millions de victimes innocentes d’atrocités à travers le monde, dans toutes les situations dont elle est saisie».
Dans le communiqué, la CPI a exhorté ces «125 Etats parties, la société civile et toutes les nations du monde à s’unir pour la justice et les droits humains fondamentaux».
Pour le journal britannique The Guardian, citant des sources de la CPI sans les nommer, a affirmé que les fonctionnaires de cette juridiction «craignent que les sanctions puissent constituer une menace existentielle pour l'organe judiciaire, créé en 2002 et qui compte 125 Etats membres ayant ratifié son statut fondateur», ajoutant : «Plusieurs sources de la CPI ont déclaré le mois dernier que des sanctions contre de hauts responsables de la Cour seraient difficiles mais gérables, et que des sanctions à l'échelle de l'institution constitueraient une menace existentielle pour l'organe judiciaire, car elles bloqueraient son accès aux services dont il dépend pour fonctionner.»
Pour le média, le décret de Trump «suggère que les USA cibleront des individus spécifiques répertoriés dans une annexe au document, mais il n’était pas immédiatement clair quels individus étaient ciblés».
Au niveau international, la décision de Trump, même si elle était attendue, a soulevé un tollé général, y compris dans les rangs des pays alliés des Etats-Unis. Selon l’agence de presse britannique Reuters, au moins 79 ont exprimé leur soutien à la CPI après l’annonce des sanctions américaines et mis en garde contre «le risque d’impunité et d’affaiblissement du droit international et le risque que ces sanctions puissent «compromettre les affaires en cours devant la juridiction».
Dans une déclaration commune, ils ont exprimé leur «soutien indéfectible» à la juridiction. «Nous réaffirmons notre soutien continu et indéfectible à l'indépendance, à l'impartialité et à l'intégrité de la CPI», lit-on dans le document rendu public hier par l’agence britannique Reuters.
«La Cour constitue un pilier essentiel du système judiciaire international, en garantissant la responsabilité des crimes internationaux les plus graves et la justice pour les victimes», ont écrit les 79 signataires représentant les deux tiers des 125 Etats membres de la CPI, une juridiction qui poursuit et juge les personnes coupables de crimes de guerre, d’agressions contre l’humanité et de génocide.
Parmi les pays signataires, la France, l'Allemagne et le Royaume-Uni, et parmi les pays ne figurant pas sur la liste, l'Australie, la République tchèque, la Hongrie et l'Italie, entre autres. Salima Tlemçani
Cessez-le-feu à Ghaza : L'Algérie aspire à la poursuite des efforts du groupe de médiation
L'Algérie a exprimé l'espoir de voir les efforts du groupe de médiation se poursuivre, avec un large soutien international, afin de garantir l'application de l'accord de cessez-le-feu à Ghaza et le suivi de sa mise en œuvre dans toutes ses clauses et dimensions, a indiqué jeudi un communiqué du ministère des Affaires étrangères, de la Communauté nationale à l'étranger et des Affaires africaines. «Avec le début des négociations de la deuxième phase visant à consolider le cessez-le-feu dans la bande de Ghaza, en particulier, et à poursuivre la prise en charge des répercussions de la guerre qui lui est imposée, en général, l'Algérie exprime l'espoir de voir les efforts du groupe de médiation se poursuivre, avec un large soutien international, afin de garantir l'application de cet accord et le suivi de sa mise en œuvre dans toutes ses clauses et dimensions», lit-on dans le communiqué. A cet égard, «l'Algérie exprime son rejet catégorique des plans visant à déplacer et vider Ghaza de ses populations autochtones, dans le cadre d'un plan plus large ciblant le projet national palestinien dans son essence», précise le communiqué. «L'Algérie réaffirme également sa conviction profonde que la réalisation d'une paix durable au Moyen-Orient demeure étroitement liée à la satisfaction des droits du peuple palestinien, en lui permettant d'établir son Etat indépendant et souverain, selon le principe des 'deux Etats' convenu au niveau international, en tant que solution juste, durable et définitive au conflit arabo-israélien», ajoute la même source. «Partant de ce principe, l'Algérie insiste sur l'impératif d'unifier les territoires palestiniens, de Ghaza à la Cisjordanie et El Qods occupées, en vue de concrétiser le projet national palestinien, soulignant que les tentatives d'effacer les repères de ce projet, de le fragmenter ou de le liquider ne feront que prolonger le conflit, approfondir les souffrances du peuple palestinien et aggraver l'état d'insécurité et d'instabilité dans l'ensemble de la région», conclut le communiqué.